Un constructeur qui enregistre ses premières pertes trimestrielles en douze ans ?”88 millions de dollars entre mars et juin?”, cela n’aurait rien d’anormal s’il ne s’agissait de Sun. Pour le numéro un du monde Unix, farouche ennemi du monde Intel, ce qui pourrait passer pour un incident de parcours lié à la conjoncture témoigne d’un ralentissement qui pourrait perdurer après une croissance moyenne de 20% ces cinq dernières années. Profitant pleinement du boom des dotcoms et des télécoms, l’exercice 2000 avait bondi de 33%. Les serveurs, au c?”ur de l’activité Sun, “se vendaient alors par wagons entiers”. Difficile de faire aussi bien dans le contexte actuel. L’exercice 2001 devra donc se contenter d’un chiffre d’affaires en croissance de “seulement” 16%. En revanche, le bénéfice net plonge: 927 millions de dollars, contre 1850 millions un an plus tôt.
Sun confronté à la mutation du monde Unix
Outre de nouvelles pertes attendues pour le trimestre en cours, deux signes inquiètent les analystes : des stocks en forte hausse et un marché de l’occasion sans cesse alimenté par la déroute des dotcoms. Anticipant les turbulences à venir, Sun a commencé à réduire la voilure: baisse drastique des coûts et premiers licenciements ?” trois cents personnes. “Nous avons pris acte du fléchissement du marché, explique Dario Wiser, directeur marketing produit de la filiale française. Depuis juillet, nous nous recentrons sur des secteurs où nous étions traditionnellement moins présents. Et les dernières annonces de grands serveurs (StarCat) et de systèmes de stockage (accord avec Hitachi) vont dans ce sens.“En plus du contexte économique morose, Sun devra aussi adapter sa stratégie à la mutation que vit le marché des “Unix propriétaires“. Le Meta Group n’est pas le seul à prédire que la demande Unix va se déplacer en faveur de plates-formes Linux à base de processeurs Intel et de son tant attendu Itanium. HP, Compaq et IBM ?” principaux concurrents de Sun dans les serveurs Unix ?” préparent déjà leurs offres Itanium, alors que Sun continue de faire la sourde oreille, tant à Linux qu’à Intel. Le rachat de Cobalt, fournisseur de petites briques d’infrastructure Linux, ne change rien au choix stratégique de Sun. En tournant délibérément le dos au monde Lintel (Linux sur Intel) et Wintel (Windows sur Intel), Sun prend des risques et se retrouve isolé. Pourra-t-il poursuivre seul le développement de sa gamme de microprocesseurs Ultrasparc? Selon Eric Ochs, directeur d’IDC France, “seul IBM a les moyens financiers de poursuivre le développement de ses puces propriétaires”. Compaq, HP et SGI ont déjà annoncé qu’ils ralliaient le camp Itanium pour leurs serveurs Unix. Mais Dario Wiser reste confiant : “Nous continuons à croire que le tandem Ultrasparc-Solaris restera une plate-forme majeure ces prochaines années. Quant à Linux, il n’a pas fait ses preuves sur des applications critiques.” Seul contre tous, Sun devra tout de même réajuster sa stratégie si l’offre Linux-Itanium prend de l’ampleur. A moins que, fort de 6 milliards de dollars de liquidités, il ne rachète un acteur du monde Lintel ! Tout est possible.
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