Avec le dégroupage total, on peut désormais profiter de l’ADSL en très haut débit et du téléphone en se passant de l’abonnement à France Télécom. A la clé, de substantielles économies… réservées pour le moment à ceux qui habitent dans des zones privilégiées.
On en rêvait depuis des années. C’est désormais une réalité. Il est aujourd’hui possible d’utiliser une ligne téléphonique fixe chez soi sans payer d’abonnement à France Télécom. Une véritable révolution pour les particuliers qui seront ainsi dispensés de verser systématiquement 13 euros par mois à l’ex-opérateur public, même quand ils n’utilisent pas ses services, en passant leurs coups de fil avec un opérateur concurrent.Cette révolution, on la doit au ‘ dégroupage total ‘. Grâce à lui, un opérateur privé peut administrer la ligne qui relie l’abonné au central téléphonique de son quartier (la boucle locale dans le jargon). Il y a encore peu de temps, seules les entreprises pouvaient profiter de cette formule en passant par un opérateur rival de France Télécom.
Sans France Télécom ? 156 euros d’économie par an !
Les particuliers les plus chanceux ceux qui habitent dans des zones éligibles au dégroupage devaient se contenter du ‘ dégroupage partiel ‘ ; il leur fallait encore passer par France Télécom pour atteindre leur central avant d’exploiter éventuellement le réseau d’un autre opérateur. D’où l’obligation de conserver un abonnement à France Télécom, abonnement représentant une somme non négligeable : 156 euros par an.Outre l’ouverture du marché de la téléphonie à la concurrence, c’est le développement de l’ADSL qui ‘ pousse ‘ le dégroupage. C’est en prenant le contrôle des lignes, même partiellement, que les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) enrichissent leurs offres, à la fois en augmentant les débits (pour passer du classique 512 kbit/s à 1 Mbit/s et même à 2 Mbit/s dans certains cas), en prenant en charge les communications téléphoniques et même en proposant un service de télévision, le tout, sur ADSL. Rien d’étonnant donc à ce que les premières formules de dégroupage total proviennent de FAI et d’opérateurs qui proposent des formules complètes, incluant accès à Internet et téléphonie.Historiquement, c’est Telecom Italia qui s’est lancé le premier dans le dégroupage total en France pour le grand public, l’opérateur italien le proposant discrètement depuis le début de l’année 2004 dans quelques grandes villes françaises. Mais c’est l’annonce faite par Neuf Telecom au début du mois de mai qui a été la plus remarquée. Il faut reconnaître que la formule de dégroupage total de l’opérateur est assez alléchante : pour 31,90 euros par mois, tout compris (même la location du modem), elle combine un accès Internet à très haut débit (2 Mbit/s) et un forfait téléphonique de cinq heures de communications mensuelles vers les numéros fixes dans toute la France. Pas mal, d’autant que la procédure pour s’abonner est assez simple, pour peu que l’on prenne quelques précautions (voir encadrés pages suivantes). Cette formule, qui sera proposée dans quelques grandes agglomérations à partir du mois de juin, implique toutefois certaines contraintes. Ainsi, les candidats au dégroupage total chez Neuf Telecom devront accepter de changer de numéro de téléphone. Par ailleurs, l’opérateur se réserve le droit de modifier la durée de son forfait de communications après le 31 mars 2005 ; même si ses tarifs hors forfait sont globalement raisonnables, il y a un petit risque de déception une fois la date fatidique arrivée…Si l’offre de Telecom Italia n’avait pas déchaîné les passions, celle de Neuf Telecom a entraîné des réactions immédiates. En particulier de la part de Free, qui a aussitôt riposté en promettant de démarrer le dégroupage total dès le mois de juin. Sur le papier, la formule de Free semble extrêmement avantageuse. Pour 29,90 euros par mois, soit 2 euros de moins que chez Neuf Telecom, ses abonnés éligibles au dégroupage total pourront profiter d’un accès ADSL à 2 Mbit/s (voire plus dans certains cas), d’un service de télévision sur ADSL et de communications téléphoniques illimitées vers les numéros fixes en France… Et tout cela en permettant aux abonnés qui le souhaitent de garder leur ancien numéro de téléphone !Quelques réserves toutefois : Free ne nous a guère habitués à tenir son calendrier (de nombreux abonnés à l’ADSL attendent ainsi le dégroupage partiel de leur ligne depuis décembre, une promesse faite sur le site de Free, et sans cesse décalée…) ; son service de télévision par ADSL laisse encore à désirer ; et, en cas de résiliation, Free facture des frais de fermeture d’accès, ce qui n’est pas le cas de Neuf Telecom.Bref, il faut y regarder à deux fois avant de se précipiter sur le dégroupage total. D’abord, il ne faut pas oublier que seuls certains abonnés pourront en bénéficier (ceux habitant dans des zones fortement urbanisées dans un premier temps). Ensuite, il sera prudent d’avoir en parallèle un forfait de téléphonie mobile pour pouvoir passer des coups de fil en cas d’urgence. En effet, contrairement à Telecom Italia, qui s’appuie sur un mode de traitement traditionnel des communications téléphoniques, Free et Neuf Telecom utilisent des techniques de ‘ voix sur IP ‘ et ‘ voix sur ADSL ‘ qui ne permettent pas de téléphoner quand le modem (ou la ligne ADSL) est en panne…Reste que le dégroupage total est financièrement plus intéressant que le dégroupage partiel, surtout quand on tient compte des communications téléphoniques incluses dans les formules (parfois illimitées). Et la disparition de la facture France Télécom représente un véritable avantage… Ceux qui ont été déçus par certaines pratiques de l’ex-opérateur public parleront même de libération ! Pour l’anecdote, il faut savoir que France Télécom reste propriétaire de la ligne physique jusqu’au central téléphonique ; c’est l’opérateur effectuant le dégroupage qui lui reversera une somme, équivalente à l’abonnement, pour en assurer la gestion et l’entretien. Cette transaction, transparente pour l’abonné, n’empêchera pas les opérateurs et les FAI pratiquant le dégroupage total de faire des bénéfices. Et sans doute, de continuer la guerre des prix sur les offres combinant accès Internet et téléphonie. Car si Neuf Telecom et Free inaugurent cette formule, d’autres (Cegetel, Télé2…) pourraient les rejoindre dans quelques mois. Tiscali se lancera même dans l’aventure dès juillet !
