Sera-t-il encore possible d’utiliser TikTok aux États-Unis en 2023 ? Rien n’est moins sûr au vu du projet de loi qui était débattu mardi 28 février au Congrès, l’Assemblée nationale américaine. Le texte, connu sous le nom de H.R. 1153, permettrait à Joe Biden d’interdire à tous les Américains la plate-forme chinoise, s’il finit par être adopté par les deux chambres législatives. Une telle décision est justifiée, a expliqué Michael McCaul, le président de la commission des Affaires étrangères de la chambre basse car « TikTok est un cheval de Troie moderne du Parti communiste chinois utilisé pour surveiller les Américains et exploiter leurs informations personnelles ».
Depuis des mois, le réseau social préféré des jeunes est dans le viseur des autorités américaines, sur fonds de soupçon d’espionnage de la Chine, une accusation réfutée à maintes reprises par Pékin. Si Donald Trump a menacé de l’interdire pendant son mandat présidentiel, estimant que le réseau social « menaçait la sécurité nationale », c’est Joe Biden qui a enclenché les hostilités, dans un contexte de guerre commerciale sino-américaine. L’actuel président américain a fait voter une loi début janvier 2023 qui demande aux fonctionnaires de la Maison Blanche de désinstaller l’application chouchou des moins de 20 ans de leur téléphone professionnel et personnel. Ces derniers ont jusqu’à la fin du mois de mars 2023 pour se conformer à cette obligation.
Une interdiction et de possibles sanctions en cas d’ingérence
La tension serait montée d’un cran après la destruction d’un ballon chinois qui survolait le territoire américain sans autorisation. Un événement qui pourrait expliquer pourquoi ce projet de loi, arrivé dans l’hémicycle vendredi 24 février, durcit encore plus le ton. Le texte, qui traite de toutes les entreprises, nomme expressément TikTok et sa société mère, ByteDance. On peut y lire que si la plate-forme a volontairement transféré les données des utilisateurs du réseau social à « toute personne étrangère » travaillant pour ou sous l’influence du gouvernement chinois, elle pourrait être interdite. Il est également spécifié que si le réseau social a aidé le gouvernement chinois à se livrer à la surveillance, au piratage, à la censure ou à la collecte de renseignements, ou s’il a facilité l’ingérence dans les élections aux États-Unis ou dans un autre pays démocratique allié, ou encore s’il a aidé le gouvernement chinois à influencer l’élaboration de la politique américaine, il pourrait faire l’objet de sanctions additionnelles.
La réaction de TikTok ne s’est pas fait attendre. Brooke Oberwetter, le porte-parole de TikTok cité par CNN, a regretté que la Chambre basse du Congrès « censure des millions d’Américains, et ce, non pas sur la base de renseignements réels, mais sur une incompréhension fondamentale de la structure de notre entreprise. TikTok Inc. est une société américaine liée par la loi américaine » .
Un texte dangereux pour la liberté d’expression ?
En théorie, le texte modifierait une règle importante en droit américain, connue sous le nom d’amendement Berman, qui interdit, pour garantir la liberté d’expression, de restreindre la libre circulation des « matériels d’information » à destination et en provenance des pays étrangers, y compris ceux qui sont sous sanction américaine – une règle qui protégeait aussi les réseaux sociaux comme TikTok d’une interdiction totale.
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Mais avec ce texte, le bannissement pourrait bel et bien avoir lieu : de quoi inquiéter les défenseurs de la liberté d’expression outre-Atlantique, inquiets de la formulation vague de certaines parties du texte. Car le projet de loi pourrait, en plus d’interdire TikTok, limiter le droit à la liberté d’expression garanti par le premier amendement de la Constitution américaine, rendant inaccessibles certains livres, films et œuvres d’art étrangers. En pratique, le texte devrait être difficilement applicable, s’il parvient à franchir toutes les étapes législatives. Car il faudrait prouver qu’il y a bel et bien eu un transfert de données des utilisateurs américains à un membre du gouvernement chinois, ou que TikTok a effectivement « aidé » le gouvernement chinois à surveiller, censurer ou collecter des informations personnelles.
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Source : CNN