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René Colletti (MC2I)

‘ C’est au bulldozer qu’il faut aller dans les systèmes d’information. ‘

Comptant parmi les créateurs de la méthode Merise, René Colletti a quitté Sema au début de l’année 2003 pour rejoindre la société de conseil MC2I. Son dernier ouvrage, intitulé Bâtisseur de systèmes d’information,
retrace son parcours au sein de la SSII, où il était entré en 1971 pour en devenir directeur général vingt-cinq ans plus tard. Son histoire est aussi celle de ces pionniers de l’informatique, qui ont tout inventé en l’espace de quelques décennies.Le temps pour le logiciel de passer, selon sa propre expression, ‘ de la fabrication des cathédrales à la construction des villes ‘. Ce passage du développement artisanal à
l’industrialisation des services informatiques est à l’origine d’une véritable révolution. René Colletti en présente ici l’une des conséquences, l’inadaptation du management par projet.01 Informatique : Vous comparez les systèmes d’information actuels des entreprises à des villes, en référence à ce que vous appelez les cathédrales informatiques des années 80. Pourquoi cette
opposition ?
René Colletti : Parce qu’une cathédrale est un projet qui a une fin. Et c’était bien, à l’époque, le cas d’un projet informatique auquel on pouvait entièrement dédier une équipe d’informaticiens. Ces derniers
travaillaient généralement ensemble pendant plusieurs années et, dans ce processus long, les jeux de rôle entre informaticiens étaient possibles. On se formait entre nous à chaque nouveau rôle. La courbe d’apprentissage était quasiment permanente,
et l’on passait plus de temps à apprendre qu’à faire.Cela n’est-il plus possible aujourd’hui ?Plusieurs problèmes sont apparus. Dans les entreprises, les systèmes d’information ne sont plus à construire. Ils existent. Mais ils deviennent très vite obsolètes. Il faut donc être en mesure de les transformer en permanence ;
pour cela, il convient d’utiliser des techniques d’urbanisation.En quoi cela oblige-t-il d’abandonner les notions d’équipe et de projet ?Si l’on reprend l’exemple de l’urbanisation, les changements s’avèrent aussi importants pour les systèmes d’information que ce qu’ils ont été pour les villes à l’époque du développement des chemins de fer. Avant leur apparition,
Paris était accessible par la périphérie. Mais lorsque les gares furent construites, la ville fut accessible par le centre.Quels sont ces métiers ?Les plus nombreux se placent en aval des systèmes d’information. Il s’agit des techniciens d’audit, qui expertisent les systèmes d’information ; des consultants, qui déterminent ce qui est bon et ce qui ne l’est plus; des
experts des métiers, qui en fixent les enjeux ; des ‘ traducteurs ‘, qui traduiront ces enjeux en termes informatiques, etc.Le DSI peut-il prendre en charge ce rôle de traducteur ?Je pense que c’est très difficile pour lui car il se situe trop dans la technologie. Pour y parvenir, il faut se mettre dans une logique d’usage. Par ailleurs, l’entreprise n’est plus découpée par fonctions mais par processus. Or,
chacun de ces processus d’entreprise concerne des personnes qui appartiennent à des directions opérationnelles différentes. Il convient donc de les formaliser, de leur donner un rôle et de prévoir un coordinateur.L’alignement de l’informatique sur la stratégie de l’entreprise serait donc, avant tout, l’affaire des directions générales ?Oui, mais elles n’ont pas encore pris conscience que, depuis les cathédrales, le rôle des technologies de l’information a changé. D’outils de productivité interne, la technologie est devenue un moyen de faire du commerce.Cette approche renvoie donc à une vision nouvelle de l’entreprise…Effectivement. Il existe ce que l’on appelle maintenant le ‘ nous ‘, c’est-à-dire tout ce qui cohabite. Et le ‘ vous ‘, à savoir les clients. Jusqu’à présent,
les deux mondes étaient bien étanches. Aujourd’hui, le grand changement réside dans le fait que les technologies de l’information permettent de les interpénétrer.

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Andrée Muller