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Une image générée par une IA a fait « exploser » le Pentagone et paniquer Wall Street

Moins amusants qu’un pape qui défile en doudoune blanche, ou qui court comme un voleur de pommes d’opérette devant les carabiniers, une image censée représenter le Pentagone après une explosion s’est répandue comme une traînée de poudre en ligne, hier, faisant même brièvement paniquer Wall Street.

The perfect storm, dit l’expression, quand les planètes s’alignent et que tout est en place pour que tout parte à vau-l’eau, dans les grandes largeurs. Vous en doutiez ? On y est, jugez plutôt. Hier, lundi matin, une photo d’une large colonne de fumée noire et menaçante à côté d’un bâtiment s’est rapidement répandue sur les réseaux sociaux et plus particulièrement Twitter, avec un texte d’accompagnement, qui changeait de post en post mais indiquait généralement qu’une grosse explosion venait d’avoir lieu près du complexe du Pentagone à Washington D.C.

Or, ces messages posent plusieurs problèmes. Tout d’abord, et avant tout, ils sont faux. Aucune explosion n’a eu lieu, comme le confirmait d’ailleurs les pompiers d’Arlington, en Virginie, où se trouve le Pentagone, au sud de la capitale américaine.

Ensuite, il montre à quel point les réseaux sociaux continuent de facilement et rapidement diffuser des fausses informations. Tout a commencé sur Discord, puis Facebook, semble-t-il, avant d’être repris par un compte Twitter, assez connu puisqu’il affiche plus de 336 000 followers, qui diffuse des informations sur les conflits armés : OSINTDefender. Le détenteur du compte s’est assez rapidement alarmé de la véracité de cette information et a présenté ses excuses pour l’avoir diffusée, mais elle avait déjà été reprise par d’autres comptes Twitter.

Les choses semblent avoir basculé quand le compte Bloomberg Feed, qui n’a rien à voir avec l’agence Bloomberg bien qu’il soit vérifié, a republié l’image avec la légende : « Grosse explosion près du complexe du Pentagone à Washington D.C. ». Ce compte qui agrège des informations économiques a depuis été suspendu par Twitter. Néanmoins, cette affaire montre qu’une fois encore la coche bleue de Twitter, qui a longtemps été la marque des comptes vérifiés, à défaut d’être forcément fiables, peut induire les utilisateurs en erreur. Il suffit désormais de s’acquitter d’un abonnement de huit dollars par mois, après vérification d’un numéro de téléphone, pour afficher cette distinction.

L’effet en est d’autant plus important que cela a apporté du crédit à une fausse information qui a ensuite été largement partagée par des comptes de propagande, russes notamment, comme le faisait remarquer un journaliste indépendant ukrainien.

En définitive, le fait que l’image ait été générée par une intelligence artificielle, comme le prouve quelques aberrations et détails (un lampadaire bizarre, une grille biscornue, etc.), n’est pas le plus préoccupant. Un résultat aussi bon, voire meilleur, aurait pu être obtenu avec Photoshop et un peu de talent. L’IA générative, en l’occurrence, ne fait que faciliter la tâche de ceux qui veulent produire de fausses nouvelles. Tandis que les coupes sombres effectuées par Elon Musk dans les effectifs de Twitter et une succession de décisions pour le moins surprenantes établissent le terrain idéal pour que ce genre de fake news pullulent.

En définitive, cette fausse information a rapidement été démasquée, même si l’expérience prouve qu’elle continuera certainement de faire son chemin dans certains cercles où les faits ne sont plus la vérité. Les services de sécurité d’Arlington, en Virginie, ont très rapidement désamorcé cette infox virale, même si Wall Street a malgré tout eu le temps de paniquer un peu et de voir son cours plonger pendant quelques minutes, hier matin. Preuve que les Internautes ne sont pas encore armés pour se prémunir contre les mensonges qui cherchent à se répandre. Preuve également que l’ombre du 11 septembre plane encore, et que la peur est une arme efficace pour court-circuiter nos cerveaux.

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Source : The Washington Post


Pierre FONTAINE