Gare Montparnasse, 7 h 25 : le chef de quai donne le départ de l’Iris 320. Destination : Tours, contournement de la ville, passage par Massy, interconnexion avec la ligne Nord en direction de Lille et
retour gare du Nord. Le temps d’une courte pause déjeuner, il se glissera à nouveau dans le trafic, sans le perturber, pour gagner Bruxelles et enfin Calais. En somme, le train-train quotidien pour ce TGV unique lancé il y a un an. Sa mission :
contrôler l’état de l’infrastructure ferroviaire à la vitesse des trains commerciaux, soit jusqu’à 320 km/h.A bord, outre les deux conducteurs d’essai, des ‘ TGVistes ‘ expérimentés, ont pris place six des neufs membres de l’équipage. Ingénieurs ou techniciens, ils sont tous polyvalents et
placés sous la direction du responsable de la rame, Luc Panaget, 28 ans, recruté en 2003 dès le lancement du projet.Attentifs devant leurs écrans, ils surveillent les 150 pistes de mesures transmises via le réseau en fibre optique par les appareils fixés sur toute la longueur du train, sur les bogies, sur le toit, sur les boîtes d’essieux, etc.
Caméras, centrale inertielle, accéléromètres, capteurs de force, de déplacement et de pression, détecteurs, fournissent des mesures simultanées et en temps réel de l’état de la voie, afin d’écarter tout risque de déraillement ; de la
signalisation ; des caténaires ; et, prochainement, des appareils de télécommunication.Le système de localisation distribué sur toute la rame permet de connaître la position du défaut détecté à moins de cinq mètres près. Car, à la vitesse de 320 km/h, le moindre défaut de géométrie de la voie suffit à produire une
accélération transversale de la caisse, ce qui peut fortement gêner les voyageurs, jusqu’à leur donner le mal des transports.‘ L’enjeu est de détecter le défaut avant qu’il soit péjorant pour l’exploitation, explique le superviseur. Notre ambition est d’ailleurs de passer d’une maintenance préventive à une maintenance
prédictive. ‘ Pour autant, si la détection des défauts est automatique, la vérification des mesures reste l’apanage des hommes. Toutes sont validées en temps réel par un technicien puis par le superviseur, qui estime si le
service de maintenance concerné doit être alerté en vue d’une intervention. A tout moment, chacun a la possibilité de superposer les informations en cours d’acquisition sur un parcours avec celles des
‘ tournées ‘ précédentes. Et, en fin de journée, ce sont entre 60 et 100 Go d’informations qui viendront enrichir la base de données.
Une rame entièrement réaménagée
L’Iris 320 est une des rames TGV construites en 1995 : elle porte le numéro 4530. Elle a été entièrement réaménagée pour accueillir des équipements informatiques de pointe et l’équipage, qui peut être amené à
vivre à son bord. Trois de ses huit voitures abritent une dizaine de chambres-cabines, des équipements sanitaires, une cuisine ainsi qu’une salle à manger.
Les voies à la loupe
Dans la voiture 1 de la rame de maintenance, deux postes d’opérateurs voie se font face. Les écrans affichent toutes les mesures, effectuées au millimètre près, et leurs représentations graphiques. Elles concernent la géométrie de la
voie : nivellements longitudinal et vertical ; dévers (l’inclinaison dans les virages) ; courbure et rayon de courbure ; écartement des rails (entre 1,435 et 1,439 mètre).
Des rails inspectés au laser
Deux caméras blindées, dont l’optique est nettoyée hebdomadairement, sont fixées sur la structure du bogie. Elles filment la réflexion du faisceau laser à infrarouge qui éclaire chaque rail. Au centre de la photo, la centrale
inertielle, dotée de trois gyroscopes et de capteurs d’accélération, permet de déterminer une référence par rapport à laquelle sont calculés en temps réel les paramètres de géométrie de la voie en charge. De quoi détecter les défauts de
positionnement de la voie, comme le nivellement ou l’écartement entre les deux files de rail. Le responsable de la rame observe sur un écran de contrôle les images enregistrées par les deux caméras. Les tracés représentent la réflexion du faisceau
laser sur chaque rail. Pour transmettre en temps réel les défauts critiques détectées aux centres de maintenance, l’équipage dispose d’une connexion GPRS qui lui permet d’envoyer par mail les graphiques encadrant le défaut.
Localisation en temps réel
Pour remédier aux défauts détectés (de voie, de signalisation, etc. ), les équipes de maintenance doivent pouvoir intervenir vite sur l’infrastructure (si possible sans perturber le trafic). D’où l’importance des appareils fournissant
les données de localisation précises. Ainsi, l’Iris 320 est doté de détecteurs de balises (le boîtier visible à la jonction des deux remorques) permettant de recaler la localisation tous les 10 kilomètres, tandis que 4 codeurs
angulaires équipent des extrémités d’essieu pour mesurer la vitesse du train. Voiture 3, le chef de bord surveille l’écran du localisateur, qui donne en temps réel les informations sur la position du train. Et sur tous les écrans s’affichent la
vitesse, le point kilométrique sur la voie, l’heure et la distance couverte.
Des caténaires sous haute surveillance
Les équipements caténaires peuvent être observés à travers les vitres blindées des deux postes de vigie aménagés dans le toit. D’ici à l’été, un système d’analyse de désaxement de caténaire, dénommé SadCat, complétera la panoplie des
mesures. Il permettra de surveiller les interactions entre le fil de contact et le pantographe, cet équipement qui permet de capter le courant électrique (en 25 kV sur les lignes à grande vitesse, en 1,5 kV sur le réseau classique français
et en 3 kV en Italie). Une caméra (d’une définition de 1 mégapixel à 75 images par seconde), présente dans chaque vigie, filmera chaque pantographe, les images étant transmises par fibre optique à un ordinateur. De quoi mesurer le désaxement
des fils de contact, évaluer le débattement du pantographe et générer une alerte voire une intervention de la maintenance en cas de valeur anormale.
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