” En assumant les risques financiers et industriels, nous sommes en droit de configurer les terminaux “
Julien Billot, directeur du développement à la direction marketing de France Télécom Mobiles01 Réseaux: Quel modèle économique permettra de rentabiliser les services WAP ? Julien Billot : De nombreux sites Web seront étendus à la mobilité. Par exemple, un service d’enchères permettra de consulter des photos sur le Web, puis de suivre les enchères sur le téléphone. WAP, Web et SMS (Short message services) constitueront ainsi une chaîne générant de l’audience, donc des revenus issus du référencement, du commerce électronique et de la publicité. Cette dernière ne devrait pas arriver sur le terminal mobile lui-même avant l’avènement du GPRS (General packet radio service). Mais, certains services seront fournis gratuitement par des sociétés, dont Itinéris fait partie, soucieuses de fidéliser leurs clients sur des marchés en phase d’acquisition. En somme, le modèle économique restera celui de l’Internet fixe, dont le WAP ne peut être dissocié. Nous ne créerons donc pas de kiosque avec surtaxe à la durée, qui alourdirait la facture et manquerait de transparence. Mais, nous réfléchissons à la gestion d’un paiement à l’acte, pour des contenus à forte valeur ajoutée.01 R. : Quels seront ces services à forte valeur ajoutée et, plus généralement, ceux qui feront décoller l’Internet mobile ? J. B. : Ce seront des applications très quotidiennes telles que les services de contenu, comme la Bourse ou la météo, gratuits ou payants, selon leur valeur ajoutée. Par exemple, la météo classique sera en libre accès, tandis que celle des neiges sera facturée. Les services de communication, comme le courrier électronique ou la consultation de répertoires, seront aussi très prisés. Les services géographiques rencontreront le succès dans un deuxième temps, notamment lorsque la localisation sera opérationnelle. Les problèmes légaux qu’elle suscite devraient être réglés en laissant l’initiative à l’utilisateur, et en ne conservant pas l’information sur la position de ce dernier. 01 R. : Concernant le verrouillage des téléphones WAP livrés en coffret, que répondez-vous aux accusations de concurrence déloyale ? J. B. : Ce débat est surréaliste. Nous avons dimensionné notre réseau, investi dans une passerelle WAP, à hauteur de 50 à 100 F par client, et commandé cinq millions de terminaux WAP, que nous subventionnons. En assumant tous les risques financiers et industriels, nous sommes en droit de configurer ces terminaux, afin qu’ils passent par notre passerelle et notre portail. Les fournisseurs d’accès à Internet, qui offrent le PC, sont dans la même logique. L’utilisateur peut toujours accéder à n’importe quel site WAP via notre moteur de recherche, qui est le plus exhaustif possible grâce à un guide, ou en entrant et en mémorisant des adresses URL. Et, rien n’interdit à d’autres opérateurs de subventionner des terminaux, dont ils verrouilleront la connexion vers leur passerelle.01 R. : Le standard WAP représente- t-il la réponse ultime ou seulement une solution de transition, en attendant que les débits permettent un retour aux standards d’Internet ? J. B. : Toute technologie peut être qualifiée de transitoire, mais la durée de vie du WAP se compte en années. Inférieur à 1 000 F, le coût des terminaux est, en effet, déjà compatible avec une diffusion grand public. Le GPRS permettra un retour à HTML, mais seulement avec des téléphones ou des assistants numériques de haut de gamme, que tous nos portails Internet supporteront.
” En forçant l’accès à son portail, France Télécom viole les règles de la concurrence “
Sébastien Crozier, président du directoire d’Internet Télécom et de l’Association française de l’Internet mobile (Afim)01 Réseaux: Quel modèle économique permettra de rentabiliser les services WAP ? Sébastien Crozier : Il y a sans doute une place pour le modèle en vigueur sur Internet. Mais, la publicité n’est pas une réponse universelle, surtout sur un terminal dont l’ergonomie reste limitée. D’autant que le coût des connexions et la faiblesse des débits rendent longue et coûteuse la consultation d’une telle publicité. De même que les clients de Canal+ sont prêts à s’abonner pour éviter de voir des spots, nous pensons que certains utilisateurs accepteront de payer des services à forte valeur ajoutée. C’est pourquoi nous avons créé un kiosque, dont les multiples paliers vont d’une surtaxe élevée à la totale gratuité, celle-ci étant, toutefois, limitée, vu la tarification élevée des numéros Vert imposée par les opérateurs GSM.01 R. : Quels seront ces services à forte valeur ajoutée et, plus généralement, ceux qui feront décoller l’Internet mobile ? S. C. : On ne prévoit jamais les futures applications d’une nouvelle technologie. Mais, il est probable que les services d’accès en temps réel à des informations spécifiques motiveront vite les utilisateurs nomades. Il en ira de même pour les services géographiques, à condition que les problèmes réglementaires liés à la localisation des utilisateurs soient levés. On sous-estime le potentiel des Intranet d’entreprise, dont le développement risque, cependant, d’être limité par la stratégie de France Télécom, qui verrouillera les téléphones WAP qu’il vendra en coffret.01 R. : Cette attitude relève-t-elle de la concurrence déloyale ? S. C. : Elle est d’abord pénalisante pour l’utilisateur, car le blocage du numéro d’appel entraîne celui du tarif. Elle l’est aussi pour les autres fournisseurs d’accès WAP, qui ne pourront proposer un tarif inférieur. De plus, 60 à 70 % des mobiles étant vendus en coffret, le portail de France Télécom captera la majeure partie des connexions. Les URL ne seront pas filtrées, mais il est difficile et coûteux en temps de connexion d’entrer une nouvelle adresse via le clavier d’un téléphone. Ce combat d’arrière-garde est une erreur stratégique car un processus de libéralisation profite toujours à l’opérateur historique. C’est aussi une violation des règles, dans la mesure où il y a discrimination du numéro appelé _ celui de la passerelle. L’argument selon lequel France Télécom a tous les droits puisqu’il subventionne le terminal est fallacieux. En effet, selon les règles européennes, il s’agit en réalité d’une vente liée, l’utilisateur étant contraint de souscrire un abonnement d’une durée minimale. C’est pourquoi, au nom de l’Afim, nous avons saisi l’ART et la direction générale de la concurrence.01 R. : Le standard WAP représente- t-il la réponse ultime ou seulement une solution de transition, en attendant que les débits permettent un retour aux standards d’Internet ? S. C. : Au niveau technique, on peut effectivement se poser la question. En pratique, tout le monde est parti sur cette norme, et celle-ci évoluera progressivement pour combler ses lacunes, comme l’ont déjà fait naguère les navigateurs Web, initialement très limités. Mais, la mobilité sur Internet passera aussi par les assistants numériques communicants, même s’ils mettront du temps à s’imposer.
🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.