Animé des pires intentions, je prends le volant de l’Opel survitaminée qu’on m’a confiée. Pendant deux heures, je serai un apprenti chauffard, lancé sur le circuit de Mortefontaine (Oise). Moteur, en piste ! Je roule, un ?”il distrait sur la voie de droite, et passe négligemment sur la voie de gauche, sans regarder dans le rétroviseur. Désagréable sensation au niveau du postérieur, la partie gauche du siège vibre. Mon ?”il, lui, est attiré par le rétroviseur gauche, un signal lumineux clignote. Salutaire : dans le rétroviseur déboule à toute vitesse, pour me doubler, la Saab conduite par un confrère. Coup de volant à droite, la collision est évitée de justesse. Pas refroidi pour autant, je continue à braver les règles du code de la route. Un carrefour en X se profile, précédé d’un stop. J’ignore ce panneau et je passe en force. Un fragment de seconde plus tard, me voilà projeté vers l’avant mais heureusement retenu par la ceinture de sécurité. La voiture a freiné toute seule ! Devant mon Opel à l’arrêt, la Saab de mon collègue passe paisiblement. Sans ce freinage d’urgence, les deux voitures se seraient télescopées.Assez de frayeurs pour aujourd’hui, j’effectue un retour prudent aux stands. La sortie du circuit se profile, mais un bruit de sirène retentit en écho. Une voiture de police approche, mais par où ? Réponse sur l’écran TFT de la voiture : la fourgonnette arrive par la gauche, à 100 mètres, symbolisée à l’écran par une petite icône rouge. Elle se rapproche : je me range pour la laisser passer.L’idée de General Motors semble excellente : l’Opel communique avec les voitures dans un rayon de 300 mètres. Elle leur indique sa position, les voitures environnantes renvoient la leur. C’est ainsi que la voiture peut déjouer les accidents, soit en freinant automatiquement, soit encore en alertant le conducteur.
Pas si coûteux que ça
Aucun doute : la technologie V2V (vehicule to vehicule) devrait, si elle se généralise, épargner de nombreuses vies. Mais son prix freinera-t-il son adoption ? Le dispositif sera-t-il facturé plusieurs milliers d’euros par véhicule ? ‘ Bien moins que cela, répond un expert de General Motors, HorstWieker. Comptez plutôt 300 euros. Les coûts sont faibles : une antenne GPS et une antenne Wi-Fi suffisent. On les relie à l’ordinateur de bord, et le tour est joué ‘.Comment les ordinateurs de bord des deux voitures vérifient-ils que les deux autos évoluent sur une même route ? Et ce, sans même recourir à une carte numérique et à un logiciel de navigation ? Sur un itinéraire aux routes droites, avec un seul véhicule dans les 300 mètres de portée, cela fonctionne. Mais en conditions réelles, quand, dans ce même rayon de 300 mètres, roulent des dizaines de voitures, cela fonctionne-t-il encore, sans cartographie GPS ? Même quand les routes sont sinueuses, se croisent et se décroisent ? ‘ Bien sûr, répond notre expert. Les voitures ne se communiquent pas uniquement leur position respective. Elles s’envoient un relevé complet de leurs vingt derniers points de passage. Ce qui constitue une courbe. Les voitures peuvent ainsi comparer leurs courbes, et s’assurer qu’elles évoluent bien sur la même route ‘. Convaincant. Mais une autre interrogation subsiste. Comment se fier aux relevés de position d’un GPS ? En théorie, les signaux GPS sont précis au mètre près.
A la merci des temps de réponse
Mais, dans la réalité, les signaux GPS sont perturbés par l’atmosphère : leur précision chute aux dix mètres près. Réponse tout aussi probante : ‘ Les récepteurs GPS des deux voitures subissent les mêmes perturbations car les véhicules roulent près l’un de l’autre. Les positions GPS qu’ils relèvent comportent donc les mêmes erreurs. Par conséquent, on peut vraiment comparer leurs positions avec une précision d’un mètre, voire de 50 centimètres. ‘Dernier doute : le temps de réaction du Wi-Fi est-il suffisant ? ‘ Pas le Wi-Fi tel qu’on l’utilise sur nos ordinateurs, répond Horst Wieker. Le Wi-Fi qui relie nos ordinateurs est souvent associé au protocole Internet TCP-IP. Il envoie les informations par paquets. Si un paquet se perd en route, il est renvoyé plus tard. Résultat : le temps de réponse est catastrophique. Beaucoup trop lent pour éviter un accident. Des dizaines d’experts travaillent sur des normes de transmission plus réactives. Notre projet utilise des composants Wi-Fi combinés à un nouveau protocole de transmission. Les informations sont envoyées en un seul message, très court, sur un seul canal Wi-Fi. Cela prend quelques millisecondes, et le message arrive à coup sûr. ‘
Une frénésie de recherche
A quelle échéance cette technologie V2V sortira-t-elle des laboratoires ? ‘ Il faudra être patient. Les premiers véhicules équipés devraient sortir vers 2015 ‘, considère un expert indépendant. A Francfort, dès octobre, un millier de véhicules sera équipé du système V2V ‘ SIM TD ‘ pour une expérimentation grandeur nature. La Californie et le Japon ont lancé des programmes de tests similaires.Aucun constructeur automobile mondial n’échappe à cette frénésie de recherche, tant l’enjeu semble important. Deux consortiums européens ont été constitués, Car2Car et Prevent, auxquels collaborent Renault et PSA, parmi d’autres. Les Japonais travaillent sur le projet ITS, les Américains sur le projet VSC.Au total, des centaines de chercheurs, aux quatre coins du monde, sont en train d’apprendre à nos voitures à parler entre elles. Souhaitons que nos dangereuses quatre roues décrochent très rapidement leur brevet daptitude au Wi-Fi
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