Attendu depuis des années par les fans de photo en basses lumières et autres vidéastes, il est enfin là. « Il », c’est le troisième modèle de la série « S » des boîtiers Alpha de Sony, l’Alpha A7S Mark III, véritable serpent de mer de l’industrie photo, dont on entend parler depuis plus de trois ans. Une attente qui est un peu la faute de Sony, qui a trop habitué les foules à des lancements agressifs de nouvelles itérations tous les 12-18 mois. Il aura donc fallu cinq années pour que Sony mette à jour son hybride et si en apparence rien ne change, dans les faits tout a changé.
Toujours basé sur un modèle de 12 Mpix, l’A7S Mark III reçoit un capteur de nouvelle génération à conception rétroéclairée (BSI, pour Back Side Illuminated), stabilisé jusqu’à 5,5 vitesses comme l’Alpha A7R Mark IV. Déjà réputé pour le capteur le plus sensible du marché de l’A7S Mark II, Sony veut garder la couronne avec ce Mark III dont la plage dynamique grimpe désormais à 15 eV !
Du côté du processeur aussi, les compétences grimpent avec une puce Bionz XR huit fois plus puissante que le Bionz X de son prédécesseur. Une puissance qui est mise au service d’un domaine : la vidéo.
4K120p et des couleurs jusqu’à 16bit
Alors que Canon l’a joué précurseur technologique avec son futur EOS R5 annoncé en début de mois, premier appareil à filmer en 8K, voici que Sony endosse le rôle de maître du segment. De manière ouverte, Sony entend, en effet, faire de son A7S Mark III le « meilleur appareil 4K » du marché, préférant laisser cette fois aux autres le soin de défricher la 8K.
Constatant que les besoins 8K sont très faibles, mais que l’industrie commence à massivement adopter la 4K pour de nombreuses productions – même pour une exploitation en Full HD – Sony a mis le paquet dans son appareil. Déjà, il bénéficie du savoir-faire de Sony en matière de compression vidéo ainsi que de l’héritage reconnu des A7S et A7S II (voire vidéo). Grâce à la structure BSI du capteur, ce dernier collecte encore plus de lumière et selon le type de scène, la qualité en hautes sensibilités progresserait d’un à deux stops. De quoi encore étendre les capacités des équipes de tournage, notamment dans le domaine animalier. La plus grande vitesse de lecture du capteur permettrait, elle, de réduire à presque rien les déformations causée par le rolling shutter.
C’est aussi du côté du débit de trame que l’A7S Mark III promet de belles choses avec une capture 4K DCI qui pousse jusqu’à 120 images par secondes avec prise du son. Idéal pour créer des ralentis x4 sans aucune lourdeur technique. Cette rapidité de lecture du capteur profite aussi à la Full HD qui passe à 240 i/s au maximum, pour des ralentis x8 encore plus saisissants.
Côté qualité d’image, le boîtier passe, là encore, un palier avec la possibilité d’enregistrer en 4:2:2 10 Bits en interne. Oui, vous avez bien lu : pas besoin d’un enregistreur externe pour produire des séquences suffisamment riches en informations pour profiter d’un étalonnage poussé. Et si vous voulez profiter d’une profondeur de couleur digne des caméras cinéma, sachez que la prise HDMI sort un signal en 16 bits (limité à du 60p).
Les disques durs vont chauffer… mais pas le boîtier car contrairement aux précédents A7S critiqués pour leur surchauffe qui bloquait parfois les enregistrement, les améliorations du processeur et du capteur ainsi qu’un dispositif de dissipation thermique passif amélioré permettent à Sony de proposer un enregistrement vidéo illimité. Avec des débits jusqu’à 600 mbit/s, c’est sûr : les disques durs vont (vraiment) souffrir !
Des menus (enfin) revisités
L’ergonomie logicielle des boîtiers de Sony est décriée depuis de nombreuses années. En cause : des menus labyrinthiques avec une tonne de sous-menus à faire défiler, une lisibilité des options médiocres et certaines de ces options mal placées.
Si on ne peut pas encore jurer du bon placement de toutes les options, l’agencement visuel et le classement des onglets par couleurs est une vraie révolution chez Sony. Assez inspirés de Canon et Panasonic, les nouveaux menus de l’A7S Mark III ont ceci de joli qu’ils pourraient, selon nos sources chez Sony France « être déclinés sur certains boîtiers antérieurs ». Pour avoir manipulé ces menus quelques jours durant, une chose est sûre : c’est bien une avancée majeure qui va faire gagner de précieuses secondes (minutes ?) aux utilisateurs.
CF Express Type A
Avec des besoins énormes en termes de débit vidéo, Sony était confronté au problème des limites des cartes SD actuelles. Même les versions UHS-II ne sont pas à même de tenir les débits nécessaires. Fanatique de la compacité – la miniaturisation à outrance a souvent été un des biais de Sony – le groupe japonais avait du mal à accepter de faire grossir encore son boîtier pour implémenter un emplacement XQD/CF Express B, dont les cartes sont plus solides, plus rapides et plus épaisses.
Finalement, Sony a trouvé une autre voie en utilisant non pas un format propriétaire (RIP la MemoryStick), mais la norme CF Express dans sa version « Type A ». Un format de carte jusqu’à présent uniquement défini par la norme CF Express, dont les capacités quoiqu’inférieures au Type B sont largement au-dessus de ce que propose la SD. Ces nouvelles cartes CF Express Type A dont le format est assez proche de la SD, ont permis aux ingénieurs de Sony de développer des emplacements hybrides, capables d’accepter SD comme CF Express Type A. Les plus riches pourront s’offrir les nouvelles cartes – dès qu’elles seront disponibles en masse ! – et les cameramen débutants se contenteront de SDXC UHS-II. Espérons pour Sony que d’autres acteurs se mettent à adopter la CF Express Type A pour faire baisser les prix…
Viseur 9,44 Mpix
En retrait de la concurrence dans le domaine des viseurs, Sony veut reprendre l’avantage avec cette nouvelle dalle OLED de 9,44 Mpix, soit presque le double d’un viseur comme celui du Panasonic S1R. Une dalle tellement définie que les utilisateurs de lunettes peuvent réduire l’image s’affichant sans perte visible de qualité d’image. Il faudra voir à l’usage comment elle se comporte en termes de réactivité ou lors de la pression du déclencheur à mi-parcours, où Sony a tendance à dégrader la qualité d’image pour améliorer le débit de trame. Mais pour avoir mis l’œil dans le viseur d’un prototype, c’est un pas de géant que Sony a réussi ici.
Écran orientable articulé et batterie Z en soutien
Là encore une horde d’utilisateurs doit crier « enfin ! ». Entre les A7 et les A9, Sony a lancé pas moins de 11 boîtiers toujours avec le même écran qui s’oriente uniquement verticalement. Cette douzième itération est la bonne en matière de vidéo avec un écran qui s’oriente – enfin (bis) – sur le côté. Entre les vloggeurs et la horde de cameramen pros qui pestaient contre cet écran désespérément figé au dos de l’appareil, on entend d’ici les soupirs de soulagement. Ce d’autant plus que les menus sont enfin 100% pilotables de manière tactile. Sony en aura mis du temps !
Autre amélioration à chercher du côté de l’alimentation : le remplacement de la petite batterie NP-FW50 des A7S et A7S II pour la nouvelle batterie NP-FZ100 introduite avec les A7R Mark III et autre Alpha A9. Désormais, tous les derniers boîtiers des quatre séries (A7, A7R, A7S et A9) font appel à cette batterie bien plus performante qui permet à ces A7S Mark III de promettre 2h15 de tournage continu (135 min) et au moins 600 clichés.
Pour les photographes de niche
Avec une telle fiche technique « vidéo », on est en droit de se demander en quoi cet A7S Mark III peut intéresser les photographes. D’une part, il y a toujours le côté basses lumières qu’un tel capteur offre : avec peu de photodiodes (12 millions) sur une telle surface, Sony promet des photos propres même dans les conditions les plus difficiles. De quoi intéresser les reporters qui opèrent entre chien et loup et pour qui la limite de 12 Mpix n’est pas un souci – essayez donc d’envoyer vos clichés 60 Mpix au milieu de la pampa ! D’autre part, les capacités en basses lumières pourraient aussi plaire au marché des astrophotographes, même si de plus en plus de photographes savent tourner les super définitions des capteurs modernes à leur avantage.
Si la rafale bridée à seulement 10 i/s déçoit un peu -sans doute pour ne pas marcher sur les terres de l’Alpha A9- l’appareil reste taillé pour l’action grâce à l’excellent tracking AF de Sony (EyeAF, etc.). Mais les portraitistes pourraient aussi apprécier cette définition moindre de 12 Mpix, car contrairement aux capteurs très denses en pixels, le rendu des arrière-plans flous est plus doux et bien plus flatteur pour les visages. Mis à part ces deux populations un peu spéciales – et sans doute quelques niches que nous oublions – il n’en reste pas moins que l’A7S Mark III cible plus le segment de la vidéo que le monde de la photo classique.
Le Sony Alpha A7S Mark III sera disponible à partir du mois de septembre prochain au prix de 4200 euros.
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