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SFR renonce à fibrer la France

L’opérateur avait annoncé cet été qu’il couvrirait 100 % des foyers en très haut débit d’ici 2025 avec ses infrastructures propres et sans aide de l’Etat. Une ambition aujourd’hui enterrée.

« Un changement de doctrine ». C’est par cette formule pudique que le Secrétaire Général du groupe SFR* Régis Turrini a abandonné officiellement le grand plan pour fibrer la France ce 12 décembre. Intervenant lors d’un échange entre les collectivités territoriales, les opérateurs et l’Arcep, le responsable nous a confirmé qu’il n’était plus question de couvrir l’intégralité des foyers français en très haut débit d’ici 2025. Soit au moins 30 Mbit/s de débit descendant.

Un sacré revirement après les annonces fracassantes de cet été. Le directeur général de SFR Michel Paulin, ainsi que le directeur général d’Altice Michel Combes, avaient réuni la presse le 19 juillet dernier pour détailler leur très ambitieux projet. Avec une certaine suffisance de la part de Michel Combes vis-à-vis du plan gouvernemental France Très Haut Débit. Il n’avait ainsi pas hésité à déclarer : « il est temps désormais de redonner la main à l’initiative privée ». SFR ayant réalisé la montée en débit de son réseau câble, il s’agissait essentiellement de tirer de nouvelles lignes fibre, quitte à doublonner les infrastructures financées par l’argent public. L’objectif étant à moyen terme de devenir propriétaire de toutes les infrastructures et de ne plus être dépendant d’Orange.

Le secrétaire général de SFR Régis Turrini, à gauche, lors de la conférence annuelle du Graco.
01net.com – Le secrétaire général de SFR Régis Turrini, à gauche, lors de la conférence annuelle du Graco.

Un projet très mal accueilli

Sauf que depuis, le groupe Altice est entré dans la tourmente boursière, sanctionné pour les mauvais résultats de SFR qui continue de perdre des abonnés. Michel Paulin et Michel Combes sont partis. Et SFR a été très décrié par les élus et les acteurs des RIP (réseaux d’initiative publique) en raison de son initiative menée à la hussarde mettant en danger l’écosystème Plan France très Haut Débit patiemment édifié depuis plusieurs années. Au point que le projet de loi du sénateur Patrick Chaize pour sécuriser les investissements dans les réseaux a fini par se voir rebaptiser « loi anti-SFR » dans les couloirs du Parlement. Les membres du gouvernement, eux-mêmes, ne se sont pas privés d’égratigner la position de l’opérateur. « Il n’y a pas de chèque dans l’enveloppe », avait déclaré le secrétaire d’Etat au Numérique Mounir Mahjoubi aux Echos au mois de septembre dernier.

Régis Turrini avance plusieurs raisons à cet échec. Outre la déroute boursière, SFR aurait beaucoup souffert de cette levée de bouclier. « Peut-être que notre projet a été présenté de façon maladroite », a-t-il fait observer ce 12 décembre. « Il a été mal perçu et nous n’avons pas su créer une ébullition pour susciter l’adhésion du plus grand nombre ». Il pointe, en outre, la difficulté de recruter suffisamment de main d’œuvre et de la former. « Il faut six mois pour former un soudeur de fibre », a détaillé Régis Turrini. Des contraintes qui ne semblaient pas effleurer SFR cet été.

L’opérateur promet toutefois de respecter ses engagements dans les zones AMII (zone moins dense d’investissements privés) et de rester un partenaire de premier plan dans les RIP en continuant à répondre à des appels d’offres. « Notre priorité désormais, c’est d’améliorer nos offres et nos relations avec les collectivités locales », a encore déclaré Régis Turrini. Mais SFR ne rêve plus de couvrir tout le pays avec ses infrastructures propres.

(*) 01net.com est édité par une filiale de NextRadioTV, elle-même propriété à 49% de SFR Media.

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Amélie CHARNAY