Nortel a racheté Alteon pour presque 8 milliards de dollars (9,2 milliards d’euros). Qu’est-ce qui justifie un prix aussi élevé, comparé au chiffre d’affaires réel d’Alteon (109 millions de dollars) ?C’est un pari sur l’avenir. Nortel Networks se renforce là où Cisco est encore faible, sur le marché des solutions de bout en bout pour transporter et gérer les contenus par Internet. Pour schématiser cette complémentarité, on peut comparer Nortel à un transporteur aérien. Ses solutions de réseaux optiques à hauts débits sont autant d’avions qui pourront transporter les contenus d’Internet à grande vitesse. Nous, nous sommes le système de distribution, la messagerie express. En comparaison, Cisco, même après le rachat d’ArrowPoint, reste sur son modèle historique de réseau maillé.
On peut le comparer à un réseau de bureaux de poste, chaque contenu passant d’un bureau à l’autre jusqu’à atteindre son destinataire. Cette complémentarité justifie, à elle seule, l’investissement. Au-delà, nous ne pouvions continuer à lutter à armes égales face à ArrowPoint, une fois ce dernier acquis par Cisco. Il ne s’agit d’ailleurs pas de technique, mais de puissance financière et d’outils commerciaux. Mais, nous avons su éviter un écueil important à mon sens : la concurrence interne, tant au niveau des gammes de produits que des moyens commerciaux et marketing. Poser le commutateur web en remplaçant des routeurs, un marché que Cisco domine, n’est-ce pas y aller un peu fort ?Non. Pas si l’on anticipe l’évolution déjà engagée d’Internet, et notamment l’apparition de multiples moyens d’accès (téléphone mobile, PC, ordinateurs de poche, etc. ) ou encore le besoin de personnalisation des contenus en fonction du lieu où se trouve l’internaute, de ses centres d’intérêt, etc. La seule combinaison de ces deux lignes directrices aboutit à une problématique explosive. Il faudra être capable de combiner la mise à disposition dynamique de contenus, le besoin de limiter au minimum les coûteuses opérations de réplication, les contraintes du multimédia, les impératifs de sécurité et les limites imposées par les équipements terminaux eux-mêmes.
C’est toute la vision architecturale de la mise à disposition de contenus qui est à revoir : qu’il s’agisse d’un routeur ou d’un commutateur web, un seul équipement ne pourra pas prendre en charge toutes les fonctions avancées qui sont nécessaires. C’est là que nous avons un nouveau rôle à jouer, qui va au-delà de notre activité d’origine de fabricant de commutateurs web.Cela signifie-t-il l’apparition de nouvelles catégories d’équipements ?Peut-être faut-il commencer à tirer les leçons du passé et observer l’évolution des routeurs. En quelques années, nous sommes passés du PC adapté au routage à des équipements spécialisés. Je suis convaincue qu’il va se passer rapidement la même chose pour la commutation web. Les fabricants qui s’orientent vers une architecture centralisée, héritière de la philosophie du PC, font, à mon avis, fausse route.
En second lieu, la tendance est d’aller du général vers le particulier, l’équipement spécialisé. Les fonctions nécessaires à la distribution du contenu d’Internet vont se décliner en autant de matériels spécifiques. Cela est vrai aussi bien pour les serveurs de cache, qui se limiteront à servir un seul format de contenu, que pour les autres fonctions que l’on peut associer à un commutateur web. La conséquence directe de tout cela est un changement radical de l’architecture de distribution. Au lieu d’enchaîner des équipements qui géreront l’intégralité du trafic, mieux vaut laisser au commutateur web le soin de distribuer les tâches, comme le fait le processeur central d’un PC avec ses coprocesseurs mathématiques ou graphiques.
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