Les linuxiens et les applemaniaques n’ont pas attendu cette chronique pour brocarder les produits Microsoft. Et sous l’épaisse couche d’opprobre dont ils les ont recouverts, on a désormais du mal à regarder objectivement ce qui constitue pourtant le quotidien de millions de personnes. Peut-être cela vaut-il mieux pour Microsoft : aux reproches habituels, on évite ainsi d’ajouter la laideur.En effet, quoi de plus moche que le compagnon Office, ce trombone aux yeux globuleux et larmoyants, qui essaie de vous persuader que vous êtes en train d’écrire une lettre ? Réponse : les modèles prédéfinis de présentation PowerPoint, parfaitement hideux, à moins de jouer la carte du second degré et du retour à la mode des années 80. Et Microsoft ne s’arrête pas là : depuis le terne environnement Windows, vous aurez la possibilité d’insérer dans un document un abominable clip art, sorte de graffiti électronique, par l’intermédiaire de l’affreux clavier ” naturel “, bombé et scindé en deux. Rien à faire : Microsoft remporte haut la main le titre de champion du monde de la laideur informatique.C’est pourquoi on craignait le pire quand la firme de Bill Gates annonça sa décision de se lancer sur le marché des consoles de jeu vidéo, objets dont le design est crucial. Et le pire ne tarda pas à arriver. D’abord sous la forme d’un logo complètement raté, qui anéantissait les espoirs suscités par le nom de code parfait de l’appareil, la Xbox. Puis avec le personnage emblématique de la console dont Microsoft avait considéré, avec raison, qu’il était nécessaire : dans la grande tradition de sa culture esthétique, l’éditeur a choisi Abe, le héros du jeu Oddworld, aussi sympathique qu’il est repoussant, vraisemblablement le héros le plus laid de l’univers des jeux vidéo !Autant dire qu’on ne savait plus vraiment à quel saint se vouer au moment où Bill Gates allait enfin dévoiler le design de l’appareil. Les spéculations les plus folles avaient cours ; on avait même parlé d’une console blanche en forme de X. Finalement, noire et rectangulaire, la Xbox ressemble plus à un magnétoscope qu’à un gadget futuriste. Ce design sobre et impeccable la rapproche ainsi de sa grande concurrente, la PlayStation 2, de Sony, dont elle se distingue par une touche d’originalité bienvenue et mesurée : un grand X noir, serti d’une bulle vert translucide, barre le capot de la bête. Avec un appareil à la fois simple et sexy, susceptible comme la Gamecube de Nintendo, de générer une véritable attente, Microsoft frappe là où on ne lattendait pas. Réussite isolée, bonnes résolutions de début de millénaire ou subite crise de goût de Bill Gates ? Attendons la prochaine fournée de clip art Microsoft avant de conclure.Prochaine chronique le jeudi 25 janvier
2001
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