Amazon Kindle Fire : la promesse
A ce jour, aucune tablette Android n’a réussi à inquiéter l’iPad, qui domine le marché depuis sa sortie au printemps 2010. La Kindle Fire d’Amazon y parviendra-t-elle ? Elle a deux sérieux arguments : son prix très agressif − 199 dollars, soit moitié moins que le moins cher des iPad − et le remarquable environnement à sa disposition.
Amazon Kindle Fire : la réalité
La Kindle Fire mesure 190 x 120 x 11,4 mm et pèse 413 g et est donc un peu plus encombrante qu’un livre de poche. Elle fonctionne avec Android 2.3 Gingerbread. Rien d’extraordinaire jusqu’ici. Il faut l’allumer pour découvrir ce qui la rend unique : son interface utilisateur. La version standard d’Android a été entièrement remaniée pour ouvrir grandes les portes d’un somptueux « écosystème » patiemment constitué par Amazon.
Cet univers comprend aujourd’hui des millions de fichiers musicaux et de livres numériques, des dizaines de milliers de films et de programmes TV, des milliers d’applications ainsi que des centaines de magazines et de journaux. C’est grâce à lui que la Kindle Fire peut prétendre être la première alternative crédible à l’iPad dans un domaine clé, celui des loisirs multimédias.
Lorsque la Fire arrive au domicile de son propriétaire, elle est déjà configurée avec le profil Amazon de ce dernier : la prise en main en est grandement facilitée, et tous les contenus numériques achetés par le passé sur le site d’e-commerce (musique, livres, applications Android) sont préinstallés et immédiatement disponibles. Le paramétrage général ne prend que quelques minutes et ne nécessite pas de connecter la tablette à un ordinateur.
Un écran IPS, comme celui de l’iPad
L’écran de 7 pouces au format 16/9 de la Kindle Fire exploite la même technologie IPS (in-plane switching) que celui de l’iPad. Résultat : les couleurs sont éclatantes, et les angles de vision, remarquables. Mieux : cet écran a reçu un traitement chimique (Gorilla Glass) très efficace contre les chocs et les rayures.
Sa résolution de 1 024 x 600 pixels est inférieure à celle de la tablette d’Apple (1 024 x 768 pixels), mais, comme il est sensiblement plus petit, la densité en pixels par pouce (ppp) se révèle proportionnellement plus élevée : 169 ppp contre 132 pour l’iPad. Cela se traduit par un dessin un peu plus net des caractères, très appréciable pour la lecture d’un livre numérique.
En revanche, les amateurs de photos ne seront pas à la fête, car les prises de vue numériques se font encore très majoritairement au format 4/3 et non 16/9. Pour les regarder avec une qualité optimale, sans bande noire, ils devront les recadrer à l’aide d’un logiciel de retouche d’image avant de les transférer sur la Kindle Fire. Un fastidieux travail en amont qui sera récompensé par un rendu magnifique à l’écran.
Une tablette parée pour la vidéo à la demande
Alors que la plupart des tablettes Android fonctionnent avec le processeur Tegra 2 de Nvidia, Amazon a choisi l’Omap 4430 de Texas Instruments et lui a associé 512 Mo de mémoire vive. Cadencé à 1 GHz, ce modèle double cœur est techniquement très proche du Tegra 2, et ses performances sont similaires.
Il le surpasse cependant dans le décodage vidéo, car il accepte une plus grande variété de formats HD. Il intègre par ailleurs la technologie M-Shield, pour gérer les DRM, sécuriser les achats en ligne, etc.
La Kindle est certifiée Netflix HD et est livrée avec un client pour ce service de vidéo en streaming, le plus populaire outre-Atlantique. Elle intègre aussi d’autres clients, pour Hulu Plus et pour Amazon Instant Video. Hélas, ces services alléchants sont strictement réservés aux Etats-Unis et poussent le vice jusqu’à vérifier l’adresse IP des appareils qui cherchent à s’y connecter.
Un équipement spartiate
La Kindle Fire n’a pas de caméra. Elle fait également l’impasse sur la prise de son. De fâcheuses lacunes, mais rappelons, à la décharge d’Amazon, que les tablettes actuelles ne brillent pas par leurs qualités en photo ni en vidéo. On se sent de toute façon toujours ridicule quand on brandit son iPad 2 en public pour réaliser des prises de vue au petit bonheur la chance, faute de distinguer quoi que ce soit à travers les reflets de l’écran. Ce n’est que pour la visioconférence que l’absence de caméra et de microphone est vraiment dommageable. La tablette d’Amazon est aussi dépourvue de sortie HDMI, mais ce n’est pas indispensable au quotidien.
On aurait apprécié en revanche une liaison Bluetooth, bien pratique pour écouter de la musique avec un casque sans fil ; le son stéréo de la Fire ne pouvant prétendre à autre chose qu’à accompagner les jeux et les livres interactifs pour enfants. Les mélomanes apprécieront la présence d’une prise pour casque audio, mais, surprise, il n’y a pas de bouton de volume : le réglage s’effectue uniquement au moyen d’un logiciel et requiert bien trop de manipulations. Exit enfin le module GPS et Google Maps.
Pas de connecteur microSD
Un câble secteur est fourni, mais, alors qu’un port microUSB permet de connecter la tablette à un PC – pour échanger des données ou pour recharger la Fire (compter 4 heures pour cela) –, le câble correspondant n’est pas livré. C’est un tantinet mesquin, à moins qu’Amazon ne juge que son service de stockage en ligne rend une telle connexion superflue.
Aucun lecteur de carte microSD n’est présent : il sera donc impossible d’étendre la capacité de stockage de la Kindle, qui plafonne à 6,5 Go (sur 8 Go annoncés ; la différence est occupée par les fichiers système). C’est suffisant pour conserver des milliers de livres numériques, des centaines de photos et de fichiers MP3 ainsi que des dizaines de jeux, mais terriblement peu dès que l’on souhaite emporter avec soi quelques films HD.
Qu’à cela ne tienne, Amazon propose le cloud storage (« stockage en ligne »). Les cinq premiers gigaoctets sont gratuits pour tout détenteur d’un compte Amazon. Au-delà, il faut souscrire un abonnement, à raison de 1 dollar par an et par gigaoctet. En revanche, tout contenu acheté directement sur Amazon (musique, applications, films, etc.) est stocké gratuitement dans le cloud, sans limitation d’aucune sorte et indépendamment de l’espace de stockage consacré aux fichiers.
Ce service suppose évidemment que l’on dispose d’une connexion à Internet. Le hic, c’est qu’Amazon ne propose pas de modèle 3G de la Kindle Fire : en dehors du Wi-Fi 802.11b, g et n, point de salut. A noter cependant qu’une trop forte sollicitation du cloud réduit substantiellement l’autonomie de la batterie. D’après le fabricant, celle-ci atteint 8 heures en lecture d’e-book et 7 h 30 min avec des films… à condition de désactiver le Wi-Fi.
Tournez manège !
Android a la réputation de rebuter les « non-geeks », qui lui reprochent sa complexité. Amazon a donc conçu une interface conviviale, qui occulte cet aspect du système d’exploitation. Après un démarrage à froid d’une trentaine de secondes, la Kindle Fire affiche un carrousel évoquant irrésistiblement le Cover Flow d’iTunes − tout en s’en différenciant suffisamment pour épargner à Amazon les foudres d’Apple.
Un glissement de doigt fait défiler le carrousel vers la gauche ou vers la droite. L’animation est plaisante et fluide en règle générale, malgré quelques hoquets à l’occasion. Les livres, applications, films, photos, morceaux de musique et pages Web récemment chargés y sont affichés. Il est possible de créer des favoris, qui apparaissent au bas du carrousel, une fonction bien pratique pour s’y retrouver dans ce qui devient rapidement un véritable fourre-tout.
En haut apparaissent une fonction de recherche semblable à celle de l’iPad ainsi qu’une liste de catégories : Newsstand, Books, Music, Video, Docs, Apps et Web. Chacune renvoie vers un nouvel écran dont le contenu s’affiche sur des étagères, à la façon d’iBooks sur l’iPad. Il est très facile de passer des fichiers locaux à ceux du cloud et d’en télécharger.
A l’instar des liseuses d’Amazon, la Fire impose son propre format de fichier, différent de l’ePub, le standard des livres numériques. Cela n’a cependant pas de réel impact sur les titres récents. Ceux-ci sont souvent proposés en deux versions : l’ePub (avec DRM) sur les sites des principales liseuses du marché (Nook, Sony, Kobo, etc.) et celle, propriétaire, d’Amazon. La Kindle Fire n’est pas bégueule : elle accepte sans rechigner les applications de la concurrence (Kobo Reader, Google Reader, etc.). En ce qui concerne les ouvrages libres de droits au format ePub, il y a toujours moyen de les lire sur la Fire à l’aide d’une application tierce, par exemple Bluefire Reader.
Dans la section Newsstand figurent les journaux et les magazines. Dommage que la lecture en soit gênée par la taille de l’écran : il faut systématiquement jouer avec le zoom pour agrandir les pages d’un article en mode Page View, c’est-à-dire en conservant la mise en page originale. Dans la section Docs, on trouve tous les fichiers bureautiques que l’on a transférés. On peut ouvrir des documents PDF, Word, Excel ou PowerPoint mais pas les modifier ni en créer de nouveaux. Des restrictions aisément contournables par l’achat d’applications telles que Quickoffice Pro ou Documents to Go, sur l’Appstore d’Amazon.
Quant à la section Music, elle accueille toutes les fonctions que l’on retrouve habituellement sur un lecteur classique. Différents formats audio sont acceptés : AA, AAX, AAC (sans DRM), MP3, Midi, OGG et WAV. On peut passer instantanément des morceaux de musique enregistrés sur la Kindle Fire à ceux de l’Amazon Cloud Player.
Silk, un navigateur plutôt… rêche
Pour surfer sur le Web, Amazon propose Silk (« soie » en anglais) à la place de l’habituel navigateur de Google. Il gère les onglets, est compatible avec les principaux standards du moment, dont Flash, mais son intérêt est ailleurs : il exploite le Web Services Cloud (AWS) d’Amazon, de puissants serveurs interconnectés dont il se sert pour regrouper toutes les données nécessaires à la composition de la page avant qu’elle ne s’affiche sur l’écran de la Kindle Fire. Le résultat nous a laissés dubitatifs, car la plupart des pages Web mettent plus de temps à se charger que sur un iPad 2.
Mais le talon d’Achille de la Kindle Fire réside dans la taille de son écran, trop petite pour une navigation confortable. En effet, on doit sans cesse agrandir les pages Web pour en lire le contenu. Un agrandissement qui s’effectue par saccades et donne une désagréable impression de travail bâclé. Espérons qu’une prochaine mise à jour y remédiera. En dehors de cette réserve, on apprécie de pouvoir créer des signets, qui apparaissent automatiquement dans le carrousel de la Fire.
Selon Amazon, Silk est capable d’« anticiper » la prochaine requête et met en mémoire tampon les pages correspondantes. Il utilise des fonctions de recherche heuristique pour déterminer la probabilité que l’utilisateur aille sur tel site en fonction de la page sur laquelle il surfe actuellement. Silk verrait juste dans 85 % des cas. Un point qui ne pourra être vérifié qu’après une longue période de navigation sur Internet.
Côté messagerie, la Kindle Fire est livrée avec un client e-mail assez basique. Il est compatible avec POP et Imap, mais pas Microsoft Exchange. Une limitation qui peut facilement être contournée par l’achat d’applications spécialisées sur l’Appstore d’Amazon.
Une boutique en ligne exclusive
La Kindle Fire a tout pour devenir une excellente plate-forme ludique : elle se vend exactement au même prix que le modèle d’entrée de gamme de l’iPod Touch, dont Apple vante régulièrement les mérites en tant que console de jeux. Tous les grands classiques (Angry Birds, Plants vs Zombies, Cut the Rope, Pinball, Doodle Jump, etc.) sont au rendez-vous et peuvent être téléchargés sur l’App Store d’Amazon qui se substitue à l’Android Market. Pour l’instant, il est réservé à ceux qui possèdent un compte Amazon américain.
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