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Le cimetière des déchets électroniques

Si vous déposez votre vieil ordinateur dans un magasin ou une déchetterie, il finira dans une usine de traitement comme celle de Gonesse, près de Paris.

Ouverte depuis deux ans, l’usine de traitement des D3E (déchets d’équipements électriques et électroniques) de Veolia Propreté se prépare pour le coup de feu dès que la filière aura reçu l’autorisation officielle. ‘ Pour l’instant, nous traitons entre 650 et 900 tonnes par mois. Mais avec l’ouverture d’un nouvel espace automatisé en novembre, nous pourrons recevoir 1 500 tonnes par mois ‘, annonce Arnaud Humbert-Droz, le directeur d’exploitation du centre. La directive européenne 2002/96/CE fixe un objectif de 4 kilos de D3E collectés et recyclés par habitant et par an. Mais chez Veolia, on table sur 10 kilos d’ici 2010. Signe de l’intérêt des consommateurs citoyens, une opération de recyclage d’appareils informatiques menée à Rueil-Malmaison en mai dernier, à l’initiative de Dell et de Veolia, a récolté 12 tonnes de déchets en une journée !Le camion franchit les portes du centre de traitement et vient se ranger sur une balance géante. La pesée avant et après le déchargement permet de facturer les clients de l’usine au plus juste.

Une montée en puissance du flux

Dans la zone de stockage, s’entassent des écrans, des unités centrales, des Minitel, des baies de brassage etc. Jusque-là, ces matériels provenaient surtout de clients industriels (Alcatel, Philips Medical Systems, EDF…) ou de centres d’usine de prétraitement. A partir de cet automne, le flux devrait s’intensifier, car Veolia a répondu à des appels d’offres des trois éco-organismes chargés de la collecte et du recyclage des D3E (Eco-Système, Ecologique, European Recycling Plateform). Quand les spécialistes parlent de recyclage des D3E, ils distinguent quatre ‘ flux ‘ : le froid (réfrigérateur, climatiseur…), les gros appareils ménagers hors froid (lave-vaisselle, sèche-linge…), les écrans et les petits appareils en mélange (les appareils informatiques, les sèche-cheveux, outils de bricolage, etc. ).

Comment se fait le premier tri

‘ Si nous sommes devant un produit que nous ne connaissons pas, nous faisons une analyse pour savoir comment le traiter et combien de temps cela prendra ‘, explique Arnaud Humbert-Droz.‘ Sur 1,7 million de tonnes de D3E produits en France chaque année, on estime que seules 60 000 tonnes sont véritablement retraitées. Le reste est incinéré ou enfoui, sauf les écrans jugés trop polluants ‘, résume Arnaud Humbert-Droz.A Gonesse, les employés de l’usine retroussent leurs manches pour démanteler les appareils et les dépolluer. A la sortie du camion, chaque lot reçoit un numéro. Le traitement commence avec un premier tri : on sépare écrans, unités centrales, imprimantes. Les cartouches des imprimantes sont collectées et envoyées à un prestataire. Le reste sera broyé, car les châssis n’ont pas assez de valeur pour justifier plus d’attention.

Dépollution et valorisation

L’usine actuelle comporte quatre postes de démantèlement. Une vingtaine d’ouvriers (sur environ 40 et bientôt 50 avec la montée en puissance du site) sont des personnes souffrant d’un handicap et travaillant par l’intermédiaire d’un centre d’aide par le travail (CAT). Armés de tournevis à air comprimé, les techniciens démolissent unités centrales et écrans.Sur les unités centrales, ce sont les cartes électroniques qui sont le plus recherchées. Il y a encore quelques années, elles étaient très riches en or et en argent. Historiquement, la société Triade Electronique, aujourd’hui filiale de Veolia dédiée aux D3E, était spécialisée dans le traitement des cartes électroniques et fondait ses propres lingots avec l’or récupéré. On extrait aussi les piles au lithium, du palladium et du cuivre. L’alimentation est mise de côté pour être broyée. Le reste se compose de ferraille, d’aluminium et de plastiques. Tous ces éléments ?” appelés matières premières secondaires ?” sont revendus à des affineurs par catégories.Les écrans sont les enfants terribles du traitement à cause de leurs tubes cathodiques très polluants. Après que le câble a été coupé, les écrans passent sur le poste de démantèlement où on récupère carte télé, ferraille, plastique et cuivre. Puis le tube cathodique poursuit sa route sur la chaîne. Un technicien meule la partie métallique du tube et sépare la dalle du cône à l’aide d’un fil chauffant. Une hotte aspire les poudres luminescentes qui sont stockées, puis enlevées pour être détruites comme produit dangereux. Le verre sera réutilisé pour faire de nouveaux écrans.Avec l’inauguration de la nouvelle section de l’usine, une partie de la chaîne sera automatisée.Autre amélioration que le centre de Gonesse introduira prochainement, un système informatique qui automatisera la gestion des lots. Dotés de code-barres, ils seront scannés par une douchette et l’information saisie sur des appareils mobiles à écran tactile qui seront synchronisés avec les PC centraux. Et ces appareils, eux aussi, seront recyclés à leur tour, un jour…

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Isabelle Boucq