Si vous êtes allés au Salon du livre de Paris, qui se termine ce mercredi 31 mars, vous avez certainement remarqué des affiches arborant de farouches slogans contre les livres électroniques, ou e-books : « E-book, une bibliothèque dans la poche et rien dans la tête », « E-book, E-monde, E-gnoble », « Livres virtuels, chômage réel » (voir photos ci-dessous).
Il est vrai que ce 30e Salon du livre est clairement placé sous le signe de la numérisation, entre les débats autour de Google books, la numérisation des fonds de la Bibliothèque nationale, la commercialisation prochaine de l’iPad (fin avril), et les multiples tentatives pour créer un marché numérique à coup de Kindle, Sony Reader ou encore Nook.
Mais cette évolution n’est pas du goût de tout le monde. Le collectif libertaire parisien Livres de Papier se définit explicitement comme une organisation de « lutte contre le livre électronique, l’automatisation en bibliothèque et la numérisation du monde en général », dixit un tract diffusé le 18 mars dernier. C’est cette organisation qui a placardé les affiches de protestation au Salon du livre.
Déshumanisation des bibliothèques
Le 28 mars, Livres de Papier distribuait des tracts devant la bibliothèque municipale Picpus, dans le douzième arrondissement, en réaction à l’installation de bornes automatiques de prêt, qui permettent que les livres soient enregistrés par la biais de puces RFID.
Ces équipements sont censés éviter de faire la queue pour enregistrer son prêt auprès d’un bibliothécaire, mais le groupe Livres de Papier y voit un pas vers la déshumanisation des bibliothèques et la suppression d’emplois.
Plus généralement, à travers la numérisation des livres, le collectif s’oppose à un choix de société, qui serait dominé par des géants du numérique tel Google. « Le livre électronique que les industriels tentent de nous imposer depuis plusieurs années (pour l’instant sans réel succès), dit le tract du 28 mars, vise à transformer le monde de l’écrit en société du zapping numérique généralisé. Il suffit de se rendre au Salon du livre pour y voir ces commerciaux en costard vendre leurs e-books comme s’ils étaient au Salon de l’auto, tout en faisant croire que les profiteurs sont les éditeurs. »
Frédéric Mitterrand veut développer la lecture grâce au numérique
Plus loin, « Le mythe libéral de l’accès au savoir égal pour toutes et tous, sur lequel surfe la déferlante numérique, oblitère le fait que nul ne peut prétendre n’avoir pas accès à suffisamment de livres (il suffit de se rendre dans la moindre bibliothèque pour se convaincre qu’on n’aura jamais le temps d’en lire assez) […] : le réseau nous apprend en fin de compte davantage à glisser à la surface des idées qu’à les comprendre et à savoir s’en imprégner pour penser par soi-même. » C’est quasiment un pamphlet contre Internet.
Et ce ne sont pas les dernières déclarations du ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, qui vont infléchir ce genre de position. Selon l’AFP, le ministre a affirmé vouloir développer la lecture grâce au numérique, en s’adressant notamment à la « génération des écrans », celle pour qui utiliser un écran (d’ordinateur, de mobile ou autre), en matière de travail ou de loisirs, va de soi.
Le ministre allouera 100 millions d’euros par an pour l’informatisation et la connexion à Internet des blibliothèques et médiathèques de communes de plus de 20 000 habitants, et cela d’ici à 2015.
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