Ouverte en septembre 2003, à Issy-les-Moulineaux (92), la résidence Chénier pour personnes âgées occupe quinze appartements d’un immeuble HLM du centre-ville. Les pensionnaires cohabitent avec des familles et des couples, et leur espace collectif, au rez-de-chaussée, est un lieu de passage pour les autres habitants, y compris les enfants, ce qui crée des liens. Stéphanie, 25 ans, habite dans l’immeuble et profite de son temps libre pour passer quelques heures à bavarder avec les retraités et, au besoin, à faire leurs courses. A Issy, on est persuadé que forger des liens entre générations est une arme efficace contre les drames de l’isolement qui ont choqué le pays lors de la canicule de l’été dernier.En plus de la solitude, la résidence Chénier veut combattre l’enfermement intellectuel. Les résidents sont encouragés à quitter leurs appartements pour passer un moment dans la salle commune où officie la maîtresse de maison. Jinny Bernard, la cinquantaine, est une femme à la fois discrète et énergique, à l’écoute permanente des résidents. Elle leur sert les repas en commun s’ils le souhaitent et organise des animations variées, dont une initiation à l’informatique. ‘ Ils s’initient à la machine et à Internet. Le but est de les aider à découvrir quelque chose de nouveau, à rester en contact ‘, explique Jinny.
Une invitation au voyage
C’est elle qui a eu l’idée d’installer des ordinateurs dans un coin de la salle commune. Aujourd’hui, la résidence dispose de deux PC, connectés à Internet par l’ADSL et équipés en Wi-Fi, d’une imprimante et d’une webcam. Jinny avoue qu’elle n’est pas une grande spécialiste de l’informatique. ‘ J’ai appris en travaillant dans un bureau. Mais je crois que c’est important que les résidents me voient apprendre un peu en même temps qu’eux. ‘Regroupées autour d’un jeu de société, plusieurs résidentes semblent encore sceptiques. ‘ A quoi cela peut-il me servir ? ‘ se demande l’une d’elles. Il faut dire que les cours d’initiation, optionnels, viennent seulement de débuter. Parmi les résidentes, il en est une qui n’a plus besoin d’être convaincue. Yvette Godaillier, 80 ans, est venue à l’ordinateur par la photographie. Grande voyageuse, elle a reçu son premier appareil photo numérique de son fils. Aujourd’hui, elle en est à son deuxième modèle, un Fine Pix de Fuji de 3,2 mégapixels. ‘ J’ai fait des photos d’une croisière en Russie et lors d’un voyage en République dominicaine. Je les tire sur imprimante’. Yvette a aussi appris à se servir de Word pour transcrire ses poèmes qui, contrairement aux photos, restent privés. Autre façon d’inviter au contact, l’espace informatique est ouvert à d’autres Isséens âgés qui souhaitent s’initier. Deux d’entre eux ont commencé à fréquenter la résidence le mardi après-midi.
Une révolution des habitudes
L’espace complète un dispositif déjà bien rôdé depuis que les ateliers Internet ont commencé à emballer les seniors d’Issy en 1999. Les différents ateliers regroupent plus d’une centaine d’inscrits. L’expérience montre qu’ils s’intéressent surtout à la messagerie électronique, pour rester en contact avec leur famille, à Internet (surtout la généalogie et les voyages) et à la bureautique basique (cartes de v?”ux et d’anniversaires, invitations à des fêtes de 50 ans de mariage).Jeanne-Yvonne Picaud est directrice de l’Alliance, l’association qui gère les services aux personnes âgées de la ville. ‘ Beaucoup de retraités aujourd’hui ont des ordinateurs portables, des graveurs, des sites Internet qu’ils ont créés, ainsi que des téléphones portables. On peut imaginer que des services comme les courses en ligne ou la télémédecine les intéresseront de plus en plus. Mais il faut aussi penser à leurs difficultés spécifiques comme les problèmes de
vue ou de doigts. ‘ Si les pensionnaires de la résidence Chénier, qui ont en moyenne 75 ans, ne se ruent pas encore sur les ordinateurs à leur disposition, il faut leur laisser le temps de s’habituer à ce qui, pour certains, est une vraie révolution des habitudes. Quant à l’intérêt de cette résidence, espace à la fois d’indépendance et de lien social, il est déjà évident. ‘ Les gens s’ouvrent. La fille d’une résidente me confiait que sa mère était plus épanouie et parlait plus depuis qu’elle s’est installée ici ‘, se réjouit Jeanne-Yvonne Picaud. Mission accomplie
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