Imaginez : demain, votre smartphone n’a plus Gmail, YouTube, Google Maps ni même le Play Store. Panique à bord ? Pour la première fois, je me suis posé la question en testant le Huawei Mate X6. Car oui, comme tous les récents Huawei, il tourne sans services Google. Un vrai saut dans l’inconnu pour un utilisateur ordinaire comme moi, habitué à l’écosystème Android classique. Mais est-ce vraiment un casse-tête au quotidien, ou juste une histoire d’adaptation ?
Huawei a eu des années pour peaufiner son alternative. L’AppGallery et Petal Search tentent de combler les trous, avec des applis tierces et des astuces pour contourner les manques. Mais entre les services bancaires qui râlent, les trajets en voiture sans historique des adresses et les mises à jour manuelles, le confort prend un coup. Alors Huawei réussit il à nous faire oublier tout cela avec son dernier bijou technologique ? C’est ce que nous allons voir dans ce test.
Prix et disponibilité
À 1999 €, le Mate X6 coûte très cher… mais c’est 200 € de moins que son prédécesseur, le X3. Dans la même fourchette que le Galaxy Z Fold 6 ou le Pixel 9 Pro Fold, il joue clairement la carte premium. Disponible depuis le 13 janvier 2025 en France, le Mate X6 se décline en noir et rouge bordeaux.
Dans la boîte, une coque sert à la fois de protection et de support réglable (pliée ou dépliée). Le combo câble et chargeur mural est inclus. C’est rare en 2025.
Logiciel : Google est absent, mais il y a une solution
Si vous êtes du genre à paniquer dès que Gmail met cinq secondes à charger, accrochez-vous : le Mate X6 fonctionne sans les services Google. Autrement dit, pas de Play Store, pas de Maps, pas de YouTube natif. Huawei a développé son propre univers avec EMUI 15, une interface qui ressemble à s’y méprendre à n’importe quel Android… en plus capricieuse. C’est d’ailleurs bien Android qui tourne en fond, mais sans l’aide des services Google donc.

Au début, on tâtonne. Et c’est exactement ce qui arrive quand on découvre les raccourcis modifiés, les paramètres cachés dans des menus inattendus, ou le panneau de notifications divisé en deux onglets. « Pourquoi faire simple ? », se demande-t-on. L’habitude finit par s’installer, mais clairement, ce n’est pas pour les allergiques au changement.

Premier réflexe : ouvrir l’AppGallery. Là, c’est la foire aux applis tierces et aux alternatives maison. Spotify ? Présent. WhatsApp ? Aussi. Mais pour Netflix ou votre appli bancaire, ça se corse. Pas de panique : Huawei permet d’installer des APK via des magasins externes comme Aurora Store. Traduction : on peut télécharger quasi n’importe quelle appli Android, y compris YouTube ou Gmail, via cette porte dérobée.

Cerise sur le gâteau, MicroG (un faux framework Google) permet de contourner les alertes de connexion. Oui, ça ressemble à de la magie noire, mais en vrai, c’est juste une appli à activer une fois. Résultat : vos mails arrivent, Waze trouve votre route, et Google Drive sauvegarde vos photos. Le hic ? Les mises à jour ne se font pas toutes seules, et certaines applis râlent parce qu’elles ne reconnaissent pas l’appareil. Un vrai jeu de patience.

Malgré les galères logicielles, EMUI 15 regorge de pépites. Prenez le multi-tâche : sur l’écran déplié, on peut ouvrir trois applis en même temps. Autre trouvaille : les « Air Gestures ». Vous faites un V de la main pour prendre un selfie, serrez le poing pour baisser le volume… Futile ? Sûrement. Marrant ? Carrément. Et puis il y a l’IA qui fait son job en silence : elle est censée masquer les notifications quand quelqu’un regarde votre écran, filtre les bruits de fond pendant les appels, ou efface un photobomber dans vos photos. Des détails qui rappellent qu’on a quand même un smartphone premium entre les mains.

Cependant, tout n’est pas rose. Même avec MicroG, Google Pay ne marche pas. Oubliez les paiements sans contact. Les applis bancaires ? Certaines refusent de s’ouvrir à cause de l’absence de certification Google. Heureusement, ce n’était pas le cas de la mienne. Durant le test, il a aussi été compliqué d’accéder aux mots de passe stockés sur le gestionnaire de Google. Il fallait aller les chercher un par un sur Google Chrome, le remplissage automatique ne fonctionnant pas sur les applications tierces. L’assistant vocal Celia est gentil, mais il ne rivalise pas avec Google Assistant pour gérer vos rappels. Quant aux mises à jour logicielles, Huawei promet seulement 2 mises à jour Android majeures et 3 ans de correctifs. C’est très loin de rivaliser avec Samsung ou Google et leur 7 ans de suivi.
On sent aussi que certaines applications ne sont pas encore totalement adaptées au format. En ouvrant certains jeux ou applications sur l’écran externe, comme Instagram, cette dernière n’arrive pas à s’afficher correctement sur l’écran interne une fois le smartphone déplié.

Le même phénomène se produit aussi en passant de l’écran externe à l’écran interne. Vous pouvez voir par exemple ici que les boutons de suivi et de discussion n’occupent pas toujours toute la largeur de l’écran. Le phénomène est aussi constaté sur certains jeux, qui s’étirent étrangement en passant de l’écran externe à interne, alors qu’ils s’affichent correctement s’ils sont ouverts directement sur l’écran interne.
Malgré tout cela, est ce qu’on s’en sort ? Tout dépend de votre degré d’addiction aux services Google. Si vous êtes prêt à bidouiller un peu, à accepter que certaines applis soient en retard d’une version, et à fouiller dans les paramètres pendant de longues minutes dès que vous voulez changer quelque chose, le Mate X6 devient viable au quotidien. Mais si vous avez besoin que tout fonctionne au premier clic, sans a priori, on ne peut que recommander le giron Android classique.
Design : presque à la hauteur des meilleurs
Plié, le Mate X6 se glisse dans la poche comme n’importe quel smartphone. Déplié, il devient une fine tablette. Avec ses 9,9 mm d’épaisseur fermé et 239 grammes, Huawei a réussi un tour de force : rendre un écran pliable presque banal. Enfin, façon de parler. Car dès qu’on le manipule, les détails rappellent qu’on a affaire à un objet qui a coûté presque 2000 euros. La coque en aluminium et la charnière magnétique inspirent confiance, même si certains concurrents chinois font encore plus mince.
Huawei propose son Mate X6 en noir et en rouge en France avec un revêtement en cuir végétal, et la coque livrée avec le smartphone utilise le même matériau. À l’avant, le verre Kunlun de 2ᵉ génération promet de survivre aux chutes de 1,2 mètre. L’IPX8 permet de le tremper 30 minutes dans un lac… mais gare au sable, ennemi juré des pliants. Dommage pour les plages.
La mécanique d’ouverture est un petit plaisir coupable. A chaque clac émet un bruit à la fois satisfaisant et rassurant, on a pas peur de la casse. La rainure au milieu ? Elle existe, mais on la sent plus qu’on ne la voit. Après une journée, le doigt glisse dessus sans s’y accrocher. Les bordures de l’écran interne sont quasi invisibles, mais attention à ne pas arracher le film protecteur à l’intérieur. La petite encoche de la caméra selfie ? Discrète, mais un poil dérangeante sur une interface aussi immersive.
À l’arrière, l’énorme bloc photo fait de l’ombre au reste. Épais, saillant, il fait basculer le téléphone sur une table. Mais Huawei assume : les bords biseautés et les finitions miroir en font presque un accessoire de mode. La reconnaissance d’empreinte dans le bouton power est rapide, même si le réglage (faire tourner son doigt en cercle) surprend.
Le Huawei Mate X6 séduit par sa sobriété, son ergonomie et des choix assumés. Mais comme tout pliable, il charrie des compromis. Reste qu’après deux semaines, on oublie presque qu’il se plie. Et c’est peut-être là son plus grand exploit.
Ecrans : du haut de gamme avec quelques concessions
À l’extérieur, un écran de 6,45 pouces avec une définition de 2440 x 1080 pixels qui fait presque de la même largeur qu’un smartphone classique. À l’intérieur, une dalle pliable de 7,93 pouces avec une définition 2240 x 2440 pixels, presque carrée, qui rappelle les livres de poche. Les deux utilisent la technologie LTPO. Concrètement, cela permet au Mate X6 de faire varier son taux de rafraîchissement de 1 à 120 Hz en temps réel. En pratique : quand vous lisez un article statique, ça tombe à 1 Hz (économie), et ça remonte en 120 Hz dès que vous scrollez ou jouez (fluidité). Huawei propose trois modes : « Élevé » (120 Hz fixe, gourmand), « Standard » (60 Hz, sobre) et « Dynamique » (hybride, avec des paliers à 90 Hz).

En plein soleil, au niveau de la luminosité, pas de souci : les 2500 nits promis en pic de l’écran externe et 1800 nits (en pic) de l’’écran interne tiennent la route. Les mesures de 01Lab, plus généralistes qu’un simple pic, donnent 1348 cd/m² (jusqu’à 1613 cd/m² en HDR) avec l’écran externe, assez pour lire son trajet Waze sans plisser les yeux. L’écran pliant, lui, est moins lumineux, avec une luminosité maximale de 1036 cd/m² (jusqu’à 1239 cd/m² en HDR). La nuit, les écrans descendent à 2 nits, idéal pour scroller sans s’éblouir. Par contre, oubliez le HDR sur Netflix ou Prime Video en FHD : le Mate X6 est bloqué en Widevine L3, c’est-à-dire en SD…
Au niveau de la colorimétrie, Huawei a bien calibré ses deux écrans. En mode par défaut, sur l’écran interne, 01Lab obtient un delta E 2000 excellent de 2.34 (soit moins de 3, le seuil de perception de l’œil humain). L’écran externe, lui, monte à 2.43. En clair, vous ne verrez normalement pas la différence entre les deux, si ce n’est du côté de la luminosité.
Huawei mise sur l’équilibre : des écrans techniquement solides (LTPO, définitions adaptées, bonne colorimétrie), mais qui butent sur des détails logiciels (certifications DRM, réglages automatiques absents). Pour un usage quotidien, le Mate X6 impressionne par sa versatilité, autant en écran compact qu’en tablette miniature. Mais des amateurs de sVOD (YouTube, Netflix HDR) resteront sur leur faim.
Performances : toujours un train de retard
Huawei continue de souffrir des sanctions américaines, et dote par conséquent le Mate X6 de son dernier processeur maison, le Kirin 9020. Ce dernier est sans surprise moins performant que ses rivaux chez Qualcomm ou MediaTek, et montre ses limites dès qu’on pousse les curseurs. Au quotidien, aucun souci : le combo 12 Go de RAM et CPU octocœur (dont un cœur à 2,5 GHz) fait le travail qu’on lui demande. Même en jonglant entre 15 applis, l’interface reste fluide.

Par contre, si vous souhaitez profiter d’un jeu en qualité maximale, ça se complique. Le GPU Maleoon 920, bien qu’amélioré, traîne des pieds face aux Adreno ou encore au GPU d’Apple. En jeu, le smartphone n’arrive pas à proposer une expérience très fluide sur certains titres les plus gourmands tels que Genshin Impact. Le ray tracing ? Absent. Bref, c’est comme avoir une voiture sans turbo : ça roule, mais sans frissons.
Les benchmarks racontent une histoire en deux temps. Côté CPU, le Kirin 9020 surclasse le Google Tensor G4 du Pixel 9 Pro Fold en multi-cœurs, une petite fierté pour Huawei. Mais côté GPU, on retombe dans les classements des smartphones de milieu de gamme. Et sous charge prolongée, la machine montre ses faiblesses : en mode fermé, les performances chutent un peu pour éviter la surchauffe. Déplié, ça va mieux, mais n’attendez pas des miracles. Bonne nouvelle : le stockage UFS 4.0 est rapide (on sent la diff en ouvrant les apps), et le smartphone reste toujours tiède, même après une heure de jeu.

Le Mate X6 saura gérer vos tâches quotidiennes sans sourciller, mais pourrait bien buter sur les tâches les plus gourmandes. En outre, la puce fait l’impasse sur la connectivité 5G, ce qui fait sérieusement tâche pour un smartphone vendu à son tarif. Huawei prouve qu’il peut innover malgré les barrières, mais le Kirin 9020 reste un cran en dessous des meilleurs puces du moment.
Batterie et recharge : encore quelques progrès à faire, mais correct
Le Mate X6 cache deux batteries silicium carbone qui offrent un total de 5110 mAh. C’est bien plus que des smartphones tels que le Galaxy Z Fold 6 et ses 4400 mAh. En usage normal, il tient facilement la journée, même avec l’écran pliable souvent ouvert. Le 01lab a mesuré une autonomie mixte de 17 heures et 22 minutes avec l’écran externe, et 11 heures et 15 minutes une fois déplié. C’est cependant moins que le Pixel 9 Pro Fold et ses 4650 mAh, preuve que Huawei a encore des progrès à faire.
Le 66 W filaire inclus (100 % en 1 heure et 15 minutes) est un bon compromis. Cependant, nous avons constaté que le smartphone met plus de 8 minutes à commencer à charger une fois la batterie vidée. En 10 minutes, le smartphone se retrouve toujours à seulement 1% de batterie. Ne comptez donc pas le recharger le temps de boire un café ou alors assurez vous de lancer la charge avant qu’il ne soit éteint. Une fois la recharge lancée, vous retrouverez 28 % en 10 minutes.
Le sans-fil à 50 W ? Pratique pour poser le tel sur un support la nuit. Huawei ajoute une touche maligne : la Smart Charge limite la charge à 80 % si vous le branchez toute la nuit, puis termine à l’heure du réveil. Bref, votre batterie vieillit moins vite, et vous évitez le stress de la surcharge.
Le Mate X6 ne révolutionne clairement pas l’autonomie, mais celle-ci est assez bonne. Oubliez les journées marathon sans charge, mais comptez sur lui pour tenir du matin au soir. Et si vous avez une prise pas trop loin, la charge rapide fera le boulot.
Audio
Le Mate X6 utilise deux haut-parleurs (en haut et en bas) pour un stéréo symétrique, du moins quand il est fermé. Ouvrez-le, et la répartition devient asymétrique, les deux haut-parleurs étant chacun placés sur l’une des deux parties du smartphone. Mais l’immersion reste correcte. Le volume ? Suffisant pour une session musique en cuisine, mais pas de quoi impressionner en terrasse. Les aigus sont clairs, les médiums bien équilibrés. Néanmoins, les basses traînent la patte. À plein volume, ça grésille un peu, mais il ne faut pas trop en demander à un smartphone aussi fin.
Photo et vidéo : du très bon
Le Mate X6 débarque avec un arsenal photo digne d’un téléphone premium. Au menu : une caméra principale de 50 Mpx à ouverture variable (f/1,4 à f/4), un périscope 48 Mpx (zoom x4 et macro), un ultra grand-angle de 40 Mpx. Le tout est accompagné d’un capteur spectral pour les couleurs. La partie selfie est assurée, elle, par deux petites caméras de 8 Mpx à l’intérieur et à l’extérieur.
Grand-angle
Le capteur principal de 50 MP privilégie une esthétique dynamique, avec des couleurs saturées et un contraste accentué. Ce traitement, idéal pour les réseaux sociaux, peut sembler excessif dans des contextes exigeant un rendu fidèle.
La photographie nocturne révèle des détails bien restitués, bien qu’un nettoyage de bruit trop zélé génère parfois un effet de « lissage » artificiel sur les textures.
Téléobjectif 90 mm (équivalent X4)
Le zoom optique x4 (90 mm) impressionne par sa capacité à capturer des détails précis et des portraits équilibrés, sans suraccentuation. En revanche, le zoom numérique x10 manque de finesse, rappelant les contraintes des capteurs hybrides. Oubliez le 100X, à moins que vous n’ayez envie d’une peinture à l’huile.
Le mode macro, permettant une mise au point à 5 cm, produit des images au flou d’arrière-plan (bokeh) esthétique, rivalisant avec des solutions logicielles dédiées.
Ultra grand-angle
Avec son capteur de 40 Mpx, l’ultra-grand-angle livre des résultats corrects en lumière naturelle, mais pêche par un manque de netteté sur les bords et une tendance à la sur-accentuation.
En basse luminosité, le mode Nuit augmente la luminosité et la saturation de manière peu réaliste, mais les résultats sont tout de même assez convaincants.
Portraits
En mode portrait, l’ouverture variable (f/1,4 à f/4) sculpte un flou d’arrière-plan naturel, idéal pour détacher les visages. Le zoom x4 permet des cadrages serrés sans coller au sujet, parfait pour les photos de rue. Mais gare aux couleurs : les tons de la peau ne sont pas toujours respectés.
Selfies
Les capteurs avant de 8 Mpx fournissent des selfies détaillés et équilibrés, même dans des conditions exigeantes. Le gros avantage des smartphones pliables, c’est que l’utilisation de l’écran couverture comme viseur pour les prises de vue arrière permet d’obtenir des portraits en haute résolution, exploitant pleinement les capacités du module principal.
Vidéo
En définition 4K/60 fps, le Mate X6 offre une stabilisation efficace, mais souffre d’un manque de netteté et d’un rendu légèrement délavé en plein jour. La capture nocturne, bien que lumineuse, sacrifie les détails au profit d’une réduction de bruit aggressive. Le zoom numérique x10 en vidéo reste anecdotique, limité par une résolution dégradée.
Huawei signe ici un système polyvalent, capable de satisfaire les amateurs de photographie créative grâce à ses outils avancés (ouverture variable, macro rapprochée) et son rendu dynamique. Toutefois, le traitement logiciel excessif, visible dans les couleurs sursaturées et le lissage des textures, peut décevoir ceux qui recherchent des clichés très naturels.
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