Il y a un an et demi, tout laissait croire que les photophones, ces téléphones équipés d’un appareil photo, allaient inexorablement grignoter le marché des compacts numériques d’entrée de gamme, grâce à des objectifs et des capteurs de plus en plus performants. Pourtant, la catastrophe annoncée n’a pas encore eu lieu, et il est possible qu’elle n’arrive jamais. Non pas que les consommateurs aient boudé les photophones : il s’en est vendu des millions. Mais cet équipement ne s’est pas fait au détriment du compact. Certes, les constructeurs ont tendance à négliger l’entrée de gamme, mais plus pour des raisons de rentabilité que de concurrence.Que s’est-il passé ? Tout simplement une segmentation des usages. On n’attend pas d’un photophone les mêmes services qu’un ‘ vrai ‘ appareil photo, on ne l’utilise pas de la même façon ni pour les mêmes raisons. Manifestement, nous restons attachés à ce dernier pour toutes les photos importantes, événements familiaux, souvenirs de voyages… alors que le photophone, toujours dans la poche, est l’instrument de l’instantané pris dans la rue, de la photogag, des images qu’on fait circuler entre amis et qu’on ne conserve parfois même pas. Plus inattendu : aujourd’hui, ce n’est plus la photo, mais la fonction vidéo des téléphones qui a le vent en poupe. Le jeu imbécile consistant à filmer en direct une agression, qui a défrayé la chronique ces derniers temps, en est l’illustration la plus exécrable. Heureusement, elle n’est pas l’unique utilisation. Des milliers de vidéos circulent de téléphone en téléphone, ou sur Internet… et peuvent même avoir les honneurs des télévisions : on se souvient que les premières images diffusées des attentats de Londres, l’été dernier, avaient été tournées avec des téléphones mobiles. Ces petits films ont même déjà leurs lettres de noblesse avec la création, en octobre dernier à Brest, d’un festival qui leur est entièrement consacré, suivi, en février, d’un concours lancé par l’opérateur Orange pour ‘ faire émerger de nouveaux talents ‘.Une fois de plus, la société humaine montre là sa formidable capacité à utiliser, à optimiser et à détourner tous les moyens de communication mis à sa disposition. Et aussi que ces moyens, loin de se concurrencer, se juxtaposent et se mélangent. Du ‘ photovidéophone ‘ aux reflex numériques et caméscopes haute définition à prix abordables, jamais le spectre n’aura été aussi large dans le choix de sa ‘ boîte à images ‘, jamais les usages n’en auront été aussi diversifiés. Et de simples consommateurs d’images, nous voici en passe d’en devenir aussi tous producteurs. Au-delà des inévitables excès qui doivent être rejetés, cest plutôt une bonne nouvelle.
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