Ce lancement est pour le moins inattendu, car Viatel n’était, à sa création en 1991, qu’un call-backer, un fournisseur de services de téléphonie longue distance basés sur le rappel (call-back). Ce passé continue de le marquer, car l’opérateur tire encore près de la moitié de ses revenus de la vente de services de téléphonie aux particuliers et aux très petites entreprises (communications longue distance, cartes d’appel, audioconférences, numéros spéciaux…). Cette activité avait même repris de l’ampleur avec l’acquisition en 1999 de Destia, un concurrent qui avait le même profil que lui.En 1996, Viatel fut cependant parmi les premiers aux Etats-Unis à prendre conscience de l’absence criante d’infrastructures hauts débits paneuropéennes. Il élabore alors un plan de déploiement pour un réseau de transit en plusieurs boucles optiques redondantes (les boucles Circé), plan qui lui permet d’entrer au Nasdaq et d’obtenir un financement de plusieurs centaines de millions de dollars.Tout servant à l’écoulement de son propre trafic téléphonique, ce réseau était mis à la disposition d’autres opérateurs. Puis il fallut se rendre à l’évidence que la croissance n’était plus dans la téléphonie, mais bien davantage dans les services Internet et IP. Nouveau retournement : Viatel décide de se repositionner sur les services IP aux grandes entreprises internationales et aux opérateurs. Les boucles Circé sont donc converties à l’Internet Protocol et prennent le nom de Viatel Global Network. Tout en continuant d’être mises à la disposition d’autres opérateurs, elles sont destinées à se compléter à leurs n?”uds d’interconnexion et dans les principaux centres d’affaires de boucles optiques métropolitaines et de centres d’hébergement. A la fin de 2000, le Viatel Global Network s’étendra ainsi en Europe sur 10 400 km, soit 568 800 km de fibres, pour une capacité moyenne de 9,3 Tbit/s. Six boucles urbaines, d’une longueur totale de 1108 km, seront alors opérationnelles (Amsterdam, Berlin, Francfort, Londres, Paris, et Stuttgart).Conformément à sa nouvelle orientation, Viatel rachetait également, début 2000, AT & T UK, qui lui apportait un réseau dorsal national au Royaume-Uni ainsi que quelque trois cents clients grands comptes, dont IBM, Polaroid, Hertz, Oracle, Delta Airlines et The Royal Bank of Scotland. Peu importait d’ailleurs que ce réseau et ces clients fussent en Frame Relay, Viatel tenait avant tout à marquer son orientation grands comptes.La nouvelle étape qu’il propose aujourd’hui est de passer aux services de réseaux privés virtuels 100 % IP, sans le moindre recours aux technologies Frame Relay et ATM et en remplacement des services Frame Relay et ATM conventionnels.Cette offre VPN IP résulte directement de l’accord conclu en mai dernier avec Cisco Systems, et qui prévoyait le déploiement dans le Viatel Global Network de routeurs Cisco 12016 avec les fonctions IOS et MPLS.Après KPNQwest, Viatel est ainsi le premier opérateur paneuropéen à proposer des services de réseaux privés virtuels IP sur un réseau 100 % IP sur SDH. Ces services peuvent être fournis sur des accès permanents de 64 kbit/s jusqu’à 155 Mbit/s, voire davantage, ainsi que sur les accès commutés des télétravailleurs et des petites agences. Par rapport à leur équivalent Frame Relay ou ATM, ils permettent une administration de bout en bout beaucoup plus flexible. Ils offrent une meilleure évolutivité, tout en diminuant les coûts d’exploitation.En IP, en effet, le VPN est réalisé par simple tunneling de routeur à routeur. En Frame Relay, par contre, il repose sur des circuits virtuels permanents, qui sont beaucoup plus complexes et beaucoup plus longs à configurer. En cas d’évolution des besoins, les paramètres des tunnels peuvent aussi être modifiés plus rapidement que ceux des PVC, puisqu’ils sont gérés à travers l’adressage. Ces tunnels, au demeurant, peuvent être parfaitement sécurisés par l’utilisation d’un chiffrement Ipsec ou l’adjonction de pare-feu. A l’intérieur de son VPN, l’entreprise peut aussi créer autant de sous-VPN qu’elle le souhaite.
L’IP, grâce au système de l’étiquetage des paquets, offre également plus de souplesse dans la gestion des classes de services. Il permet de donner la priorité à certains flux critiques, ce que le Frame Relay ne permet pas. L’IP enfin surclasse ses concurrents dans les débits. Les raccordements Frame Relay, on le sait, sont limités à 2 Mbit/s ; les accès ATM, à 155 Mbit/s. Dès à présent, au contraire, une entreprise pourrait demander à Viatel un raccordement de 655 Mbit/s. De plus, les technologies IP autorisent les VPN voix, données, vidéo très hauts débits, qui sont impossibles en Frame Relay et très complexes à réaliser en ATM. Pour la première fois, elles permettent de répondre vraiment aux besoins de chaque site, sans risque de sur- ou de sous-dimensionnement des accès.Dès à présent, Viatel est si sûr de la fiabilité de son réseau IOS, qu’il s’engage à de fortes pénalités en cas de dégradation du service. Il promet de réduire sa facture mensuelle de 40 % si le taux d’indisponibilité a été de 1 % ou plus. Pour ces engagements de niveaux de service (SLA), il se fonde sur l’outil de reporting de performances de Concord Communications.Non content, Viatel fournit également ce qu’il appelle le Committed Access Rate. Celui-ci consiste à installer un raccordement 2 Mbit/s, même si le client n’a demandé qu’un accès 512 kbit/s. Ce raccordement 2 Mbit/s sera facturé au prix du 512 kbit/s, ligne louée courte distance comprise. Mais lorsque le client aura besoin de passer à 2 Mbit/s, cette bande passante pourra lui être fournie immédiatement. Un changement de ligne louée aurait au contraire demandé des délais très pénalisants. “Si nous pouvons faire ce cadeau à nos clients, explique Didier Lamy, directeur général France, c’est parce que le réseau dorsal nous appartient et qu’il nous coûte presque rien.”Dans une étape ultérieure, Viatel prévoit de remplacer le tunneling par la commutation MPLS. Mais cela ne changera rien aux services VPN IP proposés aujourd’hui. Seule l’administration du réseau dorsal s’en trouvera simplifiée.Viatel a réalisé au troisième trimestre 2000, pour un effectif de quelque deux mille personnes, un chiffre d’affaires de 203 millions de dollars, en progression de 151 % par rapport au 3e trimestre 1999, mais en léger retrait par rapport au second trimestre 2000 (203 millions de dollars). Ses pertes nettes se sont établies à 155,9 millions de dollars, contre 48,2 millions un an plus tôt. En France, il dispose, à ce jour, de cinq points de présence, chiffre qui devrait passer à huit à la fin de l’année avec la mise en service de la boucle France Sud ( www.viatel.com).
🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.