Quand on y réfléchit, qu’achète-t-on quand on achète un iPhone ? Pour certains, une image, un symbole statutaire. Mais cette image est le fruit d’éléments connexes. Il y a d’abord la sérénité de l’expérience utilisateur, faite de souplesse, de fluidité et d’une impression de sécurité. Une sécurité, qui produit de la tranquillité d’esprit, et qui est tant vantée par Apple comme justification du verrou apposé sur l’App Store, notamment.
Vient ensuite l’intégration entre le matériel et le logiciel, avantage majeur et unique sur le marché très concurrentiel des smartphones. L’intégration, c’est aussi l’écosystème d’Apple, évidemment, fait de cloud et de services.
Il faut ensuite compter sur une certaine idée de l’innovation. Pas toujours le top de ce qui se fait, mais toujours suffisamment intelligemment fait pour que le sentiment historique associé à Apple soit là.
Enfin, bien entendu, autre pilier de l’image d’Apple, un art du design, essentiel, qui renvoie au premier point statutaire, mais sert aussi un propos. Généralement, il s’agit d’une vision de ce que le produit doit apporter à l’utilisateur – une vision qu’Apple impose parfois envers et contre tous sans trop de discernement – la connectique sur les MacBook entre 2016 et 2021 en est une belle illustration.
Quoi qu’il en soit, généralement, tous les produits d’Apple reposent sur ces points, en mettant l’accent plus ou moins sur l’un ou sur l’autre. C’est un équilibre qu’il faut trouver, un équilibre mouvant en fonction du genre de produit, un équilibre parfois précaire, car il repose aussi sur un dernier pilier essentiel, le prix.
Le prix est un facteur cardinal, qui a deux aspects. Le premier est très tangible : c’est son impact sur votre budget. Le second est plus difficilement évaluable. Selon que les critères cités plus haut sont équilibrés ou le ne sont pas, le prix sera alors jugé acceptable ou trop élevé. Dans le premier cas, il sublimera les points positifs. Dans le second, il renforcera au contraire les points négatifs, et déséquilibrera l’équation dans une sorte de jeu de patatras.
Pour éclairer davantage nos propos, nous vous proposons cette petite infographie. Elle représente de manière très schématique les notes (subjectives) que nous allouons à chacun des critères évoqués plus haut aux trois générations d’iPhone SE, de 2016, donc, à 2022. Plus la note est proche de son maximum à dix, meilleur est le prix, le design, etc.
Si l’infographie ci-dessus ne s’affiche pas, cliquez ici.
Le design – entre lassitude visuelle et frein à l’innovation
Prenons l’exemple de la note en design pour débuter et expliquer notre point de vue. Nous attribuons au premier iPhone SE (2016), une note de 8/10. À l’époque, le design de l’iPhone 5S, sorti en 2013 et retenu pour le premier SE (4 pouces) faisait encore bonne figure dans une offre composée d’iPhone 6S et 6S Plus, doté de dalle de 4,7 et 5,5 pouces.
En 2020, l’iPhone SE 2 adopte un autre design plus récent, celui de l’iPhone 8, sorti en 2017. Sauf que, entre temps, Apple a introduit avec son iPhone X un nouveau design et une nouvelle technologie, Face ID, qui libère beaucoup de place sur la façade avant, offrant davantage d’espace à l’écran. La note de design baisse donc, car en plus du design visuel, le design fonctionnel commence à vieillir.
On arrive ensuite en 2022, Apple maintient le design de l’iPhone SE 2, qui date officiellement de 2017 et de l’iPhone 8, mais remonte dans les faits à l’iPhone 6, et donc 2014… Huit ans pour un design, c’est long, surtout quand tout le reste du marché, y compris les iPhone, sont passés à autre chose.
Alors que les designs bord à bord se multiplient, une ultime goutte d’eau vient justifier notre 3/10, l’arrivée de l’iPhone mini, plus compact et pourtant doté d’un écran plus grand – et de meilleure qualité.
L’innovation, tout miser sur le puce ?
A chaque génération d’iPhone SE, Apple a intégré ce qu’il proposait alors de mieux en matière de SoC : l’A9, l’A13 Bionic, et enfin l’A15 Bionic. Une très bonne chose qui lui permet à chaque fois d’établir un seuil technique « bas » élevé pour toute sa gamme.
Néanmoins, cette année, l’A15 Bionic semble un peu étouffer dans ce boîtier minuscule, derrière cet écran trop petit.
Le SoC n’arrive pas à doper l’autonomie de l’appareil autant qu’il le fait sur les autres modèles qui l’équipent. La faute à une batterie trop petite, sans doute.
Du côté de la photo, le seul module caméra arrière est bien trop limité pour permettre de proposer une partition photo digne d’un iPhone en 2022. D’autant qu’on touche là à un problème répandu selon nous sur toute la gamme. En photo, Apple, qui a été le roi, ne l’est plus depuis bien longtemps. S’il progresse et continue à offrir une expérience de qualité, il lui faudrait mettre les bouchées doubles et proposer bien davantage (capteurs plus grands, plus grande variété focale, meilleur traitement numérique, etc.).
Pour en revenir à l’innovation, l’iPhone SE de troisième génération joue bien trop la carte de la temporisation et du recyclage technique, excepté sa puce, pour que cette dernière arrive à le sauver.
Le statut, le déclassement permanent
Dire que l’iPhone est un smartphone statutaire, ce n’est pas seulement dire qu’il en jette parce qu’il est plus cher et que cela prouve qu’on est assez riche pour se le payer. Le statut est aussi lié à l’image véhiculée par Apple en général et par l’appareil en particulier.
L’iPhone SE est le smartphone « abordable » d’Apple, ce n’est donc pas lui qu’on sort de sa poche pour flamber. C’est l’iPhone de raison, en quelque sorte. En 2016, il bénéficie de l’attrait de la nouveauté, d’un design encore assez frais, ou en tout cas proche de l’ensemble de la gamme.
En 2020, alors que l’essentiel des iPhone a adopté le design né de l’iPhone X, le statut en prend pour son grade, et finit de s’effondrer en 2022, lorsqu’il est désormais le seul à proposer un écran si petit dans un boîtier petit, mais proportionnellement trop gros.
Sur le marché occidental, il profite à peine de l’image clinquante et qualitative d’Apple. Sur les marchés émergents, on imagine que son prix ne lui facilitera pas la tâche.
L’intégration, et la sécurité, des valeurs sûres
Les deux critères suivants sont l’intégration. On entend par là aussi bien l’intégration dans les services, que l’homogénéité d’usages que le confort offert par l’appareil.
Dans un environnement où iOS joue de plus en plus des gestes tactiles et plus du tout du bouton Home, dans un univers où les contenus HDR prennent de l’importance, où l’expérience OLED transcende les films et l’utilisation au quotidien, où Apple propose des services pour profiter de contenus vidéoludiques ou vidéo de qualité, l’iPhone SE ne peut prétendre à une note parfaite en intégration. Il fait trop peu d’efforts, le confort qu’il assure n’est plus à la hauteur de ce que propose le marché.
Pour la sécurité, il est en revanche logé à la même enseigne que les autres iPhone, et si l’écosystème n’est pas parfait, si des failles zero day sont parfois exploitées, iOS demeure un relatif havre de paix.
Le prix, des seuils symboliques
Terminons par le dernier critère, le prix, point essentiel. Si les iPhone SE ont toujours été des « entrées de gamme » chers, Apple a franchi un cap symbolique en augmentant son prix de 40 euros cette année, et en dépassant les 500 euros. Car, c’est la barre qui délimite souvent le milieu du haut de gamme.
Or, en 2022, un smartphone dit d’entrée de gamme – et son design, son écran, son ergonomie bonne mais datée vont dans ce sens – ne peut pas afficher un tarif qui le confronte désormais à ce que la concurrence a de meilleur ou presque.
Il y a un trop grand écart entre son positionnement tarifaire et la réalité de ce qu’il apporte. Certes, l’iPhone SE est un iPhone agréable, mais plus assez pour prétendre incarner la porte d’entrée de cette gamme plutôt prestigieuse et portée vers une expérience qualitative.
Un iPhone malgré tout ?
Que faire alors si vous voulez un iPhone ?
- Accepter d’être le dindon de la farce avec un iPhone SE dont seule la puce est au niveau. On doit avouer qu’on a de la peine à vous orienter vers cette solution.
- Vous tourner vers d’autres smartphones de la gamme, comme l’iPhone 11 ou 12 mini, qui sont toujours vendus par Apple. Ils sont, bien évidemment, plus chers.
- Ou, enfin, vous tourner vers le marché du reconditionné, qui s’est davantage structuré ces dernières années et offre de belles affaires pour qui sait être aux aguets. On y trouve des iPhone 12 mini guère plus chers que l’iPhone SE et là, toutes les cases ou presque sont cochées.
Vous pourriez même en ajouter une nouvelle que nous avons volontairement omise dans nos critères : la cause écologique. Recycler sera toujours plus vert que d’acheter un nouvel iPhone… surtout quand il déçoit.
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