La plus sportive des voitures électriques, c’est elle. La Porsche Taycan veut non seulement concurrencer Tesla mais aussi prouver qu’une voiture électrique, ce n’est pas uniquement une belle accélération et le silence au volant. Au cours d’un essai qui nous a mené entre les routes du Perche et le circuit des 24 heures du Mans, nous avons pu essayer les trois déclinaisons de la Porsche Taycan : 4S, Turbo et Turbo S.
Le plus grand défi de Porsche ?
Convaincre qu’il est possible de ressentir les sensations et l’émotion d’une 911 à bord d’une voiture électrique, tel est sans doute le plus grand défi que tente de relever Porsche avec son Taycan. En l’absence d’un bruit aussi caractéristique que celui d’un six cylindres biturbo, le fameux « flat 6 », la promesse du véhicule zéro émission de Zuffenhausen n’était pas des plus évidentes. Même si le discours officiel chez Porsche consiste à dire que la principale concurrente du Taycan n’est autre que la 911 -oubliant au passage un acteur aussi « anecdotique » que Tesla-, il n’en demeure pas moins que la référence, sur le marché de l’électrique, n’est autre que la Model S.
Le défi est donc double pour le Taycan: il faut d’une part concevoir une alternative crédible à Tesla, mais surtout, il est indispensable construire une véritable Porsche. Un objectif amorcé, dès le premier coup d’oeil, par l’allure générale de la voiture.
Design : un quasi copier/coller de la Mission E
Le design définitif de la Porsche Taycan avait été révélé en septembre dernier et déjà à l’époque de nombreuses voix avaient salué le choix de coller au maximum au prototype Mission E. La seule différence fondamentale avec l’étude de style concerne les portes antagonistes qui n’ont pas été conservées dans un souci d’optimisation du poids de la voiture. Pour le reste, le Taycan a tout d’une Porsche avec notamment ce profil plongeant qui évoque la 911 ou encore l’arrière et son profil lumineux qui occupe toute la largeur de la voiture. À l’inverse d’une Tesla Model S, les lignes sont beaucoup plus agressives, les hanches très galbées et, finalement, le moindre trait renforce l’aspect dynamique de la voiture. Aucun doute possible, le Taycan est une voiture de sport.
Quant aux différentes déclinaisons, Porsche a fait preuve d’audace en reprenant les appellations si familières de ses thermiques (4S, Turbo et Turbo S), quand bien même une voiture électrique ne peut être équipée de turbo. Mais en dehors de la taille des jantes ou du logo, il reste très difficile de distinguer une Turbo S d’une 4S malgré les 80 000 euros qui les séparent.
Intérieur : le futur avec quelques boutons en trop
À l’intérieur, aucun doute n’est permis, nous sommes bien à bord d’une Porsche… avec une légère dose de futur tout de même. Ce côté avant-gardiste, la marque allemande le symbolise par une surenchère d’écrans. Il y en a quatre au total dans ce Taycan. Le principal, celui de l’instrumentation, offre une diagonale de 16,8 pouces légèrement incurvée sur les bords et dispose de quelques commandes tactiles pour gérer les assistances automatiques notamment. Il donne accès aux principales informations, que ce soit sur la voiture (vitesse, consommation), sur la navigation ou encore sur le mode de conduite.
À sa droite, en haut de la planche de bord, se situe l’écran PCM (Porsche Communication management) de 10,9 pouces qui donne accès à la partie info-divertissement. Juste sous cet affichage, un autre écran tactile prend place. Il s’agit de la console centrale de 8,4 pouces qui permet de régler l’environnement à bord (climatisation, sièges chauffants) mais aussi d’afficher la charge lorsque celle-ci est en cours. Enfin, toujours sur le tableau de bord, mais du côté passager cette fois, un dernier écran de 10,9 pouces permet au passager de choisir la musique ou d’avoir un aperçu de l’itinéraire. Dans la mesure où l’accès à cet écran reste très limité et qu’il n’est pas possible d’y afficher ses contenus (une série Netflix ou Disney+, au hasard), cet écran passager apparaît davantage comme un onéreux gadget (1032 euros en option) que comme un élément indispensable du cockpit.
L’abondance d’écrans n’empêche pas le trop plein de boutons. En effet les innombrables commandes au volant et la complexité apparente de l’ensemble de la planche de bord contrastent avec la simplicité d’un intérieur de Tesla. Sur ce point, Porsche n’a sans doute pas voulu brusquer les habitudes de ses fidèles. C’est un léger regret car le constructeur manque là une occasion de faire, sur l’intérieur de sa voiture, un choix aussi radical que celui de la motorisation.
Autonomie : la chasse gardée de Tesla
Sportive à l’extrême, la Porsche Taycan a bien du mal à aligner les kilomètres avec une seule charge. L’Allemand ne s’en cache pas, l’objectif n’est pas de concurrencer la Model S et ses 650 km, record de la catégorie. Le Taycan est une voiture de sport avant tout et c’est en tant que tel qu’elle privilégie la performance sur tout le reste. De fait, l’autonomie théorique de l’électrique de Zuffenhausen oscille entre 407 et 463 km selon le modèle. Dans les faits, ces estimations paraissent très ambitieuses et, lors de notre road trip de près de 300 km, nous avons davantage tourné autour de 25 kWh/100 que des 20,4 kWh annoncés. Ce chiffre assez élevé est atteint malgré un système de récupération d’énergie très performant. Le Taycan ne dispose pas d’une régénération en levée de pied, celle-ci passe systématiquement par le freinage et peut atteindre 250 kW. Concrètement 80% de chaque freinage se traduit en récupération d’énergie. Malgré cette efficience au freinage, l’autonomie de la Porsche électrique reste modeste.
Certes, nos quelques accélérations bien senties n’ont pas aidé à soigner cette moyenne et nos passages sur autoroute l’ont logiquement dégradée, mais au final, il paraît difficile d’espérer plus de 350 km d’autonomie en dehors du mode « Range » qui vise justement à la prolonger. Celui-ci est plutôt intéressant et plafonne la vitesse maximale de la voiture (habituellement à 260 km/h) de manière à prolonger autant que possible la batterie.
En revanche, si elle ne brille pas sur l’autonomie, la Taycan met tout le monde d’accord sur la recharge. En effet, sur la version 4S dotée d’une batterie de 79,2 kWh, la puissance de charge maximale est limitée à 225 kW. En revanche sur les versions Turbo et Turbo S, là où la batterie passe à 93,4 kWh, ce seuil atteint 270 kW, soit la valeur record toutes voitures électriques confondues. Concrètement, sur une borne Ionity capable de délivrer 350 kW au maximum, il est possible de charger 80% de la batterie en 23 mn à peine. À l’opposé, sur une prise domestique, il vous faudra plus de 40 heures pour faire le plein.
Le Taycan sur route (et circuit), ça donne quoi ?
Difficile de parler d’une Porsche sans prendre le temps d’analyser son comportement sur route et les sensations qu’elle procure. Au cours de cet essai, nous avons pu prendre en main les trois versions de la sportive électrique, la 4S et ses 530 ch en Overboost avec le Launch Control (640 Nm de couple), la Turbo (680 ch et 850 Nm) ou encore la Turbo S (761 ch et 1050 Nm).
Quelle que soit la motorisation, le plaisir de conduite est au rendez-vous. Les accélérations fulgurantes du Taycan vous scotchent sur le siège et pour cause, en Turbo S, en moins de 2,8 secondes pour atteindre les 100 km/h, le pilote prend 1,5 G (ici il n’est plus question de parler de conducteur). Sur les courbes, la voiture reste collée à la route, bien aidée des quatre roues directrices et d’un centre de gravité exceptionnellement bas. Bien sûr le poids de la batterie est un atout sur ce point, mais il pourrait être un obstacle sur les gros coups de frein, avec un transfert de masse important compte tenu des 2,4 tonnes de la bête. Il n’en est rien et notre session sur le circuit du Mans a confirmé le comportement ultra sportif du Taycan.
Quant à la route, plus classique, là aussi la Porsche électrique offre un comportement hors pair qu’il est possible d’ajuster en jouant sur les différents modes de la voiture (Normal, Sport, Sport Plus et Range).
Finalement, il ne reste que la question du bruit. Ce bruit si cher aux passionnés de voiture et qui disparaît ou presque dès lors que le moteur s’électrifie. Sur le Taycan, le constructeur a opté pour une solution plutôt originale qui consiste à amplifier de manière très importante le bruit du moteur électrique. Le résultat est un son digne d’une soucoupe volante qui étonnera davantage qu’il ne convaincra. Mais ce bruit, surtout audible à l’accélération, disparaît quasiment une fois la vitesse de croisière atteinte pour ne plus laisser entendre que celui du frottement des roues sur la route.
Le prix, cette question tellement accessoire
À voiture d’exception, prix exceptionnel. Il ne faut donc pas s’étonner que celui du Taycan s’inscrive en six chiffres. La version de base, à savoir la 4S débute à 108 632 euros (115 208 euros pour la version battery Plus). Le Taycan Turbo fait monter la note à 155 552 euros. Quant au prix de la version ultime, la Turbo S, il démarre à 189 152 euros. Bien évidemment il s’agit de tarifs pour le moins prohibitifs, nettement plus chers que ceux de la Model S (83 990 euros). Mais la voiture électrique de Zuffenhausen ne s’adresse pas forcément aux mêmes clients et il y a fort à parier que ceux qui craqueront pour un Taycan ont déjà quelques Porsche au garage.
Verdict de l’essai :
Aucun doute possible, le Taycan est non seulement une véritable Porsche, avec les performances et la tenue de route qu’on attend de la marque, mais c’est surtout la première voiture électrique véritablement sportive. Pour son premier essai sur le terrain glissant de l’électrique, Porsche réussit la pari de proposer une voiture de 2,4 tonnes qui a un comportement digne d’une 911. Bien évidemment, pour atteindre ce niveau de performance, il a fallu faire quelques concessions et, fort logiquement, c’est l’autonomie qui souffre le plus du comportement ô combien dynamique du Taycan. À ce niveau de développement du véhicule zéro émission, c’est sans doute le prix à payer pour aboutir à la plus sportive des voitures électriques, ou l’équivalent d’une GT en mode électrifié. Tesla aura une occasion de répondre à Porsche avec son Roadster, mais il faudra sans doute attendre quelques années. En attendant, dans le match qui oppose la Californie au Bade-Wurtemberg, l’Allemand semble avoir récupéré sa couronne.
🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.