01net. : A quand remonte l’activité musique chez Yahoo ?
Robert Roback : David [Goldberg, vice-président musique de Yahoo!, NDLR] et moi avions créé une société appelée Launch Media en 1994. Yahoo! l’a rachetée à l’été 2001 et nous nous sommes
mis à développer des produits et services pour la musique en ligne aux Etats-Unis. Depuis deux ans, nous déclinons cette plate-forme de services localement, là où Yahoo! a une présence significative. Aujourd’hui, ce sont cinq pays en Europe
et quelques autres dans le monde.Quelles relations entretenez-vous avec l’industrie de la musique ? Est-ce facile de travailler avec elle ?
Ca devient plus facile avec le temps, mais je ne dirais pas que ça l’est déjà. Les gens sont de plus en plus familiers avec les technologies, plus au fait des modèles économiques. Conclure des accords, essayer de nouvelles choses est
devenu plus facile mais probablement pas autant que cela devrait l’être.Alors où sont les difficultés, quelles sont encore les réticences ?
Il n’y a pas de désaccord fondamental sur l’offre ou la technologie. Là où cela bloque, c’est sur les prix. Sur les paiements et les royalties, les gens qui accordent les licences sur les contenus placent le débat à un
niveau irréaliste. Avec pour effet de tirer le marché tout entier vers le bas.
Et puisque vous parliez de réticences, je pense aux DRM. Les DRM, ce n’est pas la solution. Toute cette activité serait plus solide, le marché serait plus sain si les labels en finissaient avec ces limitations sur ce que les gens
peuvent faire. Mais ils persévèrent et ça va continuer pendant quelques temps encore.
Un autre aspect de ce problème : l’interopérabilité. De notre point de vue, les maisons de disques pourraient très bien demander à une société à qui elles ouvrent leurs catalogues de proposer plusieurs formats de fichiers.
Mais elles ne veulent pas aller voir, par exemple, Apple pour lui dire : ‘ Vous devez le faire ‘.Lors d’une conférence, un intervenant a fait un parallèle entre la diffusion de musique à la radio et sur Internet. Pensez-vous qu’Internet doive tendre vers ce modèle ?
Aux Etats-Unis, chaque année, à peu près 20 milliards de dollars sont passés en publicité pour la musique à la radio. Nous nous disons que nous pouvons essayons de capter ce marché, en nous débrouillant pour faire passer les auditeurs
de radio sur Internet. Pour cela, il faut leur fournir une expérience qui soit gratuite elle aussi. Aujourd’hui, les radios classiques paient un certain pourcentage de leurs revenus aux ayants droit pour utiliser les contenus. Ce que nous voulons,
c’est payer le même prix. Voilà pour le modèle économique.
Le problème, c’est que les ayants droit estiment qu’ils n’en reçoivent pas assez de la part des radios et veulent se rattraper sur Internet. Les Etats-Unis sont le seul pays où les stations de radio ne paient rien du
tout aux maisons de disques pour la musique. Elles paient les éditeurs [qui détiennent les droits de reproduction, NDLR], mais pas les maisons de disques [qui détiennent les droits de distribution, NDLR]. En
revanche, quand vous faites de la radio sur Internet, vous devez les payer ! Donc, Internet est déjà désavantagé.
Si on veut attirer les consommateurs, on doit vendre les mêmes publicités que les radios, mais du coup, on devra les vendre plus chères. Et si on vend plus cher, les annonceurs n’achèteront pas…Est-ce que sur Internet, la distribution standard de musique a un avenir ?
Personnellement, je ne pense pas. Acheter une chanson, un album… Le modèle de l’abonnement a, lui, un grand avenir. Il existe une grande désinformation sur ce marché : tout le monde pense qu’iTunes Music Store
d’Apple est un énorme succès. Mais le vrai succès d’Apple, c’est la vente d’iPod. Si vous regardez le nombre de chansons vendues pour l’iPod, il est en train de chuter.Avez-vous suivi le débat politique, en France, sur le droit d’auteur et la licence globale votée par certains députés ?
Oui et je pense que c’est une mauvaise chose. C’est une vision utopique, irréaliste. Ce sera très difficile à gérer, il faudra amener des sociétés de gestion de droits à le faire, certaines n’en auront pas envie, il
faudra évaluer des taux de rémunération qui soient justes… Ce sera bien trop lourd. Il y a des voies plus simples à suivre. Là, ça va trop loin.
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