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Zeev Suraski (Zend Technologies): ” Le modèle économique du logiciel libre est mature “

Alors que nombre d’éditeurs de serveurs d’applications revoient leurs prévisions de croissance à la baisse, le développeur de PHP 4 explique pourquoi il crée sa propre société.

A quoi attribuez-vous le succès de PHP ?Les développeurs choisissent PHP parce qu’il est gratuit et fiable. Il est également très facile à utiliser et propose un support multi-plate-forme. PHP fonctionne avec la plupart des bases de données du marché ou open source, des serveurs HTTP tels que Apache et Microsoft IIS, et des systèmes d’exploitation comme Unix, Linux ou Windows. Dans un contexte d’entreprise, il s’intègre donc parfaitement à un parc hétérogène. L’ensemble des modules et classes additionnelles permet en outre d’étendre les fonctionnalités de base du serveur pour construire très rapidement des applications métier à forte valeur ajoutée. Plus généralement, le développement collaboratif des logiciels open source possède de réelles vertus : réactivité, consensus sur les choix d’implémentation, mise au point efficace, etc. Les logiciels sont forcément plus fiables lorsqu’une communauté tout entière de développeurs passionnés se penche sur leur berceau.Quel facteur pourrait accélérer son adoption dans l’entreprise ?PHP connaît déjà une croissance très rapide. Mais je pense qu’il est confronté au même problème que la majorité des logiciels libres : les entreprises estiment, à tort, qu’une solution gratuite et au code source ouvert ne peut pas être aussi performante qu’un logiciel commercial. Ce qui est absolument faux. Les différents benchmarks réalisés par des sociétés indépendantes (Owendo Technologie, Globalis Media Systems, Clever Age ?” NDLR) le prouvent. Sur le terrain, PHP est souvent bien mieux adapté aux besoins des entreprises que ses alternatives commerciales.PHP peut donc se mesurer à des solutions commerciales comme ASP, Coldfusion ou Weblogic ?Bien sûr ! L’expérience empirique de milliers d’hébergeurs et les mesures scientifiques de nombreux benchmarks prouvent que, à configuration matérielle identique, PHP surclasse toujours les solutions Java. Il est au moins aussi rapide que Coldfusion ou qu’ASP, si ce n’est plus. Nous n’avons pas à rougir face aux alternatives commerciales. D’autant que, couplé au Zend Cache, PHP est probablement l’un des serveurs d’applications le plus rapide. Mais je pense que l’avantage numéro un de PHP ?” et, par extension, de Lamp ?” est le temps de développement qu’il permet d’économiser au travers des développements partagés par la communauté.Vous avez écrit le c?”ur de PHP 4, et donc largement contribué à son succès. Quelles sont les raisons qui vous ont poussé à créer la société Zend Technologies ?Nous avons fondé Zend à la demande de nombreuses entreprises qui souhaitaient une solution commerciale à des problématiques comme l’optimisation des performances de leur serveur, un environnement de développement vraiment dédié à PHP, etc. Il y a trois raisons qui expliquent notre choix entre logiciels commerciaux et open source. Tout d’abord, certains des produits, comme Zend Encoder (qui permet de crypter le code source PHP et de le protéger ?” NDLR), ne présentaient aucun intérêt si leur code source était disponible sur la place publique. Ensuite, certaines entreprises souhaitaient vivement pouvoir dialoguer avec un interlocuteur légalement responsable avant de migrer vers PHP. Zend Technologies remplit l’ensemble des fonctions d’un éditeur traditionnel : packaging de l’offre, support, formation, conseil, etc. Enfin, les trente développeurs que compte aujourd’hui notre société participent activement aux évolutions de PHP. En achetant des logiciels Zend, nos clients ont conscience de participer, par prestataire interposé, à la communauté PHP. Ils adhèrent à cette idée, car ils disposent rarement des ressources suffisantes en interne.Votre modèle économique est-il viable ?Oui. Nous avons commencé à vendre nos produits en ligne courant janvier. Pour l’instant, nous comptons environ mille clients, dont les effectifs s’étalent de trois à plusieurs milliers de personnes. C’est un résultat très honorable, puisque nous ne sortirons les deuxièmes versions de nos logiciels que d’ici à quelques mois. Par ailleurs, nous attendons un ROI positif pour la fin de 2002. Pour moi, c’est la preuve que le modèle économique du logiciel libre est mature.Pour les entreprises, comment justifier l’utilisation de logiciels libres à la place de solutions commerciales ?Je ne crois pas que le logiciel libre soit par principe meilleur que les offres commerciales. Certaines d’entre elles sont supérieures à leurs équivalents open source, d’autres n’ont même pas d’équivalent. Mais cela fonctionne dans l’autre sens également. Le logiciel libre a toutefois quelques avantages : potentiellement, des dizaines de développeurs peuvent travailler sur un projet, souvent beaucoup plus que s’il s’agissait d’un produit commercial. La bureaucratie n’est pas écrasante, et les idées nouvelles peuvent être rapidement formalisées et mises en ?”uvre. Enfin, sur le plan de la sécurité, de nombreuses personnes sont amenées à voir le code source, ce qui augmente les chances d’identification des problèmes.Comment voyez-vous le futur de Zend et de PHP ?Il me paraît indispensable que des sociétés telles que la nôtre ou Clever Age ?” notre distributeur officiel en France ?” jouent le rôle d’intermédiaires avec les entreprises. Nos contributions respectives au développement de PHP portent sur des aspects différents : développement de produits tiers, benchmarks de performances, conseil en architecture, etc. Cette activité commerciale connexe réconforte les entreprises et nous permet de dédier plus de ressources à PHP. Ainsi, si PHP se développe, nous nous développons. Et si Zend se développe, nous dédions plus de ressources à la communauté PHP. C’est un cercle vertueux.

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Frédéric Bordage