Presque 9 h 30, Fort de Rosny-sous-Bois. Ce n’est pas Fort Knox, mais deux contrôles d’identité sont toutefois nécessaires pour entrer dans l’enceinte du STRJD (Service technique de recherches judiciaires et de documentation). Au-delà des remparts, une immense cour et plusieurs bâtiments derrière lesquels se cache le tout petit centre en charge de la lutte contre la délinquance en haute technologie. Une quinzaine de personnes se relaient ici 7 jours sur 7 et quasiment 24 heures sur 24 dans des bureaux spécialement aménagés pour la veille internet. Pédophilie, contrefaçons… ils traquent et centralisent toutes les affaires liées à la cybercriminalité. ” On agit en complément des investigations traditionnelles en suivant les aspects techniques “, explique l’adjudant Patrick Allard, l’un des cybergendarmes.L’histoire du centre a commencé en 1998. Un groupe du STRJD utilise alors le web pour soutenir les enquêteurs sur des affaires en cours. Mais l’augmentation du nombre d’internautes et le développement de la toile ont vite favorisé la multiplication des infractions liées au réseau. L’année 1999 voit donc la naissance du Centre national de lutte contre la délinquance haute technologie. Son activité prend de l’ampleur : une croissance exponentielle et un doublement de l’activité chaque année. Aujourd’hui, le centre établit près de 1 700 rapports par an.
Des effractions facilitées
Dernière activité à la mode : la contrefaçon de films. Elle représente à l’heure actuelle plus de 60 % des dossiers traités. “Les fichiers musicaux ont cédé la place aux films. Les logiciels peer to peer [d’échange de fichiers de poste à poste, ndlr] se sont adaptés à la demande, il y a une évolution vers des fichiers vidéo. Il existe déjà des Napster pour les films”, affirme Patrick Allard. “Pour l’internaute, peu de difficultés, il suffit de trouver le bon forum où s’échangent et se vendent les CD-Rom”, ajoute-t-il. C’est là que l’unité de la gendarmerie intervient, la détection d’un site ou d’une page illégale entraîne un rapport envoyé ensuite au service concerné et la justice traditionnelle reprend l’affaire. “Internet n’a rien inventé. Les infractions existaient déjà, internet les facilite et les diffuse à l’échelle internationale. Ce n’est qu’un moyen supplémentaire”, ajoute le lieutenant-colonel Missiaen, directeur du STRJD.Mais malgré les dossiers qui s’accumulent sur et sous les bureaux, les veilleurs du net restent toutefois sereins. “Il ne faut pas dramatiser, confie Patrick Allard. Petit à petit les responsabilités de chacun sont plus définies et les structures adéquates se mettent en place en France mais aussi en Europe.” L’éternel problème reste celui de la lenteur des procédures notamment liée à l’absence de frontières caractéristique du réseau. “Il nous manque simplement des accords internationaux pour fluidifier et faciliter la lutte”, estime Patrick Allard. Un v?”u pieu ? Peut-être pas.Il semble que la Commission européenne travaille à une charte de diffusion à laquelle ont déjà adhéré la plupart des pays membres. À terme, celle-ci permettrait la mise en place d’un accord commun facilitant ainsi l’échange d’informations et l’uniformisation des textes concernant les infractions. Et l’adjudant de conclure :“Le web a une dimension mondiale, la lutte contre la cybercriminalité doit l’avoir aussi.” En attendant, le centre national continue la traque à son échelle…
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