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Recrutement en Ile-de-France : les SSII exigeantes sur un marché atone

Sur un marché de l’emploi régional atone, les SSII restent les plus grandes pourvoyeuses de postes. Elles privilégient l’expérience et les formations bac + 4/5.

Vitrine de l’emploi informatique avec une concentration de 45 % de la population cadre selon l’Apec, le bassin parisien subit de plein fouet la crise. Les sociétés high-tech de l’Ile-de-France n’ont pas connu le rebond escompté au premier semestre 2002. Les sites d’emploi ont même enregistré un repli de leur volume d’offres au cours du deuxième trimestre.Une tendance similaire a été observée chez les SSII et les éditeurs interrogés par 01 Informatique dans le cadre de cette enquête. En l’espace d’un mois ?” d’avril à mai ?”, un certain nombre ont revu à la baisse leurs prévisions de recrutement pour les six prochains mois. La clôture des résultats du premier trimestre a, semble-t-il, fait l’effet d’une douche froide, et des sociétés cotées comme Cap Gemini, Atos Origin, Transiciel, Steria ou Unilog ont multiplié les avertissements sur résultats (profit warning).

Les projets “lourds” maintenus

Dans ce contexte d’instabilité, certaines sociétés de services résistent mieux. C’est le cas de Sopra Group, dont les revenus récurrents (tierce maintenance applicative, contrats pluriannuels) et la diversification d’activité (éditeur, conseil en organisation) lui confèrent une solide assise. “Nos clients sont des grands comptes aux projets stratégiques, confirme Bruno Carrias, directeur du développement de Sopra Group. Même en période de crise, ces derniers ne peuvent être remis en cause à la différence des projets dits de ” confort “.”Neurones aussi joue la carte du pragmatisme. “Les entreprises ont beaucoup investi ces dernières années et souhaitent aujourd’hui solidifier les mises en production intervenues de 1999 à 2001”, observe Bertrand Ducurtil, son directeur général. Le décisionnel, les serveurs d’applications ou les progiciels de gestion intégrés (PGI), dans leur partie post-installation, rentrent dans cette logique de projets à fort impact et à retour sur investissement aisément mesurable. Ce qui assure de belles opportunités aux experts Websphere, Oracle Application ou SAP. Chez ESR, si le regain d’activité attendu au deuxième trimestre 2002 ne s’est pas manifesté, de nouveaux comptes ont été ouverts en mai et des projets signés. Cela dit, le démarrage de ces projets reste encore à déterminer : juillet ou septembre ? Consultant Apec pour le département des Hauts de Seine, Patrick Girodroux observe que les SSII de taille moyenne comme ESR, Metacom, Asymptote Informatique, Syntegra ou Serlog se préparent mieux à la sortie de crise que les mastodontes du secteur. “En 2001, elles ont su ajuster leur effectif à la demande du marché et réduire ainsi leur taux d’intercontrats. Inversement, les grandes SSII ont continué, l’été dernier, à embaucher et former massivement de jeunes diplômés.”

Recentrage sur les profils confirmés

Enfin, il y a les entreprises utilisatrices grandes consommatrices d’informaticiens et dont la direction informatique est basée en région parisienne. “Il s’agit de groupes évoluant dans des secteurs très dépendants de l’intégration de nouvelles technologies comme la banque, l’assurance, la grande distribution ou des industriels orientés high-tech (Cegelec, Thales…), note Gilles Cieza, directeur du département hautes technologies de TMP Worldwide France. Ils tirent des performances de leur système d’information un avantage concurrentiel, voire la condition de leur survie.”Concernant les profils recherchés, on note un net recentrage sur les professionnels confirmés ?” deux à cinq ans d’expérience ?” et, en corollaire, la quasi disparition des jeunes diplômés scientifiques formés à l’informatique. Le groupe Sys-Com a ainsi reporté ce type de recrutement. “Pour les six mois qui viennent, nous avons le sentiment de pouvoir reprendre des débutants, précise la DRH Edwige Detavernier, mais à une hauteur faible : à peu près 20 % et plutôt des informaticiens.” Privilégier les profils d’informaticiens permet également à Sys-Com de réduire le temps de formation : un mois, contre trois pour les candidats en reconversion.De son côté, Valtech admet moins communiquer auprès des grandes écoles. “Nous avons identifié vingt-trois écoles cibles, depuis longtemps, explique, pour sa part, Patrice Viémont, directeur des opérations d’ESR, et il ne s’agit pas de perdre ces relations. Ce serait une erreur à moyen terme. Mais évidemment, nos programmes avec elles sont moins actifs qu’avant la crise.”Enfin, s’il y a une population de non informaticiens qui ont la cote dans ce contexte, ce sont bien les commerciaux. Confirmés et directement opérationnels, ils ont pour mission de décrocher rapidement des contrats. En l’absence de résultats rapides, la sanction ne se fait pas attendre.Du côté des compétences requises, le marché fait, là aussi, la part belle aux valeurs sûres. Les technologies client-serveur devancent les nouvelles technologies tandis que les grands systèmes se maintiennent. “Les postes des développeurs sous Java, PHP ou Corba sont en net recul” confirme Patrick Pedersen, DG de Jobpilot.fr. Suivant cette tendance, Valtech a recentré ses activités sur les PGI et la gestion de la relation client, au dépend des activités IT et nouvelles technologies.

Une reprise à la rentrée ou… début 2003

Là encore, la banque, la finance et les assurances font figure de bouées de sauvetage. Homologation logicielle, grands systèmes, progiciels… autant de thèmes sur lesquels les sociétés de services disent vouloir se concentrer. “Sur les soixante-dix recrutements prévus pour le deuxième semestre, ajoute Elodie Jeanne, chargée du recrutement chez Valtech, vingt doivent entrer dans notre département banque-assurance.”Les acteurs du recrutement high-tech s’inquiètent désormais de savoir quand la reprise va enfin se dessiner. Si les plus prudents l’attendent début 2003, voire courant de l’année prochaine, des signes avant-coureurs laissent présager quelques frémissements dès la rentrée. Des plans de recrutement seraient en préparation pour septembre tandis que des chasseurs de tête sont de nouveau soumissionnés pour des contrats à longue durée.L’Ile-de-France vit en décalage estime Patrick Pedersen de Jobpilot.fr. “Ici, la crise a démarré en avril et en septembre dans le reste de la France. Nous devrions en sortir aussi avant.” Méthode Coué ? Peut-être. En attendant, le contexte fournit à certains une autre consolation : une meilleure réactivité en recrutement. “Nous n’avions pas vraiment de plan de recrutement en début d’année, admet Patrice Viémont chez ESR. Aucun gros événement n’était prévu et nous avions engrangé suffisamment de CV.” De même, la régularisation du marché, en termes de rémunération comme de turnover, est plutôt vue d’un bon ?”il.Et même si l’embauche repart, la surenchère salariale ne risque pas de faire surface immédiatement. Les professionnels du recrutement ne souhaitent pas rejouer les montagnes russes. L’effondrement du marché du travail qui avait suivi la folie recruteuse de 2000 est encore dans tous les esprits.

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Arnaud Devillard et Xavier Biseul