Les Razer Blade portent bien leur nom. Ce sont des lames affutées, glaçantes et séduisantes, comme doivent l’être toutes les lames renommées. Séduisantes car elles offrent des configurations puissantes, glaçantes car elles ont tendance à afficher des prix à faire blanchir un banquier.
Ces PC portables ont toujours flirté avec l’ultraportabilité, en empruntant à leurs origines aux MacBook Pro un design mâtiné d’une certaine férocité et d’un soupçon – plus ou moins discret – d’esprit gaming.
Le Razer Blade 15 2022 marche droit dans les pas de ses aînés, le regard fier et porté vers le lointain. Il offre un boîtier à la fois solide et plutôt fin, agréable à regarder et tenir en main. La finition est impeccable tandis qu’on constate à quel point il est compact et plutôt léger pour un PC portable de gamer de 15 pouces, à environ 2,1 kg.
Une configuration d’exception
Ce résultat, aussi esthétique que portable, est d’autant plus incroyable que quand on épluche sa fiche technique, Razer n’y est pas allé avec le dos de la cuillère, il n’a pas retenu ses coups. Jugez plutôt, le Blade 15 embarque un Core i9 ! Le haut du panier des Core de douzième génération, qui s’accompagne de 32 Go de mémoire vive (DDR5 – 4800 MHz) dans notre configuration de test, soit la moitié de ce que peut gérer au maximum et en théorie cette puce. Elle aligne 14 cœurs en tout, six cœurs haut performance et huit basse consommation, qui peuvent abattre 20 threads simultanés et tirer jusqu’à 115 W quand on leur lâche la bride, en théorie en tout cas. Mais cela ne s’arrête pas là.
Tournez-vous maintenant vers le siège passager et vous verrez que c’est une GeForce RTX 3080 Ti, qui lit la carte (graphique, bien entendu), avec ses 16 Go de mémoire. Vous avez le vertige ? Ce n’est pas fini. La connectique offre ce qui se fait de mieux, tout en conservant une belle variété (USB-A et USB-C). Le Wi-Fi 6E colle à l’actualité et au tout dernier standard en date. Le stockage de 1 To, au format M.2 NVMe PCIe 4.0 aligne des débits tout bonnement excellents. Le 01Lab les a enregistrés à 4,2 Go/s en écriture et presque 5,8 Go/s en lecture. Ne vous inquiétez pas, les accès disque ne vous ralentiront pas.
Si vous pensez en avoir fini avec une incroyable configuration, vous vous trompez, car il faut encore parler de l’écran. Eh oui, ici aussi, Razer ne lésine pas.
La dalle retenue par la marque singapourienne est 4K UHD, avec une définition de 3 840 x 2 160 pixels, pour une résolution de 282 points par pouce. Ce n’est donc pas de la Full HD, comme on le trouve souvent sur les machines 15 pouces qui essaient d’être abordables, ou même du 1440p, que proposent les modèles un peu plus prometteurs. On est là au sommet !
Abordable ne fait pas partie du vocabulaire de Razer, demi-mesure non plus. Le fabricant semble vouloir cocher toutes les cases de la machine qui met tous les réglages au maximum, mais ce petit jeu a un coût… Pas loin de 4 800 euros dans la version que nous avons testée.
Quoi qu’il en soit, rafraîchie à 144 Hz, elle est plutôt agréablement lumineuse (416 cd/m2), ce qui est plus de 21% plus lumineux que la moyenne des PC portables de cette catégorie. Son taux de contraste, en revanche, est plus faible. Il est de 1 004:1, et presque 15% moins bon que celui de la moyenne de ses concurrents directs. Avec un Delta E 2000 de 2,52, il se tire plus qu’honorablement de l’exercice de la fidélité colorimétrique. Il fait ainsi mieux que près de 21% de ces congénères passés entre nos mains.
A l’œil la dalle est agréable, et le contraste pas folichon arrive à se faire oublier, même quand on joue à des titres, qui aiment jouer des ambiances sombres et rapidement peu lisibles. Le rafraîchissement à 144 Hz aura surtout son intérêt dans des FPS ou dans les jeux où la précision du mouvement est importante – bien entendu, il faudra que la configuration arrive à tenir le choc pour produire le nombre d’images suffisant. Et justement, parlons performances.
Puissance, toute puissance ?
Avec un tel alignement de planètes, on devrait avoir droit à une véritable bête de compétition, un vainqueur indéniable ? Oui, et non. Par expérience, on sait qu’un Core i9 dans une configuration portable n’est pas nécessairement synonyme de performances systématiquement meilleures que celles qu’on aurait pu enregistrer avec un Core i7 équivalent en positionnement dans la gamme. Une question d’enveloppe thermique et de difficulté à dissiper la chaleur produite par une puce poussée dans ses retranchements dans un boîtier compact.
D’ailleurs les résultats que nous obtenons avec PCMark 10 le prouvent d’une certaine manière – même si c’est aussi lié à la difficulté qu’à parfois le logiciel de Razer à prendre la main sur les contrôles de Windows pour les performances de la machine.
Si on observe le score global obtenu avec PCMark 10, on constate qu’il est ainsi inférieur à ceux de tous les ordinateurs portables gaming que nous avons testés récemment.
Ainsi le MSI Stealth GS77, qui embarque un Core i7-12700H (donc moins disant dans la gamme Core et dans le positionnement interne à chaque sous-gamme – 900H contre 700H), fait bien mieux. Tandis que la palme pour ce bench revient au ROG Zephyrus G14 d’Asus, avec sa puce AMD Ryzen 9 6900HS.
Le Blade ne reprend du poil de la bête, mais sans reprendre la tête du classement, qu’avec le score PCMark 10 Content Creation, qui mobilise également la carte graphique. Pourtant parmi les machines retenues pour cette comparaison aucune ne fait aussi bien en matière de configuration. Le Stealth GS77 se « contente » d’une RTX 3070 Ti, et les autres d’une 3050 Ti, d’une 3060, ou d’une Radeon RX 6800S. Certes, ces machines dont les tailles d’écran sont proches ont la modestie de viser la Full HD ou le 1440p seulement, mais c’est aussi ça, le bon compromis.
Quoi qu’il en soit, avec PCMark 10, le Blade 15 2022 n’est qu’un peu plus de 5% supérieur à la moyenne de ceux obtenus par les PC portables de joueurs que nous avons testés.
La bonne nouvelle, c’est que le Blade réussit malgré tout à bien disperser la chaleur, malgré son Core i9, puisqu’il est 5% moins chaud que la moyenne de ses compères, même si cela implique de ventiler allègrement et assez bruyamment pour tenir la distance.
La question de la ventilation devient très audible quand on joue – et encore pire quand on joue des réglages de performances du logiciel embarqué pour presser la moindre frame hors de la configuration.
La RTX 3080 Ti est l’arme de jeu massive de Nvidia sur portable. Néanmoins, une fois encore, on constate que le Steath GS77 fait légèrement mieux avec la carte placée en dessous dans la gamme. Une fois encore pas de mystère, la définition de la dalle explique tout. Avec une dalle 4K, il était évident que la 3080 Ti était le seul choix et aurait de quoi s’occuper.
Elle permet en tout cas au Blade 15 2022 d’être presque 30% plus performant que ses adversaires directs en matière graphique, sans pour autant truster la première place. Le Blade 15 obtient ainsi un confortable score de 12 620 points dans 3DMark Fire Strike Extreme, quand la meilleure performance est de 15 292. On n’est pas loin des sommets, d’ailleurs il se classe quatrième machine portable la plus puissante que le 01Lab ait testée.
Mais une machine de gamer doit se frotter aux jeux pour donner une idée réelle de son potentiel. En l’occurrence, il faut garder en tête que la dalle 4K demande de la puissance. Sa définition UHD sollicite grandement la GeForce RTX 3080 Ti, qui n’a pas trop de ses 16 Go de mémoire pour venir à bout de sa tâche.
Sans grande surprise, tous les derniers jeux en date, y compris et surtout ceux qui sollicitent les capacités en ray tracing de la carte de Nvidia, tournent sans anicroche. Dans Cyberpunk 2077, en poussant les réglages au maximum, le ray tracing réglé sur Ultra, et en 4K, on tourne à environ 40 images par seconde. Avec un titre un peu plus ancien, comme Red Dead Redemption II, qui joue beaucoup de la profondeur de champs, on tourne à 60 images par seconde en fixant la barre au plus haut. Si vous êtes un aficionado d’Ubisoft, frottez-vous les mains, Watch Dogs Legion, autant qu’Assasssin’s Creed Valhalla, tournent au-delà des 60 images par seconde.
Bref, vous avez de la puissance à revendre et pouvez être serein sur la capacité du Blade 15 à tenir la route dans les mois et années à venir. Toutefois, cette puissance doit s’accompagner d’une question. Si les performances sont au rendez-vous, ne paie-t-on pas le prix cher pour tout cela ? Autrement dit, mis à part l’excellence de la qualité de finition qui est un facteur qui distingue Razer de la concurrence, y a-t-il un véritable intérêt à se payer une configuration si coûteuse ? Le différentiel avec une configuration plus abordable est-il si important ?
Nous avons donc décidé de comparer le Razer Blade 15 à un autre PC portable haut de gamme récent, le MSI Stealth GS77. Comme on l’a déjà dit, cette machine est équipée d’un Core i7-12700H, de 32 Go de mémoire vive, et d’une GeForce RTX 3070 Ti. Une configuration légèrement moins disante, qui se limite à une dalle 1440p (en 17,3 pouces, rafraîchie à 240 Hz). Quand on fait tourner les mêmes jeux sur les deux machines, on constate que le Razer n’écrase pas son concurrent, dans les trois titres que nous avons retenus, il l’emporte une fois (Red Dead Redemption 2), marque le pas une fois (Cyberpunk 2077) et fait jeu quasi égal (Assassin’s Creed Valhalla). Autrement dit, le Razer Blade (4 799 euros, rappelons-le) ne justifie pas, en jeu, les 1 720 euros qui le séparent du Stealth GS77 (3 078 euros « seulement »).
C’est là sans doute un de ses défauts majeurs. Certes, le Razer Blade 15 est un excellent PC portable de gaming, certes, il est magistralement fini et offre une expérience de haut niveau, mais tout cela vaut-il un prix qui flirte avec les 5 000 euros ? A nos yeux, non. D’autant que deux ou trois petites choses nous chagrinent un peu.
Parlons ergonomie, clavier et trackpad
Maintenant que le gros de ce qu’on avait à dire est passé, intéressons-nous à l’ergonomie, à ce que le Blade a à offrir en matière de prise en main, de confort de saisie au clavier, etc. Si on apprécie l’écran avec ses petites bordures latérales, à défaut d’avoir une partie basse aussi fine, on a plus à redire sur le clavier. Tout d’abord, il paraît un peu petit, comme perdu au milieu du boîtier.
On sait que c’est pour faire la place aux haut-parleurs certifiés THX (Razer possède la marque et certification), mais on aurait apprécié plus d’espace et des touches plus larges. Par ailleurs, la course des touches n’est pas particulièrement agréable. L’impression n’est pas rédhibitoire mais sur une machine aussi chère, difficile de ne pas être exigeant. Même chose pour le pavé tactile « ordinaire », qu’on n’utilisera évidemment pas pour jouer, mais qu’on n’apprécie pas beaucoup plus pour faire de la bureautique ou surfer sur le Web. Peut-être sommes-nous trop habitués à l’excellence des machines Apple ou Microsoft dans le domaine.
Quand on travaille de nuit avec le Razer Blade, on note également que le rétroéclairage ne couvre qu’une partie des touches. Ainsi, pour les touches numériques, seules les informations accessibles en minuscule (sans utiliser la touche Maj/Shift) sont illuminées, on ne voit donc pas les 1, 2, 3, dièze et autres symboles. Pas forcément pratique, et même un peu gênant.
Enfin, pour terminer sur le clavier, précisons qu’il lui arrive également d’être un peu chaud quand on joue longtemps, même si ce n’est pas vraiment gênant.
L’autonomie… Un monstre dans la moyenne
Avec un Core i9, même de douzième génération, et une RTX 3080 Ti, même si elle n’est pas toujours au taquet, ne vous attendez pas à voir le Razer Blade 15 concurrencer les ultraportables en matière d’endurance.
Il ne joue pas dans la même catégorie, il boxe en poids lourd, et cela à un impact. Néanmoins, dans les deux tests d’autonomies du 01Lab, le Blade 15 2022 réussit non seulement à ne pas être ridicule, mais en plus à s’inscrire dans la moyenne (ou presque).
En autonomie polyvalente, qui enchaîne des usages quotidiens de 100% de batterie à 0%, il a ainsi tenu 5h30, se payant ainsi le luxe d’être 3% plus autonome que la moyenne des PC portables gamers qu’il affronte.
En streaming vidéo, le monstre qu’est le Blade 15 plonge un peu. Il ne tient que 4h19, c’est assez pour regarder un film, long, très long, mais pas forcément extatique. C’est surtout 9,2% moins bon que la moyenne des adversaires du PC de Razer… s’il en reste encore debout.
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