Les progiciels de gestion intégrés (PGI) n’ont pas toujours bénéficié de préjugés favorables. Lourds, contraignants, coûteux et difficiles à mettre en ?”uvre, ils paraissaient cumuler tous les défauts. Seuls les grands comptes semblaient avoir les moyens de mener à bien l’installation de tels outils. Et malgré l’exemple de pionniers intrépides, les PME y restaient réfractaires. Ce n’est plus le cas. Sous la pression de leur environnement économique, elles ont compris ?” comme les grandes entreprises ?” le rôle stratégique du système d’information et son intérêt pour accélérer et rationaliser les processus.
Une évolution de la demande qui aiguise les appétits
L’essor des technologies et les contraintes des passages à l’an 2000 et à l’euro ont d’ailleurs été les déclencheurs de l’équipement. Désormais, pour les entreprises de taille moyenne, le PGI n’est plus une utopie. Cette évolution de la demande, qui n’a pas échappé aux grands éditeurs dans ce domaine, a aiguisé leur appétit. “La perception du PGI a changé ces trois dernières années, et l’on nous accueille plus favorablement”, se réjouit Gilles Lambret, directeur général de J.D. Edwards pour l’Europe du Sud.Quelle que soit leur taille, les entreprises sont donc désormais susceptibles de s’équiper d’un PGI. Ainsi, avec dix salariés seulement, PC Pos France, fabricant et distributeur de terminaux de points de vente, n’a pas hésité à investir dans Attain, de Navision. Jusqu’alors utilisatrice du progiciel Saari, de Sage, l’entreprise souhaitait se doter d’un outil capable d’accompagner son développement : “Il nous était impossible de partager les informations entre les différentes applications de gestion, explique Philippe Chevrier, président-directeur général de PC Pos France. Or, il nous fallait pouvoir le faire pour mieux servir nos clients et rationaliser nos processus.”
L’offre pléthorique rend le choix délicat
Bien que les PME reconnaissent de plus en plus l’intérêt des PGI, elles n’en demeurent pas moins confrontées à des contraintes spécifiques à leur taille. Elles disposent de peu de ressources informatiques et leur budget ainsi que leurs compétences sont limités. “Il était essentiel que l’outil soit simple d’utilisation, rapide à mettre en ?”uvre et que son déploiement ne dérange pas notre activité quotidienne”, ajoute Philippe Chevrier. Cependant, pour les PME, le choix d’un outil se révèle particulièrement délicat. En effet, à ces contraintes de taille et ces exigences de qualité s’ajoute une offre pléthorique. Avec des dizaines d’outils recensés par le CXP, le marché des progiciels de gestion pour PME s’apparente à une véritable jungle.Sur ce champ de bataille, s’affrontent deux types d’acteurs : les généralistes, qui revendiquent l’étiquette PGI, et les spécialistes. Ces derniers, qui se consacrent plus spécifiquement à un métier, ont encore souvent la faveur des PME. L’enseigne de prêt-à-porter masculin Laurent Cerrer a ainsi privilégié le progiciel Colombus, de VCS Timeless, spécialement conçu pour l’industrie textile. “Nous voulions changer l’application de gestion de notre site central sans que nos points de vente soient perturbés, explique Robert Dray, directeur informatique de Laurent Cerrer. Colombus nous le permettait tout en disposant des fonctionnalités dont nous avions besoin : la gestion commerciale, une gestion automatique des réassorts et la possibilité de sortir les états nécessaires au contrôle de notre activité.”
Handicap des éditeurs verticaux : leurs moyens limités
Connaissant parfaitement le métier ?” et donc le langage et les besoins de leurs clients ?”, les éditeurs verticaux sont d’autant plus à même de répondre à leurs attentes. “Nos clients aiment notre réactivité, notre capacité à comprendre leurs problèmes et à leur apporter un conseil en plus d’un outil informatique”, souligne Armand de Garsignies, PDG de Volume Software, un éditeur dont les produits sont dévolus aux industries du graphisme et de l’emballage.Malgré cette expertise et cette proximité qu’apprécient les clients, ces spécialistes sont de plus en plus concurrencés. Leur principal souci demeure leur taille modeste. Non seulement elle rend leur pérennité incertaine, mais elle limite aussi les moyens qu’ils peuvent consacrer à la recherche et au développement. C’est un véritable handicap en période d’importante mutation technologique. Surtout quand les PME demandent de plus en plus de fonctionnalités. La capacité d’ouverture de ces progiciels est alors essentielle. “C’était un élément clé de notre choix, précise Robert Dray à propos de Colombus. Nous lui avons connecté sans problème la machine de tri qui gère notre entrepôt, et nous pourrons lui greffer des fonctionnalités complémentaires, comme la logistique ou le décisionnel.”L’ouverture des progiciels ne résout cependant pas tout. De plus en plus, les PME s’internationalisent. De plus en plus, elles souhaitent bénéficier de l’avantage que peut conférer l’adoption d’une nouvelle technologie avant la concurrence. C’est la raison pour laquelle elles recherchent des interlocuteurs d’envergure, solides, à jour technologiquement et capables de le rester. Autant d’arguments avancés avec pertinence par les éditeurs généralistes.
Les généralistes tentent de spécialiser leurs produits
Ceux-ci misent également sur leur notoriété et leur force commerciale pour émerger sur ce marché très fragmenté. Mais ils ne s’arrêtent pas là : conscients que les PME exigent une certaine spécialisation, ils s’attachent de plus en plus à décliner leurs produits par secteurs d’activité, en bénéficiant de l’expérience acquise auprès de leur base installée. Par exemple, Mapics, éditeur généraliste du monde industriel, organise régulièrement des réunions avec ses plus grands clients par secteur d’activité afin de mieux appréhender leurs problématiques et les intégrer à ses produits.“Les PME industrielles sont raisonnables : elles ne veulent pas prendre de risque, elles ne veulent pas des produits à la mode. En revanche, elles demandent des interlocuteurs qui comprennent leurs problèmes et des outils capables d’y répondre”, constate Richard Cook, le président-directeur général de Mapics. D’autres éditeurs, comme Navision, s’appuient sur leurs intégrateurs pour adapter leur offre à certains secteurs d’activité. SAP quant à lui procède par acquisition et assimilation de petits spécialistes. Pour sa part, Oracle a choisi de développer un programme de partenariat technologique baptisé Information Architecture : l’éditeur propose un modèle de données standard sur lequel ses partenaires peuvent développer leurs propres solutions. Cette approche permet de conserver l’indépendance et la spécificité des éditeurs métier, mais assure la compatibilité avec l’un des grands produits du marché. Enfin, Cegid et Geac capitalisent sur leur notoriété de généralistes pour proposer un portfolio de progiciels spécialisés dans des secteurs comme l’hôtellerie ou le bâtiment.Toutes ces démarches des éditeurs généralistes visant à donner une teinte métier à leur offre n’effraient pas outre mesure les spécialistes : “Il ne suffit pas d’avancer des références dans un secteur pour s’en prétendre un spécialiste”, prévient Armand de Garsignies, de Volume Software.Tant que le marché ne se sera pas structuré, le clivage demeurera donc, et le choix d’un progiciel de gestion restera délicat pour les PME. Faute d’avoir les moyens de mener une sélection approfondie, PC Pos a limité son étude aux solutions de trois acteurs : Sage, qui l’équipait jusqu’alors ; SAP, qui demeure une référence incontournable ; et Navision, déjà fournisseur de sa maison mère en Grande-Bretagne. Cet exemple illustre bien le pragmatisme dont les PME sont obligées de faire preuve en la matière.
🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.