Passer au contenu

SexyAvenue: L’Amazon du plaisir

Comme Amazon, SexyAvenue est un site très bien conçu, servi par une logistique infaillible. Après un an et demi d’existence, il est un des leaders français sur son marché. La différence ? Il ne vend pas des livres et des CD, mais des godes et des gels. Et il gagne de l’argent depuis novembre 2000 !

Montigny-le-Bretonneux, en grande banlieue parisienne. Les locaux sont blafards et les occupations des salariés plutôt banales. Une dizaine de garçons et de filles font de la compta, du graphisme, du développement informatique ou de la logisitique. Aucune ” hardeuse ” à l’horizon, pas de studio de prises de vues ni de poster grivois aux murs… Les vidéos live et les images coquines sont toutes sous-traitées à des prestataires étrangers, tels que l’américain CyberSynergism. Seuls trois tubes de gel qui trônent à côté du bureau du fondateur, Patrice Macar, 30 ans, rappellent qu’ici on ne vend pas de la confiture ou des livres.“Ne dites pas à ma mère que je vends du sexe sur le Net, elle me croit commercial grands comptes chez Sony !” Diplômé d’une école de commerce, Patrice Macar a lâché, il y a trois ans, un début de carrière classique pour s’aventurer sur le sentier siliconé d’une start-up de charme. “J’ai senti que le business explosait aux États-Unis et que les marges étaient énormes, explique-t-il pour justifier sa vocation. En France, il y avait un marché pour un site pro, grand public et soft.”

” La BNP a refusé de nous fournir sa solution de paiement en ligne “

Patrice Macar a donc choisi de viser l’adulte ” normal “, le monsieur (et la madame) Tout-le-Monde, certes rétif aux sex-shops et aux catalogues porno, mais qui va volontiers se rincer l’?”il sur le web. Pour monter son projet, il a investi 400 000 francs avec un ami ?” qui tient à rester anonyme ?” et a levé 1,5 million de francs auprès de Creanet, une entreprise cotée au nouveau marché, du business angel suisse Arnold Raicher et de deux investisseurs privés, eux aussi plus prompts à investir dans le sex- business qu’à se faire connaître.Le site a ouvert en février 2000. Un an et demi plus tard, sexyavenue.com s’impose comme l’un des sites érotiques les plus prometteurs de l’Hexagone. La recette du succès ? D’abord, avoir parié sur le soft. La page d’accueil est évocatrice mais pas trop décolletée… Le site offre des rubriques gratuites d’information (SexyDoctor) et de rencontres (SexyClub) destinées à inciter l’internaute à réjoindre le c?”ur du business : la partie payante du site. Au programme : vidéos live, galerie de photos et boutique d’achat en ligne. En rayon, des huiles de massage californiennes côtoient la traditionnelle panoplie de jouets érotiques. “Au début, les produits étaient stockés dans le garage de la maison que je louais à Bois-d’Arcy, dans les Yvelines, se souvient Patrice Macar. Elle servait de bureau dans la journée et j’y habitais la nuit. J’ai vite saturé, et nous avons opté pour des locaux plus classiques.”Car les débuts de Patrice au pays du sexe en ligne n’ont pas toujours été roses… ni de tout repos. “Comme beaucoup, je pensais que j’allais rencontrer des gens louches. Ils ne le sont pas. En revanche, c’est un milieu plutôt opportuniste, et pas très professionnel.” Négociations bancales et retards de livraison lui ont servi de bizutage. Plus gênant, les fournisseurs traditionnels, eux, n’aiment pas trop le porno. “On s’est fait jeter de partout, explique Patrice Macar. La BNP a refusé de nous fournir sa solution de paiement en ligne : elle ne voulait pas associer son logo à un site adulte. Et nous avons mis six mois pour trouver une régie publicitaire.” Petit à petit, pourtant, SexyAvenue parvient à positionner son image ” clean & soft “. Sa recette ? Une stratégie ambitieuse de partenariat avec de grosses pointures du Net, comme lycos.fr (service Love@lycos) et m6net.fr (rubrique Sexy). En tout, une cinquantaine de sites ” respectables ” dealent avec Patrice Macar le contenu de leur canal adulte. Et lui offrent ainsi de la visibilité et de la légitimité tout en rabattant un flux confortable d’acheteurs vers son SexyStore. En retour, SexyAvenue verse une commission de 20 % sur la VPC générée par leur intermédiaire.

60 % de marge sur les petites culottes et les porte-jarretelles

La cyberboutique s’est rapidement imposée comme la principale source de revenus de SexyAvenue. La contribution du hard en ligne (consultation de photos ou de vidéos) au chiffre d’affaires reste, en effet, assez marginale. Dans le panier de l’internaute, on trouve quelques articles de lingerie érotique, des vidéos et des ” jouets ” relaxants. Le tout est stocké sur quelque 150 mètres carrés de rayonnages en enfilade, dans un bâtiment annexe au siège. On est bien loin de l’immense hangar d’Amazon ! Mais les marges, elles, sont plus confortables que celles du roi du livre en ligne : elles grimpent facilement à 60 %. Conséquence directe, le site est devenu rentable dès novembre 2000, dix mois à peine après sa création.“À terme, nous allons générer 20 % de résultat net”, s’avance Patrice Macar, qui, plongé dans une étagère du stock, en ressort en exhibant le dernier objet branché. C’est le Devil, un godemiché qui ressemble à une figurine Pokémon, tout en longueur, vert et grimaçant. D’ailleurs, selon le boss de SexyAvenue, 35 % des acheteurs seraient des… acheteuses. Les homosexuels sont eux aussi assez nombreux à fréquenter le site. À tel point que le nouvel associé de Patrice Macar s’attelle à développer la version gay de la boutique. ” Finalement, assure-t-il, travailler là-dedans, au bout d’un moment, c’est comme vendre des petits pois. ” Enfin, pas tout à fait, puisqu’il préfère rester anonyme. Perplexe, il ajoute : ” Depuis que j’ai commencé à travailler ici, il y a deux mois, ma libido a quand même un peu baissé. ”

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Pierre Agède