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Sonner la traite

Depuis le temps que les présidents successifs de la RATP regardent passer et repasser ces millions de voyageurs dans le métro, un déclic s’est finalement produit….

Depuis le temps que les présidents successifs de la RATP regardent passer et repasser ces millions de voyageurs dans le métro, un déclic s’est finalement produit. C’est le syndrome de la pompe à essence. Il y a eu un jour chez les distributeurs pétroliers des gens pour se dire qu’il y avait sans doute moyen de tirer davantage de revenus de tous ces consommateurs contraints au ravitaillement en essence. C’est comme ça qu’aujourd’hui, on ne fait plus seulement le plein : on achète le pain, le journal, ou on déjeune. Les stations-services ont commencé à devenir ce qu’elles sont aujourd’hui dans les années soixante. On observe le même phénomène se pointer dans les établissements bancaires. À force de regarder leurs millions de clients, les patrons des grandes banques ont réfléchi. Et certaines se transformeront bientôt en fournisseur d’accès internet ou en gestionnaires de portails d’information.Alors depuis le temps que les présidents successifs de la RATP regardent passer et repasser ces millions de voyageurs dans le métro comme autant de vaches laitières ?” cela dit sans injurier personne ?” l’idée est venue à l’honorable établissement de transport de les traire. Sous réserve d’expertise ultérieure, la RATP gérera sous peu une des plus grosses bases de données de l’Hexagone. Avec un fichier de voyageurs beaucoup plus captifs, on peut facilement le comprendre, qu’une population d’abonnés à une chaîne de télévision par exemple. Une distraction est facultative au contraire d’un moyen de transport.Avec la démonétisation du transport urbain, on parlera de moins en moins de ces “millions de voyageurs anonymes”. Après un bon siècle d’existence et quelques premiers pas déjà effectués dans le listage de ses clients grâce aux forfaits mensuels ou annuels, la RATP a décidé de passer à la vitesse supérieure, autrement dit celle du profilage. Gageons que ce ne sera pas systématique. Dans la téléphonie mobile, ils sont beaucoup à préférer le système des cartes prépayées. Parce qu’il n’y pas le fil à la patte du prélèvement et que leur anonymat est davantage protégé. C’est d’ailleurs ce qui différencie au bout du compte le consommateur moderne d’une vache laitière. Pour le traire, on ne peut pas se passer de son consentement.

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Philippe Bonnet