La photo du site de Greenpeace est accablante : un garçon indien fait la grimace devant la fumée âcre s’échappant de cartes mères en train de se consumer dans une décharge en plein air de New Delhi. Alors que mi-août,
l’ONG dénonçait dans un rapport la pollution engendrée par les ordinateurs usagés et les dangers qu’ils font courir à certaines populations du tiers-monde, la France décidait
d’appliquer la directive européenne sur les DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques).Il était temps, cette directive s’applique depuis le 13 août 2005, alors qu’elle aurait dû être transposée avant le 13 août… 2004, la France échappant de peu à des sanctions de la Commission européenne.
Les DEEE concernent aussi bien les produits blancs (électroménager), bruns (audio, vidéo) que gris (informatique).De fait, un PC contient de nombreux produits toxiques (plomb, mercure…). Concrètement, depuis le 13 août, c’est le producteur qui est responsable de la collecte et du traitement des déchets :
‘ Par producteur, il faut entendre l’entreprise qui met le produit sur le marché. Il peut s’agir de l’importateur ‘, précise Emmanuel Beaurepaire, responsable des affaires publiques
chez Recy’stem-Pro, un éco-organisme qui se charge, moyennant finances, de gérer les DEEE à la place des constructeurs et des utilisateurs professionnels.‘ Le coût du recyclage d’un PC est de 450 à 500 € la tonne, sans compter la logistique ‘, indique Emmanuel Beaurepaire. Pour les produits acquis avant le 13 août,
c’est à l’entreprise de gérer les DEEE : ‘ Elle pourra, par exemple, négocier la reprise par le fabricant de son ancien matériel lors d’un renouvellement, le constructeur se déchargeant en
contrepartie de la fin de vie des nouveaux produits ‘, poursuit ce dernier.Pour les particuliers, ‘ les distributeurs sont obligés de reprendre un ancien matériel lors de l’achat d’un appareil équivalent. Les collectivités doivent mettre en place un tri sélectif et les
constructeurs payer le surcoût engendré par ce tri, en fonction de leur part de marché ‘, explique Sarah Martin, ingénieur de recherche DEEE à l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise
d’énergie).Les fabricants sont tenus d’indiquer dans un registre national géré par l’Ademe les quantités d’équipements mis sur le marché. Pour le consommateur, une contribution visible indiquera quelle somme est destinée au
traitement des DEEE dans le prix total payé, et un logo lui signalera que l’ordinateur doit faire l’objet d’un tri sélectif. En outre, à partir du 1er juillet 2006, suite à la directive RoHS
(Restriction of certain Hazardous Substances), les constructeurs devront réduire, voire éliminer, la présence des substances nocives comme le plomb et le cadmium dans les composants.
Les constructeurs français sont à pied d’?”uvre
Du côté des constructeurs, on s’était préparé à cette directive sur les DEEE, surtout sur le marché des entreprises. ‘ Pour nos clients professionnels, nous disposons déjà d’une filière de recyclage.
Nous suivons tous nos matériels et sommes capables d’aller les reprendre chez le client, même lorsque celui-ci est passé par un distributeur. Quant aux particuliers, nous sommes beaucoup moins concernés depuis la vente de notre division
PC
à Lenovo ‘, confie François Cottin, directeur des affaires environnementales chez IBM.Chez Big Blue, la récupération du matériel historique (acquis avant le 13 août) devra être négociée lors d’un renouvellement de parc. Pour François Cottin, le surcoût engendré par cette directive ne devrait toutefois pas
entraîner une modification des prix pour le client : ‘ On ne peut pas associer le coût du traitement au tarif d’achat ‘, indique-t-il, estimant le coût du recyclage d’un PC à 2 ou
3 ?, dont 75 % pour la logistique (hors écran à tube cathodique).Chez Dell, ‘ le recyclage des appareils acquis avant le 13 août sera facturé au client. Les coûts se situent entre 10 et 15 €, écran CRT compris, par PC, mais peuvent être inférieurs si Dell
effectue le déploiement des nouveaux PC. Bien sûr, avec les entreprises, il existe toujours des négociations de gré à gré ‘, reconnaît Éric Velfre, directeur services de Dell France. ‘ Nous avons
toujours accepté de procéder à l’enlèvement des matériels dans les entreprises. Nous avons également un programme de récupération des cartouches d’imprimantes, qui ne sont d’ailleurs pas concernées par cette
directive ‘, affirme Christophe Stener, secrétaire général de HP France.
Une plate-forme européenne
Pour les DEEE issus des ménages, HP s’est associé à Sony et à Electrolux, entre autres, pour créer une plate-forme européenne de recyclage, ERP (European Recycling Platform) :
‘ Cette solution nous a paru la mieux adaptée dans la mesure où nous avions besoin d’une qualité homogène dans toute l’Europe et que, pour obtenir un juste prix, les volumes doivent être importants. Certains de
nos concurrents pourraient rejoindre l’ERP. L’Europe nous impose seulement de ne pas traiter plus de 30 % des DEEE ‘, explique Christophe Stener.Dell compte créer aussi son éco-organisme en France. Las ! Sans plan d’envergure au niveau mondial, pas sûr que cette directive suffise à éviter que certaines régions du monde ne deviennent nos poubelles high-tech.
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