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Simon Azoulay (Alten) : ” Dans le développement, la crise économique a eu peu d’impact “

Selon le PDG de la société de conseil en ingénierie, les cycles de R&D sont peu sensibles à la conjoncture. En 2002, il mise sur la croissance externe.


Le Nouvel Hebdo : Vous n’êtes pas une SSII classique. Pouvez-vous nous indiquer exactement le métier d’Alten ?
Simon Azoulay : Nous avons beaucoup discuté et réfléchi. Mais finalement, nous nous sommes arrêtés à la définition suivante : conseil en ingénierie en technologie avancée. Nous ne travaillons pas avec les directions générales, ni avec les directions informatiques. Notre champ d’intervention, ce sont les laboratoires des grandes entreprises.Dans le secteur de la recherche et développement (R & D), comment avez-vous perçu le ralentissement ? Et enregistrez-vous les premiers signes de reprise évoqués par les économistes ? Le cycle des projets en R & D durent entre dix-huit mois et deux ans. Depuis octobre, date à laquelle le ralentissement économique a été manifeste, nous n’avons pas enregistré d’arrêts de projet. Seul signe perceptible aujourd’hui : le temps de la prise de décision s’est allongé. L’entreprise met un mois pour lancer un projet, quand elle mettait une semaine en 2000. En ce qui concerne les signes de reprise, je n’en vois aucun. Je pense que dans le meilleur des cas, il faut attendre le mois de septembre.Vous êtes très présent dans le secteur des télécoms, un secteur qui souffre sans doute plus que d’autres…Le secteur devrait, en effet, connaître une stabilité dans notre chiffre d’affaires cette année. La part d’Alcatel, qui représente un client important pour le groupe, passera de 15 % à environ 10 % de notre chiffre d’affaires. Dans l’ensemble, vous avez annoncé une activité en forte hausse pour 2002…La stagnation de l’activité télécoms est compensée, en effet, par les besoins d’autres secteurs, comme la télévision numérique. Mais pour revenir à ce que vous dites, ma vision est différente : on n’a jamais annoncé pire ! Nous avons expliqué que nous nous attendions à une croissance de 25 %, dont 8 % à 13 % en croissance organique. Or, jusqu’à présent, nous avons toujours réalisé des taux à deux chiffres, proches en moyenne de 40 %. Cela dit, les objectifs de croissance interne que nous nous fixons sont d’ores et déjà réalisés. La croissance externe passe par des acquisitions en France ou à l’étranger ? En France, le taux d’externalisation de la R & D est de 25 %. Il y a environ 70 000 ingénieurs qui travaillent comme consultants. L’habitude a été prise très tôt au sein des grands groupes de filialiser la recherche, permettant plus facilement son externalisation. Ce n’est pas encore le cas en Europe, où ce taux ne dépasse pas 5 %. Cela signifie que nous visons des cibles plutôt en Europe car il n’y a pas de raison que les entreprises étrangères ne suivent pas le modèle français, et n’externalisent pas d’avantage leur R & D. Nous leur apportons de la compétence et de la souplesse. Nous devrions atteindre 6 000 consultants d’ici à deux ans, contre 3 500 aujourd’hui. Ce qui vous donne une idée de nos ambitions. La Bourse ne semble pas reconnaître vos mérites. On a même dit, ici ou là, que les fondateurs d’Alten souhaitaient se désengager…C’est complètement faux. Depuis l’introduction en Bourse, en 1999, les trois fondateurs ont gardé 60 % du capital. Sur cette part, nous avons, pour des raisons pratiques, abandonné l’action de concert, qui n’en touchait en fait que 30 %, l’autre moitié étant dans une structure de holding bloquée. Autrement dit : rien n’a changé. Justement, si votre cours est en retrait par rapport à Altran, votre principal concurrent, n’est-ce pas en raison d’un flottant (part du capital en Bourse) un peu faible ? Vous avez raison. Pour les investisseurs américains, nous sommes a priori trop peu liquide. Il faudrait accroître ce flottant. Nous attendrons que l’action remonte, très au-delà de 20 euros. Pour les fondateurs, accroître aujourd’hui la part du capital en Bourse serait une mauvaise affaire.Les candidats à la Présidentielle parlent beaucoup de l’effort qu’il faut réaliser dans l’innovation technologique. Quel est votre vision sur ce point ? La France est un formidable terreau en matière d’innovation. Nous disposons d’un savoir-faire extraordinaire et les ingénieurs sont extrêmement bien formés. Cela tient à la part qu’avait l’État dans certains secteurs, comme les télécommunications, le transport ou l’énergie. Le problème n’est pas de soutenir l’innovation, mais de soutenir les créateurs.

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Propos recueillis par Jean-Jérôme Bertolus