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Richard Branson (Virgin Mobile): ” L’important, c’est l’accès au client, pas l’infrastructure “

Personnage atypique des milieux d’affaires britanniques, Richard Branson s’est récemment lancé dans le cellulaire en devenant opérateur mobile virtuel (ou MVNO). Sa filiale Virgin Mobile fait figure de précurseur en ce domaine.

O1 Réseaux : De quelle manière définiriez-vous le concept d’opérateur mobile virtuel (ou MVNO) ?Richard Branson : C’est un concept des plus simples où l’opérateur se consacre exclusivement au développement de ses services sans avoir d’infrastructures à déployer, ce qui lui revient naturellement beaucoup moins cher. Et, c’est tout aussi bénéfique pour le propriétaire du réseau dont le trafic est ainsi stimulé.01 R : N’y-a-t-il pas un risque évident de cannibalisation ?R. B. : Mais pas du tout ! Dès qu’un opérateur traditionnel comprend que, pour amortir son infrastructure, il a tout intérêt à héberger deux marques plutôt qu’une, cette crainte disparaît. C’est même une forme d’assurance, dans la mesure où la multiplication des stratégies commerciales sur un même réseau limite les effets du désabonnement (churn). S’il perd un abonné, autant qu’il le récupère par le biais de son partenaire MVNO plutôt que de le voir partir chez un concurrent. Combiner deux bonnes enseignes génère davantage de revenus que de recourir à une seule. De plus, la multiplication des marques permet d’attirer plusieurs profils de clients. Il n’y a pas d’états d’âme à avoir en hébergeant un concurrent potentiel. Prenez les grandes maisons de disques dont les circuits de distribution commercialisent également les titres produits par leurs concurrents, et inversement. Bob Marley (Island Records), Blondie (Chrysallis) ou Phil Collins (Virgin) n’auraient jamais eu autant de succès si les circuits de distribution d’EMI, de CBS ou de Warner les avaient boycottés !01 R : Comment êtes-vous devenu MVNO ?R. B. : Très simplement. Fin 1998, nous avons approché les quatre opérateurs cellulaires britanniques (Vodafone, BT Cellnet, Orange et One-2-One). Cellnet et Vodafone étaient intéressés mais préféraient se limiter à un simple accord de distribution, tandis qu’Orange réfléchissait à la possibilité de devenir lui-même MVNO. Restait One-2-One, soucieux d’optimiser la charge de son réseau tout en stimulant, indirectement, son nombre d’abonnés. C’est ainsi qu’en août 1999 nous avons créé Virgin Mobile, une coentreprise à 50-50 avec cet opérateur. Aujourd’hui, nous entretenons une relation originale : One-2-One est pour nous un investisseur, un fournisseur et un concurrent ! C’est l’essence même d’un authentique MVNO.01 R : Combien avez-vous investi dans Virgin Mobile ?R. B. : Avec One-2-One, nous avons conjointement investi 100 millions de livres (environ 1 milliard de francs) lors de la création de Virgin Mobile. Nous avons également obtenu, en novembre dernier, un financement complémentaire de 150 millions de livres (environ 1,5 milliard de francs) auprès de JPMorgan et d’une demi-douzaine de banques. Concernant nos objectifs commerciaux, nous visons 1,75 million d’abonnés d’ici à la fin 2001 et 5 % de parts de marché pour la fin 2002.01 R : Quel est votre niveau d’implication pour ce qui est des infrastructures ?R. B. : Les ingénieurs disent toujours qu’il faut un tas d’équipements (BTS, MSC ou HLR) pour faire tourner un réseau cellulaire ! Pour nous, ce qui compte avant tout, c’est de maîtriser l’accès au client, pas de contrôler l’infrastructure. Sur ce dernier point, nous nous reposons sur One-2-One ; les seules exceptions portent sur l’architecture SMS et le système de facturation que nous gérons en direct.01 R : Et en matière de services, qu’est-ce qui vous différencie ?R. B. : La simplicité. Nos clients achètent un téléphone et paient les communications qu’ils passent. On ne trouve ni abonnement ni forfait. Bref, il n’y a pas d'” entourloupe “. Et plus vous téléphonez, moins c’est cher.01 R : Quelles sont les synergies avec les autres enseignes de Virgin ?R. B. : Depuis son portable, un abonné à Virgin Mobile peut indifféremment effectuer des réservations (train ou avion) ou acheter des produits Virgin, souvent moins chers qu’en magasin. Un exemple : si vous achetez un voyage Virgin depuis votre portable Virgin, vous obtenez automatiquement 10 % de remise. Ce qui représente 200 £ (environ 2 000 F) pour une famille de quatre personnes qui partirait en Floride !01 R : Un opérateur cellulaire sans réseau, c’est assez étonnant tout de même…R. B. : Cela ne nous a pas empêchés d’obtenir, l’an dernier, l’oscar du meilleur réseau britannique… alors que nous n’en avons justement pas ! Nous avons ainsi prouvé qu’il était tout à fait possible, à partir d’une marque bien installée, de réussir dans la téléphonie mobile sans déployer de stations de base.

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Henri Bessières