L’explosion d’internet en Corée du Sud, et plus particulièrement du haut débit, est née de la crise asiatique de 1997-1998. Le pays en sort très affaibli financièrement mais aussi moralement : le Fonds monétaire international impose des règles particulièrement strictes qui blessent l’orgueil de l’ensemble de la population. L’État cherche un moyen de redonner confiance à ses concitoyens et déniche un conte de fées : les nouvelles technologies et en particulier internet.
Créer des “netoyens”
L’objectif du gouvernement est simple : développer l’utilisation d’internet et transformer ainsi ses citoyens en “netoyens “. Pour y parvenir, les autorités développent d’abord les infrastructures nécessaires : les réseaux de communication. Cette opération est prévue en deux temps : l’installation de câbles à fibres optiques de haute capacité dans treize localités majeures avant 1999 ; le développement de capacités de transmission similaires pour l’interconnexion de 144 localités et la digitalisation de huit millions de circuits semi-électriques d’ici à 2002. Une fois ces réseaux installés, une grande majorité des Sud-Coréens devraient pouvoir se connecter à un débit de 1,5 à 2 mégabits par seconde. Et, en guise de financement, 10 400 milliards de wons (8,8 millions d’euros) sont alloués au Ministère de l’information et de la communication.Le gouvernement entend également fournir à la population les outils nécessaires au surf sur le net. Dès avril 1998, il lance donc un appel d’offres pour ramener le prix des micro-ordinateurs à moins de 762 euros (5 000 francs). Mais, en raison de l’évolution du marché, leur prix chute finalement de lui-même en dessous de cette limite. Les autorités décident ensuite d’équiper les 10 064 établissements scolaires du pays en micros. Ce projet, qui fait partie d’un ensemble plus vaste nommé Cyber Korea 21, a abouti en avril dernier. Les 1 445 milliards de wons investis ont permis la livraison d’écrans géants à cristaux liquides et de près d’un million de PC dans 222 146 salles de classe. Désormais, une salle ordinateurs est construite dans les écoles de moins de 32 classes, et 2 salles dans celles de taille supérieure. Pour enseigner l’utilisation du net aux 10 millions d’élèves, des cours sont intégrés au cursus scolaire et 10 000 professeurs sont formés. Autre lieu d’apprentissage, le service militaire, où tous les jeunes Sud-Coréens passent trois ans de leur vie. Il faut également que la population puisse avoir accès à internet à un “prix raisonnable “. Après le lancement de Korea Thrunet et Hanaro Telecom sur le marché du haut débit, le gouvernement pousse donc Korea Telecom (KT), l’opérateur public, à s’installer sur ce marché. Son but : faire pression pour que KT établisse un forfait moins onéreux que ceux des deux principaux fournisseurs en place (34 000 et 38 000 wons). Après des débuts assez difficiles, principalement du fait de l’absence d’un projet précis (KT était au départ assez réticent à l’idée d’entrer dans le haut débit) le forfait Megapass à 25 500 wons écrase les offres des concurrents. Initialement, l’État envisageait de toucher 10 millions de personnes d’ici à 2002. Ses espoirs ont été largement dépassés puisqu’en juin de cette année, 22,33 millions d’habitants s’étaient déclarés “internautes réguliers “. Mais, les objectifs concernent également les revenus financiers et la création d’emplois. L’État promet que les revenus générés par l’e-commerce atteindront 3 800 milliards de wons en 2002, contre 55 milliards de wons en 1998. Outre les emplois institutionnels et publics précités, le développement du haut débit devrait permettre la création de 700 000 postes dans le secteur des nouvelles technologies et 300 000 autres dans celui des industries de l’information et de la communication. Des chiffres vagues et difficilement vérifiables qui permettent, entre autres, de justifier les dépenses de ce projet internet. Quoi qu’il en soit, le gouvernement sud-coréen aura réussi son principal objectif : faire de son pays l’un des leaders mondiaux dinternet. Il doit désormais relever un nouveau défi : lui permettre de conserver cette place.
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