Depuis quelques mois, des fabricants de périphériques proposent de curieux petits adaptateurs USB. Branchés d’un côté aux micros, de l’autre aux prises électriques, ils permettent sans aucun matériel ni câble
supplémentaire de relier des ordinateurs en réseau et de partager une connexion à Internet. Ces adaptateurs, vendus en moyenne 100 euros (656 francs) pièce, sont des boîtiers de réseau CPL (Courant porteur en ligne). Ils permettent
d’utiliser le réseau des fils électriques d’une installation domestique pour s’en servir, en même temps, comme d’un réseau informatique.
Un réseau sur ondes courtes
La technique utilisée, fruit d’une vingtaine d’années de recherche, exploite les caractéristiques électromagnétiques du courant alternatif afin de transporter de l’information.Petit rappel : dans une pile ou une batterie, le courant produit va toujours d’une borne plus vers une borne moins. Il est dit continu. Le courant qui sort de votre prise murale, lui, s’inverse à intervalles réguliers. C’est le
courant alternatif.En France, la charge électrique du courant domestique change ainsi de direction cent fois par seconde. Comme toute vibration, cette alternance électrique se traduit par l’émission d’ondes électromagnétiques. Ce sont les plus courtes
de ces ondes électromagnétiques, identifiées par leurs fréquences, que les adaptateurs CPL utilisent pour créer un réseau de transfert de données. Si vous pouviez ‘ écouter ‘ ce qui se passe sur votre ligne électrique, vous
entendriez un souffle continu comparable à celui émis par un fax ou un modem analogique lorsque vous laissez le haut-parleur branché.Et voilà leur secret : pour transmettre des données, les adaptateurs CPL se comportent grossièrement comme des modems. Ils émettent un souffle, le bruit blanc, dont ils modifient l’intensité, ou qu’ils altèrent par des
grésillements. Le tout constitue un code comparable au morse, qui sera lu et décodé à l’autre bout de la ligne par l’adaptateur destinataire.A l’état naturel cependant, les ondes porteuses d’un réseau électrique ne sont pas assez stables pour garantir que les données expédiées au départ soient ‘ audibles ‘ à l’arrivée. Tout dépend de la façon dont
votre réseau électrique a été fabriqué.
Filtrage de fréquences
Autre problème : il suffit qu’un nouvel équipement soit mis en route, une perceuse par exemple, pour provoquer de graves interférences.En réalité, dès qu’un appareil électrique est branché sur le réseau, il est à la fois source de parasites électromagnétiques et parasité lui-même, comme en atteste l’effet que produit le fonctionnement d’un moteur de perceuse sur le
son d’une chaîne hi-fi, qui se trouve alors perturbé par des grésillements. Ces perturbations interdisent d’utiliser la partie potentiellement la plus ‘ bruyante ‘, c’est-à-dire les fréquences les moins élevées, où la
circulation de l’électricité se fait de façon plus désordonnée. De ce point de vue, le principe de fonctionnement d’un adaptateur CPL est le même que pour l’ADSL. Seules les fréquences les plus élevées (de 4 à 30 MHz) permettent de transporter
efficacement des données. Ces fréquences sont moins sensibles aux perturbations, qui touchent d’abord les basses fréquences.
Un débit de 8 à 10 Mbit/s
Pour se donner le maximum de chances de transmettre intactes les informations d’un bout à l’autre de la ligne, les adaptateurs CPL empruntent donc à l’ADSL sa technologie de découpage et d’émission en simultané des données sur
différents canaux. Comme une radio qui diffuserait ses programmes sur plusieurs fréquences FM au même moment, le réseau CPL s’assure une plus grande fiabilité. Il en profite pour décupler sa capacité de transport des données.Un même bloc d’informations, découpé en quinze segments envoyés simultanément, met mécaniquement beaucoup moins de temps à être expédié à son destinataire. En théorie, cette technique permettrait d’atteindre un débit de
14 Mbit/s. En pratique, les vitesses de transfert de la dizaine d’adaptateurs CPL disponibles sur le marché dépassent rarement les 8 à 10 Mbit/s.
Des dialogues bien régentés
La comparaison avec l’ADSL s’arrête à la méthode de codification des données. Car là où un modem ADSL est seul sur la ligne téléphonique qui le relie au central de l’opérateur, un adaptateur CPL est censé pouvoir dialoguer avec
plusieurs de ses homologues, reliés à d’autres PC.Il s’agit donc bien de constituer un vrai réseau, dont le principe de fonctionnement reprend celui des réseaux filaires (Ethernet) et sans fil (Wi-Fi). Tous les adaptateurs connectés se partagent l’ensemble de la capacité de transport
disponible, en s’avertissant les uns les autres du moment où ils ont besoin de transmettre, et en indiquant la fin de transmission.
Des mesures anticollisions
Ces mesures ‘ anticollisions ‘ sont destinées à garantir que les différents adaptateurs CPL du réseau ne ‘ parleront ‘ pas en même temps, ce qui produirait un flux de données
incompréhensible pour les destinataires.Ces précautions sont d’autant plus nécessaires que, à moins d’installer un réseau CPL dans une maison de campagne isolée, les données émises ne s’arrêtent pas d’elles-mêmes aux limites de votre propre réseau électrique. Elles peuvent
‘ déborder ‘ sur le réseau électrique de vos voisins. Pour réduire ce risque, les adaptateurs CPL s’identifient les uns les autres grâce à un code secret, à la manière des réseaux sans fil Wi-Fi.Tout a été fait pour rendre les réseaux CPL simples, sûrs et efficaces. Et cela en dépit du fait que l’installation électrique domestique n’a jamais été conçue, au départ, pour un tel usage. Pour l’instant, seuls quelques adaptateurs
CPL sont vendus en France (voir, par exemple, Micro hebdo n?’ 267, p. 8 ). Il ne s’agit que d’une première étape. Les Allemands et les Autrichiens peuvent d’ores et déjà acheter et connecter des routeurs ADSL
compatibles CPL, pour un prix presque comparable à celui d’un modem routeur Wi-Fi. On n’arrête pas le progrès !
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