Superman, le héros portant une cape rouge, est un homme pourvu de pouvoirs exceptionnels. Un supercalculateur, c’est un ordinateur hors du commun. Ce superordinateur est capable d’exécuter un grand nombre d’opérations en même temps. On parle alors de puissance de calcul. Elle se mesure en nombre d’opérations qu’une machine peut abattre en une seconde, soit en flops (floating-point operations per second). Un PC ordinaire effectue environ 25 milliards d’opérations simples par seconde, ce qui représente une puissance de 25 gigaflops.En comparaison, le meilleur supercalculateur français, 5 000 fois plus rapide, culmine à 139 téraflops, soit 139 000 milliards d’opérations par seconde. Le Blue Gene/P, c’est son nom, appartient au CNRS (Centre national de la recherche scientifique). Pour atteindre une telle puissance, tout est affaire de processeur. Composant informatique essentiel, le processeur assure tous les calculs nécessaires au bon fonctionnement de l’ordinateur. C’est le ‘ centre de calcul ‘.On pourrait croire que le secret d’un supercalculateur comme Blue Gene/P réside dans un processeur plus véloce que celui d’un PC. Il n’en est rien. Inspiré par l’adage selon lequel l’union fait la force, le supercalculateur pousse le principe de coopération à son paroxysme. Il exploite une armée de puces ordinaires, soit 40 000 processeurs (à 1 GHz) dans le cas de Blue Gene/P. Un processeur multic?”ur tient aisément dans un boîtier d’ordinateur, mais plusieurs dizaines de milliers ? On les range dans de grandes armoires. Blue Gene/P en mobilise cinq. Chaque armoire est refroidie, afin de limiter les erreurs de calcul, et reliée à un réseau à haut débit, sur lequel transitent les données nécessaires aux calculs.
Calculer à l’échelle de la planète
Il ne suffit pas d’augmenter le nombre de processeurs pour calculer mieux, encore faut-il que les calculateurs travaillent en harmonie.Quatre ouvriers peuvent se concerter pour construire une maison, plusieurs milliers d’ouvriers exigent un maître d’?”uvre pour orchestrer le travail et répartir les tâches. Dans un supercalculateur, c’est le rôle du logiciel de calcul. Il découpe les opérations à réaliser en petits morceaux, les répartit entre les processeurs, récupère les résultats, les organise, lance de nouveaux calculs. C’est au prix de cette multiplication des processeurs et de l’écriture d’un logiciel de calcul efficace que l’on atteint une puissance de calcul phénoménale. Elle sert surtout aux scientifiques de toutes disciplines (astrophysique, physique des particules, mécanique des solides, recherche nucléaire, pour n’en citer que quelques-unes), pour mener à bien les calculs utiles à leurs recherches. Sans un supercalculateur, certains domaines progresseraient beaucoup moins vite.L’armée investit aussi beaucoup dans le calcul intensif, afin, par exemple, de simuler les effets d’une bombe atomique. Le centre de calcul pour la Défense française, Tera, géré par le CEA, affiche ainsi une puissance de calcul totale de 60 téraflops. Les entreprises privées ne sont pas en reste : Total possède le dixième supercalculateur mondial. Pour la recherche scientifique, les supercalculateurs servent principalement à établir des modèles scientifiques à l’échelle de la planète. Dans un modèle simulant la courbe des températures climatiques terrestres durant un siècle, le moindre détail compte : le comportement de l’atmosphère, celui des glaces, des plantes, des courants marins. Pour simuler chacun de ces phénomènes naturels, la puissance des plus gros supercalculateurs ne suffit pas toujours. Les scientifiques doivent, dans ce cas, simplifier leur modèle, au risque d’obtenir des résultats erronés. Certains chercheurs préfèrent attendre les supercalculateurs suivants, plus puissants.L’achat d’un supercalculateur n’est pas un acte anodin, même pour un organisme de recherche. L’investissement de départ se compte en dizaines de millions d’euros, sans compter les frais de maintenance. La durée d’utilisation d’un supercalculateur n’excède pas quatre ans : au-delà, dépassé, il est généralement revendu à des entreprises moins exigeantes. Il cède la place à un supercalculateur plus puissant. Les évolutions techniques sont rapides.
Les plus gros sont aux États-Unis
Dans vingt ans, un PC de bureau devrait pouvoir atteindre la capacité d’un supercalculateur actuel. On pourrait donc se contenter d’attendre. C’est sans compter sur la concurrence que se livrent les scientifiques entre eux. Partout sur la planète, la course à la puissance de calcul bat son plein. Impensable, pour les Français, de laisser vingt ans d’avance à la recherche américaine, équipée de la moitié des 500 plus gros supercalculateurs mondiaux. Et, comme le souligne Victor Alessandrini, directeur du centre de calcul numérique intensif du CNRS : ‘ Que faire en attendant vingt ans ? On arrête de travailler ? ‘
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