En regardant la nouvelle Surface Go de Microsoft, il nous est difficile de ne pas penser à un iPad. Même format ou presque, mêmes gros contours d’écran noirs (iPad 1 et Air), poids approchant, etc. Le design arrière est plus anguleux, il y a une partie mécanique (un chevalet), on peut ajouter une carte mémoire Micro SD (bonjour Apple !), etc. mais dans l’ensemble, les deux appareils sont d’apparence similaire. La différence majeure est bien évidemment dans le système qui propulse l’appareil : un vrai bon Windows 10. Microsoft a-t-il trouvé sa réponse aux iPad avec sa Surface de 10 pouces ?
Construction et finitions
Moins sujette aux contraintes volumiques des industriels classiques du monde du PC, la division « matériel » (hardware) de Microsoft a toujours eu le luxe de soigner les rares appareils qu’elle a lancés. Au fil des itérations, l’entreprise de Redmond a acquis un sacré savoir-faire, tant et si bien que les comparaisons avec Apple ne sont pas exagérées : l’ajustement des pièces s’avère parfait, le toucher des touches on/off et volume +/- sur le dessus est excellent et le métal mat du plus bel effet. Le pied du chevalet est, pour la première fois chez les Surface, dépourvu de crans et orientable à loisir sur environ 170° ce qui le rend plus pratique que celui de ses aïeuls.
Cette belle facture a un revers. Depuis un moment déjà, Microsoft est salement épinglé par iFixit pour l’impossibilité de réparer les Surface en cas de problème, de casse, etc. Un constat identique avec ce Surface Go. Certes, l’informatique en général tend vers des appareils toujours plus fins, avec des composants tous soudés à la carte-mère, mais ce n’est pas parce que c’est le choix de la majorité de l’industrie que nous devons le saluer. Et vu l’épaisseur de l’engin (8 mm), il ne nous paraît pas inconcevable que les ingénieurs puissent mettre en place des fentes pour changer mémoire vive et/ou disque SSD (le format M2240 est aussi petit qu’une barrette de RAM). C’est moins un problème d’ingénierie que de volonté, et c’est ce que nous reprochons à l’industrie tout entière, pas seulement à Microsoft.
On peut vraiment travailler avec
Pourquoi proposer un appareil format iPad sous Windows 10 ? Pour profiter d’un système d’exploitation (OS) taillé dès le départ pour le travail et non la consommation de médias – oui, on peut travailler avec un iPad, mais l’OS est moins adapté que Windows ou Mac OS. Le format de 10 pouces est évidemment moins agréable pour travailler longtemps qu’un PC 13 pouces, mais nous avons été surpris par le confort que peut offrir cette petite machine. Ce contrat est rempli grâce à la qualité de son écran – la définition de la dalle de 1800 x 1200 pixels offre une bonne lisibilité des caractères, même avec des accents – et la qualité de son clavier.
Si ses performances n’ont rien d’extraordinaire – le Pentium 4415Y cadencé à 1,6 GHz n’est pas un monstre, loin de là –, cela suffit largement non seulement au quotidien, mais même pour de ponctuelles manipulations « lourdes ». Nous avons ainsi pu choisir, développer, recadrer, exporter et retailler des fichiers de 26 Mpix issus du Fujifilm X-T3 avec Adobe Lightroom CC et Photoshop CC pour illustrer cet article. Oui, il a fallu attendre un peu que les logiciels se lancent et les exports ont pris plus de temps qu’avec un bon gros Core i7, mais rien de bien handicapant pour un usage nomade.
Logithèque (et ludothèque) énormes
La force de Windows, c’est l’énorme logithèque dont il dispose. Avec Windows 10, on peut toujours faire tourner de vieux programmes, que ce soit via l’émulation native de Windows (mode compatibilité) ou par le biais d’outils logiciels comme DOSBox. De vieux utilitaires dont on a du mal à se passer pour certains usages – j’adore Antrenamer et Faststone Viewer – en passant par des logiciels un peu datés mais qui marchent toujours (mon vieil Antidote 8 me suffit par exemple). Sans parler de la suite Office, des logiciels créatifs (Lightroom CC et Photoshop CC fonctionnent très bien) et bien entendu… des jeux vidéo. Imbattable aussi dans ce domaine, Windows est la plateforme la plus riche en titres.
Si le circuit graphique intégré au processeur – un pauvre HD Graphics 615 – n’est pas à même de faire tourner les meilleurs jeux 3D actuels en Full HD à 60 images par seconde, Windows dispose d’un catalogue gigantesque : à moins de ne jurer que par les titres les plus gourmands en ressources, n’importe quel petit PC comme ce Surface Go peut permettre de jouer, qu’il s’agisse d’anciens titres que l’on déniche sur Good Old Games ou de jeux indépendants légers. A titre personnel, le plaisir de pouvoir jouer à Baldur’s Gate – Remaster ou a Torment : Tide of Numenera, en mobilité, sur « tablette », sans avoir à racheter le titre sur Android ou iOS est un vrai plus. Sans parler du formidable Into the Breach !
Mode tablette convaincant
Sans le clavier, Surface Go peut s’utiliser comme un iPad. Si Windows 10 est fort logiquement moins efficace qu’iOS ou Android, le « Mode tablette » de l’OS fait le job et les applications du Windows Store telles que Netflix fonctionnent comme sur n’importe quel périphérique concurrent (mode hors-ligne, présentation, etc.).
La qualité de l’ergonomie dépendra évidemment de la nature des applications – Paint 3D prend en charge le pincer/zoomer ce qui n’est pas le cas du vieux Paint – et de leur âge. Les vieux logiciels et leurs petites icônes ne sont pas là pour faciliter le travail mais on s’en sort quand même – merci le clavier virtuel qui apparaît quand le clavier physique est détaché.
Du point de vue ludique, le clic droit sur l’écran n’est pas toujours correctement pris en charge et le pavé tactile ainsi que ses boutons peuvent être obligatoires. Sans être une machine gaming, la Surface Go a accès à suffisamment de titres intéressants dans le monde PC pour pouvoir s’amuser et ce, à moindre coût.
Chargeur propriétaire : une hérésie du XXe siècle
La Surface Go profite de la même prise de recharge que les anciens modèles de Surface, une espèce de machin de 3 cm de large conçu « avec les pieds » : propriétaire, plutôt fragile, pas facile à dégoter quand on l’a perdu (et cher). Un choix légitimé par le fait que Microsoft entend ainsi permettre à ses utilisateurs de profiter de leurs anciens chargeurs. Une excuse tout juste acceptable : on comprend le motif, mais à l’heure où la majeure partie des smartphones, l’essentiel des tablettes et de nombreux ordinateurs sont passés à l’USB-C (comme toute la gamme Xiaomi… ou Apple !) on se dit qu’on nage en plein 20e siècle. Certes l’USB-C n’est pas suffisant pour les gros PC portables gaming qui tirent 350 W, mais dans le cas de notre Surface Go, même le chargeur de notre tablette Google Pixel C suffit.
Bonne surprise : la seule prise USB-C peut, elle aussi, charger la tablette ! Pourquoi alors ne pas avoir intégré deux (voire trois) prises de ce type ? Un supplément de prises aurait étendu le confort de travail des utilisateurs en permettant les transferts d’une clé USB/carte mémoire vers un disque dur, en limitant le nombre de chargeurs à emporter (un USB-C costaud pour la Surface et le téléphone), etc. Espérons que Microsoft entende nos complaintes et abandonne son machin au profit de (nombreuses) prises USB-C 3. Pour la Surface Go 2 ?
Autonomie convenable
La Surface Go n’est pas une marathonienne : 6h29 en endurance vidéo Full HD h264 (5h25 en h265) et 6h38 à notre test polyvalent. Dans la vraie vie, ces 6h et des brouettes sont accessibles sans trop forcer dès lors qu’on n’utilise pas de logiciels trop gourmands. Avec Lightroom CC, a fortiori en traitement RAW, cette endurance devra être largement revue à la baisse.
Pour un usage intense comptez 4h, modéré 5h, en mode consultation 6h. Ce n’est pas énorme, mais dans le cas d’un voyage en avion, une batterie externe puissante (qui puisse sortir 15W) peut tout à fait alimenter en continu la Surface Go – l’avantage du Pentium Gold 4415Y c’est que c’est une plate-forme peu énergivore, l’écran étant sans doute l’élément qui mange le plus.
Clavier super (mais cher)
Le clavier détachable « Type Cover » et son touchpad intégré sont une énorme surprise : non seulement les touches offrent une frappe agréable pour le format, mais en plus elles sont rétroéclairées. On peut travailler de manière efficace et débiter de la copie : cet article ainsi que notre prise en main du Fujifilm X-T3 ont été intégralement écrites, illustrées et montée dans notre (affreux) backoffice avec le petit Surface Go et souvent dans l’avion.
Ces deux articles susmentionnés ont été écrits entièrement (ou presque) au cours de vols en Europe, une prouesse rendue possible non seulement par le petit format (et la légèreté) de l’ensemble, mais aussi par l’efficacité de la Type cover. Un accessoire dont le touchpad offre un toucher digne des très bons PC, ce qui n’est pas rien.
Format 10 pouces oblige, gare aux périodes de frappe trop prolongées : au bout d’un moment, la contraction dans les avant-bras s’avère plus intense qu’avec un clavier aux dimensions « normales ». A ce titre, Surface Go ne doit pas, selon nous, être votre unique machine de travail.
Une configuration à éviter, promesse marketing douteuse
Dans les publicités, la Surface Go est toujours mise en avant avec la promesse alléchante « à partir de 449 euros ». N’y allons pas par quatre chemins : si ce prix de départ n’est pas un mensonge – la machine existe – il s’agit pourtant d’un mirage. La configuration de base est peu performante avec seulement 4 Go de RAM et 64 Go de stockage eMMC, un format de mémoire flash peu véloce. Trop juste pour un usage quotidien et pas du tout taillé pour assurer dans le temps.
La configuration que nous voulions tester était la version équipée de 8 Go de RAM et de 128 de SSD, un disque en version PCIe, plus rapide que l’eMMC. Grand bien nous a pris de demander cette configuration : c’est d’ailleurs la seule dont dispose le parc de prêt presse de Microsoft. Preuve indirecte, s’il en fallait une, qu’il s’agit de la meilleure version à mettre en avant dans les tests…. Le problème de ce modèle ? Il est plus cher : 599 euros.
Un tarif trop élevé ? Pas exactement : si le clavier était compris nous estimons que ce serait une excellente affaire – cela fait des années que nous rêvons d’un appareil « sérieux » fonctionnant sous Windows et capable de se glisser dans n’importe quel sac. Le hic c’est que le clavier s’achète en option et que la facture est lourde : de 99 à 129 euros selon le modèle. Dans le cas de notre configuration de test, l’addition se monte donc à 728 euros. Loin de la promesse des pubs à « 449 euros »… et c’est ce que nous reprochons à Microsoft : faire des pubs à 449 euros tout en poussant auprès des lecteurs – et donc des consommateurs potentiels – les résultats des machines plus onéreuses.
Si on met cette promesse de côté et que l’on évalue le produit à l’aune de ses services rendus – proposer une tablette de 522 g (764 g avec le Type Cover qui pèse 242 g) que l’on peut transformer en vrai PC pour pouvoir (réellement) travailler, alors le prix de 700 euros paraît bien plus acceptable. Voire carrément abordable si on cherche des alternatives : un iPad Pro 10,5 pouces avec 64 Go coûte 739 euros… sans clavier !
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