L’imaginaire d’internet, ce sont les théories sur les conséquences sociales du réseau des réseaux. Comme chaque invention significative, internet provoque les commentaires des sociologues, futurologues, et autres philosophes, allant de l’anticipation de notre futur jusqu’à la pure et simple science-fiction.Ce sont ces commentaires que Patrice Flichy étudie dans son livre, en sociologue spécialiste de la communication. Constatant que la toile mondiale suscite de plus en plus de publications, il essaie, avant que cette prolifération n’en rende l’étude impossible, de voir comment elles nous présentent un avenir structuré par la nouvelle économie. Pour lui, internet, moyen de diffusion rapide de l’information, suscite des constructions intellectuelles analogues à celles qui ont accompagné l’émergence des autres médias, comme la radio ou la télévision.Tout le monde parle de rapprochement entre les gens, de renforcement de la démocratie, de l’augmentation des possibilités pédagogiques. Or, ce que montre, selon l’auteur, la brève histoire d’internet, c’est que ces prévisions déjà démenties pour les autres médias vont l’être aussi pour lui.Les internautes utilisent davantage les e-mails qu’ils ne consultent des banques de données : ils sont moins en quête de savants que de correspondants, plus désireux d’échanger avec leurs semblables que de construire une nouvelle démocratie ou d’accroître le niveau général des connaissances. Il faut donc lire Patrice Flichy pour ne pas se tromper sur ce qui se passe. Le web triomphant, c’est également la multiplication des sites pornographiques, l’usage quasi-exclusif de l’anglais, la circulation d’une information appauvrie, loin des lende-mains qui chantent et des cybercités imaginées par les prévisionnistes, qui annoncent plus souvent ce qu’ils espèrent que ce qui va arriver.
*Professeur à l’ESCP-EAP
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