TikTok en passe d’être bel et bien interdit ou vendu aux États-Unis : cette hypothèse, formulée depuis plusieurs années, n’a jamais été aussi proche de la réalité. Car après la Chambre des représentants samedi 20 avril, le Sénat américain a voté mardi 23 avril le projet de loi qui contraint la maison mère chinoise de TikTok à céder ses parts dans le réseau social, sous peine d’interdiction. Et Joe Biden, ultime étape dans le processus d’adoption des lois outre Atlantique, signera bien le texte ce mercredi 24 avril, a-t-il déjà indiqué dans un communiqué partagé sur son compte X.
Tonight, a bipartisan majority in the Senate joined the House to answer history’s call at this critical inflection point. Congress has passed my legislation to strengthen our national security and send a message to the world about the power of American leadership: we stand… pic.twitter.com/sO67EAAJ6A
— President Biden (@POTUS) April 24, 2024
La disposition fait partie d’un texte prévoyant un programme d’aide à l’étranger (dont l’Ukraine) de 95 milliards de dollars.
Concrètement, ByteDance aurait neuf mois, pouvant être prolongés de trois mois, pour vendre TikTok à des fonds américains. En cas négatif, le réseau social serait bloqué aux États-Unis. Les législateurs américains avaient déjà tenté d’interdire, par trois fois et sans succès, la plateforme, utilisée par près d’un Américain sur deux. Et cette fois, la mesure semble bel et bien en passe de devenir loi. Depuis 2019, le réseau social chinois est accusé d’être à la solde de Pékin, dans un contexte de guerre technologique entre la Chine et les États-Unis.
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Mais il reste encore différentes étapes avant de voir réellement TikTok changer de main ou disparaître des magasins d’applications des smartphones américains.
La Chine n’approuvera jamais la transaction
D’abord, les modalités pratiques interrogent. Côté calendrier, la cession devrait avoir lieu dans les neuf mois, prolongés de trois mois si besoin, ce qui signifie que l’opération serait finalisée après l’élection présidentielle américaine. Si Donald Trump est élu, soutiendra-t-il cette mesure ? Cela n’est pas si sûr. Côté acheteurs, très peu d’acteurs seraient capables d’avancer la somme de 100 milliards de dollars, ce qu’il faudrait débourser pour racheter TikTok. Les géants du numérique comme Meta ou Google, qui pourraient être en capacité de le faire, seraient bloqués par les lois anti-trust américaines – une législation qui vise à empêcher la concentration dans une seule ou quelques mains des réseaux sociaux et des plateformes en ligne.
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Mais surtout, la transaction en elle-même doit être approuvée par Pékin, explique la BBC. Or, la Chine a déjà fait savoir qu’elle s’y opposerait fermement, ce qui signifie que la cession pourrait prendre des années ponctuées par des procédures et recours déposés par TikTok, bien décidé à se défendre.
Comme nous vous l’expliquions lundi, le réseau social estime qu’il est « regrettable que la Chambre des représentants utilise la couverture d’une importante aide étrangère et humanitaire pour adopter une fois de plus un projet de loi d’interdiction qui bafouerait les droits à la liberté d’expression de 170 millions d’Américains, dévasterait sept millions d’entreprises et fermerait une plateforme qui contribue à hauteur de 24 milliards de dollars à l’économie américaine chaque année ».
La protection de la liberté d’expression pourrait « sauver » TikTok
En interne, Michael Beckerman, le responsable de la politique publique de TikTok outre Atlantique, a écrit aux salariés que le projet de loi était inconstitutionnel. Il a ajouté que TikTok le combattrait devant les tribunaux, selon un mémo consulté par le média américain The Information.
Contacté par 01net.com ce mercredi, ByteDance n’avait pas répondu à nos sollicitations, à l’heure de la publication de cet article. Mais le mastodonte chinois avait déclaré qu’il s’opposerait à toute loi visant à le contraindre de céder le réseau social. Il compte d’ailleurs invoquer la violation du premier amendement de la Constitution, un argument qui lui avait déjà permis d’échapper à une mesure d’interdiction dans l’État du Montana.
Les juristes pointent justement un possible problème de constitutionnalité de la loi, qui pourrait être contraire à la liberté d’expression, protégée par le premier amendement de la Constitution américaine. Selon la newsletter Platformer qui a interrogé différents juristes, ce type d’affaires lié à la liberté d’expression est souvent, outre Atlantique, « imprévisible. Mais il est possible que les appels à la sécurité nationale lancés par le gouvernement de Joe Biden conduisent finalement la Cour suprême à confirmer cette loi ». Ce qui signifie que la bataille juridique, qui aura certainement un volet économique, ne fait que commencer.
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