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TikTok a-t-il, sous couvert de modération, censuré une liste de sujets sensibles ?

ByteDance, la maison mère de TikTok, utiliserait pour modérer ses plateformes une liste de mots clefs qui irait bien au-delà de la modération classique des réseaux sociaux. Dans cette liste, on trouverait des mots comme Ouïghours ou YouTube. TikTok nie toute utilisation de cet outil.

TikTok est à nouveau sous le feu des projecteurs aux États-Unis. Il est cette fois accusé d’utiliser une liste problématique d’outils de « modération » qui reviendrait à censurer de nombreux sujets sur la plateforme.  Une enquête de Forbes, parue le lundi 1er mai, montre que ByteDance, la maison mère chinoise de TikTok, aurait mis en place en interne, en 2017, « Sensitive Words ». Cet outil permettrait de surveiller, voire de supprimer toute discussion sur le gouvernement chinois, le commerce entre la Chine et les États-Unis, Donald Trump, le groupe ethnique minoritaire persécuté des Ouïghours ou encore ses concurrents, comme YouTube.

Il est en effet courant – et souhaitable – pour un réseau social, d’utiliser ce type de listes qui permet de modérer et de supprimer les propos haineux, pornographiques, dangereux – comme les messages promouvant l’automutilation ou le suicide. Mais selon nos confrères, la liste en question évoquée dans les documents internes de ByteDance, consultés par Forbes, irait bien au-delà de la simple modération. Bien que plusieurs occurrences mentionnent directement le réseau social ou les États-Unis, TikTok a farouchement nié que cette liste s’applique à sa plateforme.

Une liste mise en place dès 2017

L’existence de cet outil, avec des sujets censurés, n’est pas surprenant pour « Douyin », l’alter-ego de TikTok destiné exclusivement au marché chinois. Sur cette plateforme, les contenus sont particulièrement surveillés et doivent correspondre aux lignes directrices du parti communiste chinois. Mais le même outil est-il aussi utilisé pour TikTok aux États-Unis et dans d’autres pays occidentaux comme la France ? Si la réponse est positive, cela entrerait en contradiction avec tous les efforts du réseau social de ces derniers mois.

Le réseau social est en effet accusé d’être un cheval de Troie du parti communiste chinois. Il tente depuis des mois de montrer patte blanche, sans succès. Alors que son PDG a été auditionné devant le Sénat, Washington a demandé à la maison mère de la plateforme de vendre TikTok à une entreprise américaine, et de couper tout lien avec la Chine – ce qu’elle a refusé de faire. Un projet de loi vise toujours à interdire le réseau social sur tout le territoire. Selon des documents internes de ByteDance auxquels Forbes a eu accès, cet outil de modération problématique aurait été mis en place en 2017 – soit l’année du lancement de TikTok aux États-Unis.

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La séparation des équipes de modération purement symbolique ?

Et l’outil aurait bien été consulté par des employés de TikTok en 2022, rapportent nos confrères – une information réfutée par le réseau social. Une des porte-paroles, citée par nos confrères, a précisé que « les équipes qui gèrent la modération pour les plateformes exclusivement chinoises et les plateformes non chinoises sont différentes et distinctes ; elles sont employées par des entités différentes et disposent d’outils de modération distincts ». Mais selon les témoignages de dizaines de salariés ou d’ex-salariés de TikTok et ByteDance, cette séparation n’est que symbolique. Cet outil pourrait aussi s’appliquer à Lemon8 et CapCut, deux autres applications de ByteDance particulièrement en vogue aux États-Unis.

Outre le problème de liberté d’expression, ces mots clefs permettraient de suivre les personnes qui, aux États-Unis ou ailleurs, s’expriment contre la ligne du parti communiste chinois. Le mois dernier, Pékin a été accusé par le ministère de la Justice américain de cibler des personnes outre Atlantique qui avaient commémoré sur les réseaux sociaux ou en ligne le massacre de Tian’anmen.

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Source : Forbes


Stéphanie Bascou