Robert Papin, professeur à HEC et auteur de L’Art de diriger
(*), estime qu’à l’ère d’internet, le succès d’un manager repose toujours sur ses qualités de stratège, de meneur d’hommes et de gestionnaire financier.Les nouvelles technologies ont-elles modifié le management des sociétés ?Les NTIC favorisent la mobilisation des employés dans la mesure où elles allègent les tâches quotidiennes, et permettent aux dirigeants de consacrer plus de temps à leurs collaborateurs. Mais si on conçoit l’informatique comme un simple outil de contrôle et de mesure des performances, on peut déboucher sur une démotivation des collaborateurs. Pour les mobiliser, le dirigeant, avant tout meneur d’hommes, doit avoir le courage de leur confier le maximum de responsabilités, tout en les aidant à atteindre leurs objectifs. Ce soutien est déterminant pour la mobilisation des équipes. Si l’outil internet facilite le travail d’un dirigeant, il ne modifie pas fondamentalement le management.Quelles sont les qualités requises pour être un bon dirigeant ?Tout d’abord, il doit être un stratège, capable de détecter les opportunités de développement en s’informant sur son environnement professionnel. Voire au-delà. Les grands patrons sont curieux de tout. L’ancien directeur général de Renault, Pierre Dreyfus, avait, en 1968, envoyé ses collaborateurs dans les manifestations étudiantes pour comprendre ce qui s’y passait. Il avait le sentiment que la société changeait. Aujourd’hui, les grands patrons ne lancent pas de projet d’envergure européenne en restant cloîtrés dans leurs sociétés. Le dirigeant doit être aussi un bon gestionnaire. C’est peut-être dans ce domaine que les NTIC sont irremplaçables, car elles lui permettent de disposer de tableaux de bord quantitatifs et qualitatifs.Mondialisation et concurrence ont-elles un impact sur la façon de conduire l’entreprise ?Dans le contexte actuel d’internationalisation, un certain nombre de dirigeants d’entreprise se montrent très soucieux de ne pas déplaire aux différents actionnaires. Mais en privilégiant la rentabilité à moyen terme, voire à court terme, ils peuvent démotiver leurs collaborateurs, car la tentation est grande de leur imposer des objectifs trop ambitieux, parfois irréalisables. Par ailleurs, face à une concurrence aujourd’hui exacerbée, les chefs d’entreprise sont souvent tentés de faire appel à des consultants externes pour mener tambour battant des réductions de coûts qui font fi de la culture des entreprises ainsi que des motivations des collaborateurs. Le dirigeant court, au final, le risque d’affaiblir son entreprise.Les étudiants sont-ils aujourd’hui plus enclins à créer leurs propres entreprises que leurs prédécesseurs ?Le tableau est malheureusement noir. À l’époque de l’euphorie internet, j’ai dénoncé ces modèles d’affaires dont les prévisions étaient ubuesques. Aujourd’hui, je suis encore plus sévère envers ceux qui considèrent le phénomène de la net économie comme définitivement enterré. C’est maintenant qu’il faudrait créer des entreprises. De nouvelles opportunités, notamment liées à l’arrivée du haut débit, sont toujours à la portée de ceux qui possèdent la curiosité, l’imagination et l’agilité mentale du bon stratège, le charisme et la générosité du meneur d’hommes, mais également le courage d’assimiler quelques connaissances en management. Aujourd’hui, ce n’est pas l’argent qui manque, ce sont les entrepreneurs et les créateurs.
(*)” L’Art de diriger “, Robert Papin, deux tomes, éditions Dunod.
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