01net. : Apple vient de valider certaines applications de VoIP comme Fring qui peut désormais fonctionner sur le réseau 3G d’AT&T aux Etats-Unis. Qu’en est-il de Skype ?
Jean-Jacques Sahel (1) : environ 12 millions de possesseurs d’iPhone et d’iPod touch utilisent Skype aujourd’hui en passant par le Wi-Fi. Nous sommes en train d’étudier les termes du nouveau kit de développement iPhone 3.2 qui vient de sortir.
Nous souhaitons prendre notre temps pour offrir aux utilisateurs la meilleure expérience possible. Nous espérons pouvoir proposer Skype sur le réseau 3G américain dans les meilleurs délais.
Quelle est la situation de la VoIP sur les réseaux 3G en Europe ?
Il y a peu de pays européens où la VoIP est autorisée. En France, ce service est contractuellement bloqué par les opérateurs. En Allemagne, T-Mobile surfacture l’abonnement Internet illimité de 10 euros par mois pour la VoIP. Vodafone fait de même en Angleterre.
A ma connaissance, seul O2 en Allemagne a annoncé qu’il laisserait ses clients utiliser la VoIP sans surcoût. Les opérateurs disent vendre de l’Internet alors qu’ils en restreignent l’usage. Les consommateurs devraient pouvoir utiliser Skype comme un service Internet sans avoir à payer en plus pour cela. Car l’argument selon lequel la VoIP sature la bande passante ne tient pas. Un appel voix Skype prend entre 8 et 20 kbit/s soit l’équivalent de ce que consomme une page Web que l’on charge.
« Payer pour un accès à Internet doit donner accès à tout Internet sans restriction »
Dans un billet d’octobre 2009, vous dénonciez le « blocage arbitraire » dont Skype fait l’objet, notamment en France. Où en est la situation aujourd’hui sachant que les trois opérateurs français, suivis par Free Mobile, ont annoncé leur intention d’ouvrir leurs réseaux 3G à la VoIP ?
On dirait que les choses commencent à s’assouplir [lire notre article sur les projets des opérateurs sur la VoIP, NDLR]. Les opérateurs mobiles, pas seulement en France, sont en train de changer. Nous savons qu’effectivement vos opérateurs nationaux vont ouvrir la porte à la VoIP sur leur réseau 3G vers l’été prochain.
Nous avons cru comprendre qu’Orange allait le faire en proposant des tarifs spécifiques [d’autres devraient faire de même, NDLR]. Cela nous inquiète, car nous craignons que ceux-ci ne dissuadent les clients d’utiliser Skype. Nous acceptons tout à fait la concurrence des opérateurs, mais il ne doit pas y avoir de discrimination tarifaire.
Pensez-vous qu’une régulation dans ce domaine passera par une plainte auprès des autorités européennes de la concurrence ?
La Commission européenne a clairement pris position pour un Internet libre et ouvert ainsi que l’accès des consommateurs à des services tels que la VoIP. Un client qui paie pour un accès à Internet doit pouvoir accéder à tout l’Internet sans restriction. C’est le principe de neutralité d’Internet entériné par la réforme des télécommunications de l’UE votée en novembre 2009.
Si les abus devaient se poursuivre, nous espérons donc une réaction rapide des autorités européennes mais aussi des régulateurs nationaux. Nous pourrions saisir les services de la concurrence, mais c’est une voie longue et difficile. Cela demande beaucoup de ressources et Skype est une PME.
Nous préférons privilégier le lobbying auprès des instances et des opérateurs et continuer à alerter les consommateurs sur la situation. Avoir un accès à Internet ouvert est crucial pour toute l’économie, pas seulement pour Skype. Nous allons faire en sorte que la Communauté européenne tienne ses engagements.
(1) Jean-Jacques Sahel est responsable des affaires gouvernementales et réglementaires de Skype pour l’Union européenne, le Moyen-Orient et l’Afrique.
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