Où sont les milliers d’émetteurs WiMAX qui devaient faire pleuvoir du haut-débit sans fil dans les zones privées d’ADSL ? Trois ans après que les opérateurs se furent rués sur les licences WiMAX pour remplir cette noble mission, le bilan est affligeant. Au 31 décembre 2008, les vingt opérateurs désignés ont déployé 675 émetteurs sur les 3 562 prévus dans leurs obligations (lire le bilan région par région). Et tous ne sont même pas opérationnels !
Faute de rentabilité, le WiMAX est devenu un boulet pour la plupart des opérateurs : IFW, filiale d’Iliad-Free, n’a toujours pas lancé ses services à l’échelle nationale, HDRR (filiale de TDF) a revendu une partie de ses licences, huit conseils généraux titulaires d’une licence n’ont pas installé le moindre émetteur… Pire, l’opérateur Bolloré Telecom a décidé de faire machine arrière, en coupant un service WiMAX déjà commercialisé auprès du public. Une première.
« La station n’était absolument pas rentable »
Le 30 juin 2009, Bolloré Telecom ne fournira plus d’accès WiMAX sur la station qui alimente la communauté d’agglomération de l’Artois (Pas-de-Calais), près de Béthune. Problème : 23 clients sont raccordés à cette station, par le biais du fournisseur d’accès NordNet. Ce dernier, revendeur du service WiMAX de Bolloré, a du mal à avaler la pilule : « Nous avions des centaines d’équipements de réception WiMAX prévus pour la communauté de l’Artois en stock (1). Nous prenons aussi à notre charge le basculement des clients concernés vers du satellite, en leur offrant l’équipement (399 €), l’installation (200 €), les frais d’accès… », expose Christophe Outier, directeur commercial de NordNet.
Pourquoi une telle décision de la part de Bolloré Telecom, qui a hérité de cette station fin 2008, en reprenant la licence WiMAX de HDRR dans le Pas-de-Calais ? « Elle n’était absolument pas rentable, nous a indiqué l’opérateur. La station est très chère à maintenir alors qu’il n’y a quasiment pas de clients. » Selon NordNet, la zone est effectivement peu propice aux connexions par WiMAX, du fait de nombreux obstacles naturels. Bolloré en était toutefois conscient au moment du rachat de la licence. Mais il n’aurait pas eu le choix : « Elle faisait partie du lot de licences régionales que nous avons repris à HDRR [huit, NDLR] ».
Le WiMAX mobile en vue
Car contrairement aux apparences, Bolloré Telecom a des ambitions nationales en matière de WiMAX. Mais pas dans le but de réduire la fracture numérique : l’opérateur vise les zones denses où il souhaite lancer un jour la version « nomade » du WiMAX (connexion via un terminal mobile) voire du LTE (Long Term Evolution), une autre technologie mobile. Le hic, c’est qu’il n’existe toujours pas de matériel compatible. « Nous n’attendons plus que ça pour démarrer, assure Bolloré Telecom. Avec du WiMAX nomade, chaque station peut fournir 45 Mbit/s [à partager entre abonnés connectés, NDLR] ».
Pour Bolloré Telecom, le WiMAX mobile est le meilleur moyen de rentabiliser ses investissements contrairement au WiMAX classique (à usage fixe). « Le WiMAX est une technologie très coûteuse, si on veut qu’elle fonctionne bien », confirme Christophe Outier de NordNet. Elle nécessite de nombreuses stations pour offrir une bonne couverture et les équipements sont rares sur le marché, donc chers. Elle impose de nombreuses contraintes dont certains clients ont fait les frais au départ.
Le FAI Numéo, également revendeur d’accès en WiMAX, reconnaît que cette technologie a été source de nombreux problèmes chez certains de ses clients. Au point que le FAI a songé arrêter cette activité : « C’est beaucoup plus simple avec le satellite ! », confie-t-il.
NordNet recommande aussi la solution satellite, en complément de l’ADSL. Mais il ne compte pas faire une croix sur le WiMAX. La mésaventure des abonnés de l’Artois est pour l’instant isolée, mais Bolloré Telecom dit étudier la rentabilité de ses autres sites. Aucune autre fermeture n’est envisagée, pour le moment.
(1) et non «subventionnés par la communauté de l’Artois» comme nous l’avions indiqué précédemment par erreur. La communauté de communes de l’Artois subventionne le matériel a posteriori, auprès des abonnés.
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