Ceux qui s’interrogeaient sur la résistance des SSII à la conjoncture économique sont rassurés. Elles ont bien tenu le choc en 2001. Mieux : la croissance globale du marché des services informatiques y est supérieure à celle de 2000.Le Syntec Informatique, chambre syndicale des sociétés de services, tablait, en effet, dès octobre dernier, sur une croissance de 13,5 % en 2001, contre 10,5 % en 2000. Et c’est l’externalisation sous toutes ses formes qui a permis aux plus grandes SSII de traverser sans trop d’encombres l’année écoulée.Seule exception : Cap Gemini Ernst & Young (CGE&Y), qui affiche une augmentation de ses revenus mondiaux quasi nulle à périmètre comparable. Après l’intégration difficile d’Ernst & Young, le groupe français a subi l’effondrement des services télécoms et la récession du marché anglo-saxon. Son plan de restructuration étendu à 2002 et ses révisions à la baisse dues au manque de visibilité du marché n’ont pas arrangé son aura boursière. Dans l’Hexagone, la progression de ses ventes se situe en dessous de la moyenne du marché, à 6,4 %.
On privilégie la marge plutôt que le volume
Les concurrents de CGE&Y ont vécu un exercice certes moyen, mais conforme à leurs objectifs. C’est le cas de GFI et de Transiciel, qui affichent une croissance organique respective de 11 et 10 %. “Notre priorité a été de maintenir le résultat d’exploitation à 10 %”, rappelle Jacques Tordjman, PDG de GFI. Même orientation chez Transiciel, où “l’on a privilégié la marge plutôt que le volume”, confirme Christian Mons, son vice-président.En définitive, la palme de la bonne santé revient au trio Sopra, Steria et Unilog, qui affichent une croissance interne de plus de 16 %. Néanmoins, les chiffres délivrés à ce jour ne donnent qu’une vision partielle de leur santé financière. Seule l’analyse des résultats définitifs permettra de voir si cette croissance des revenus n’est pas le résultat d’une recherche effrénée du volume des ventes.Les SSII dans leur ensemble doivent néanmoins jeter un regard envieux sur leurs homologues du “conseil en haute technologie”, qui enregistrent des performances record. Ainsi, Alten et Altran, les deux ténors français, affichent des croissances internes respectives de 22 et 33 %. Ils évoluent, il est vrai, dans un contexte différent de celui des SSII.Leur métier ne se limite pas à la construction de systèmes d’information, et leur donneur d’ordres n’est pas la direction informatique du client, mais son département R&D ou des cabinets d’études. “Or, il existe une tendance de fond, qui voit les bureaux d’études envisager l’externalisation d’un tiers de leur R&D”, note Christian Mons, vice-président de Transiciel, qui s’est lancé dans cette activité en 1999 via le rachat de CR2A-DI.C’est aussi un marché très protégé, où les cycles d’investissement sont plus longs que dans l’informatique de gestion et moins soumis aux aléas économiques. Au contraire, “quand l’environnement économique est moins favorable, les laboratoires de R&D ont davantage recours à l’externalisation qu’à l’embauche”, assure Bruno Bénoliel, directeur financier d’Alten.
Chute de la demande en conseil et assistance technique
Sous ses apparences de bon millésime, 2001 reste une année très contrastée : premier semestre euphorique, troisième trimestre morose, et ralentissement important au cours des trois derniers mois. “Il y a effectivement eu un profond tassement, renchérit Pierre Dellis, délégué général du Syntec Informatique. Et si quelques SSII s’en sortent convenablement, d’autres ont des résultats préoccupants.”Et de lister les domaines où la demande est restée vigoureuse : la finance, le secteur public, une partie de l’industrie, le commerce et la grande distribution. A contrario, “l’activité dans les télécoms a été mauvaise, et l’assurance et l’industrie aéronautique ont été particulièrement affectées par les événements du 11 septembre”, confirme Eric Hayat, vice-président de Steria. Seule Unilog semble avoir su traverser la tempête ?” en vertu, selon ses dirigeants, d’une gestion flexible. “Quand les affaires vont bien, on s’octroie un surplus de croissance grâce à la sous-traitance. Si elles s’inversent, les ressources internes sont privilégiées”, note Christian Viguié, directeur de la communication financière d’Unilog.Plus touchée, GFI affiche un petit 4,7 % de croissance au quatrième trimestre. “Beaucoup de clients ont repoussé les projets où il n’y a pas de retour sur investissement rapide, c’est-à-dire à trois ou quatre mois”, déplore Jacques Tordjman, son président. Et il évoque également, à l’unisson des autres SSII, la chute de la demande en prestations de conseil et d’assistance technique, traditionnellement les premières touchées en cas de retournement du marché car plus faciles à interrompre qu’un projet budgété et planifié. “Le conseil technologique est lui aussi en baisse”, déplore Eric Hayat, de Steria.Tout comme le conseil stratégique. “Nous sommes dans une phase où les entreprises préfèrent se poser des questions sur leur stratégie en matière de systèmes d’information en interne plutôt que de recourir à un prestataire”, résume Pierre Dellis. Aussi, les SSII susceptibles de garder le cap sont celles qui privilégient les revenus récurrents. L’infogérance a, en effet, plutôt bien résisté à l’inflexion conjoncturelle.
Les rumeurs de consolidation vont bon train
Les résultats des acteurs de l’infogérance sont donc positifs. C’est le cas d’EDS, Steria, ou CS Communication & Systèmes. Ce dernier, après un passage difficile, s’est redressé en 2001, au point de réussir une croissance de 27 % de son activité en infogérance. Même volonté pour Francis Meston, nouveau PDG d’EDS France, qui vise un chiffre d’affaires de 650 millions d’euros en 2002, hors acquisitions. “Nous voulons accélérer notre croissance, dont une grande partie proviendra de l’infogérance et de nos solutions d’entreprise, e-business, PGI. Et nous renforcerons nos équipes EDS et AT Kearney, notamment avec les cent vingt consultants d’Answare”, affirme-t-il.Le ralentissement actuel devrait-il se poursuivre ? Oui ! Et la plupart des sociétés de services s’y attendent. La décrue devrait perdurer au premier semestre. Ainsi Transiciel prévoit-il seulement 5 % de croissance interne. “Néanmoins, le taux des intercontrats, après avoir augmenté en fin 2001, baisse de nouveau”, perçoit Pierre Deschamps, président du Getsi (Groupement des entreprises de technologies et de services informatiques). Un signe de reprise qui conduit les dirigeants à fonder de nombreux espoirs sur un retour à la normale aux alentours de juin.En parallèle, les rumeurs de consolidation du secteur vont bon train. Surtout après une année 2001 pauvre en événements. Les plus grosses fusions/acquisitions sont attendues pour cette année. Après Steria, qui finalise l’accord de rachat des entités européennes de Bull Integris, GFI a annoncé sa volonté de doubler ses revenus d’ici à deux ans. La valorisation boursière particulièrement faible de certaines SSII favorise d’ailleurs ces rapprochements.
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