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Radio numérique : un rapport pose la question du maintien du projet

Un rapport remis par Marc Tessier au CSA préconise de repousser de plusieurs années l’arrêt définitif du signal analogique hertzien. Et pose même la question de son opportunité.

Le grand projet de passage à la radio numérique terrestre (RNT) n’en finit pas d’être repoussé. Et le rapport que vient de rendre Marc Tessier, directeur de Glowria et ancien président de France Télévisions, au Conseil supérieur de l’audiovisuel ne va pas arranger les choses (54 pages, à lire ici). Ce rapport, commandé par le Premier ministre, annonce la couleur dès les premières pages : si les (gros) éditeurs de contenus se sont montrés enthousiastes au début, ils craignent désormais de perdre des auditeurs si on oblige ces derniers à remplacer d’un coup leurs postes analogiques hertziens par des postes numériques plus coûteux.

« S’il est sans doute trop tôt pour retenir une date d’arrêt [de la diffusion analogique hertzienne FM et AM, NDLR] définitive, l’objectif doit cependant être réaffirmé et accepté par tous, et cela dans une perspective de temps comprise entre 2019 et 2021, afin que chacun puisse s’organiser en conséquence ». On est loin du déploiement de la radio numérique à la mi-2010 comme envisagé dernièrement…

Le rapport Tessier va même plus loin et estime qu’il est « encore temps de s’interroger sur l’opportunité du projet de radio numérique terrestre », notamment en cas de problème de financement.

Un manque d’étude approfondie sur le « bénéfice consommateur »

Le rapport Tessier déplore aussi le manque d’étude approfondie sur le « bénéfice consommateur » du projet, sur l’équipement par les foyers en nouveaux récepteurs et sur les usages attendus. A cause du prix des récepteurs numériques, Marc Tessier estime qu’« il n’est pas certain que plus de 50 % des foyers disposent d’un équipement dédié de réception numérique avant cinq ans »

Compte tenu du « prix moyen initial […] encore élevé » des terminaux, les services proposés par l’intermédiaire du numérique (interactivité, diffusion d’images et d’informations sur un écran…) ne suffiront pas à inciter les auditeurs à sauter le pas. De plus, l’interactivité tant vantée « n’est, à ce jour, prévue que dans un petit nombre d’équipements de réception (jeux, concours…) »

Autre problème de taille : les autoradios. Là aussi, le chantier prend du temps car équiper les voitures d’antenne de réception numérique aurait un « coût élevé ». « L’implantation de la radio numérique dans les véhicules ne sera que progressive et accompagnera le rythme de renouvellement du parc (soit sept ans en moyenne) ».

Pas de remise en cause de la norme

Un bon point cependant, le rapport note un réel intérêt du projet en ce qu’il va permettre d’améliorer l’offre radio. A la fois en nombre de stations et, surtout, avec l’extension de la couverture. C’est en tout cas un état des lieux mitigé que fait le rapport Tessier. La radio numérique devra longuement cohabiter avec la FM pour pouvoir, à terme, s’imposer en douceur dans les usages. « On a un peu le sentiment, en lisant ce rapport, qu’il n’y a pas la volonté politique pour porter la radio hertzienne sur le numérique comme il y en a eu une pour la TNT », regrette Pierre Boucard de SUN Radio, à Nantes. 

Autre regret : le document ne dit rien du sujet polémique de la norme retenue, le T-DMB, contestée notamment par les radios locales et associatives. « Il n’analyse même pas les raisons du rejet des autres normes [DRM, DAB, NDLR] », note Stéphane Hamon, responsable de la radio bretonne Littoral AM. Autre lacune, selon lui, le peu de cas fait de la réception sur mobile ou sur les appareils nomades en général, en Wi-Fi et en haut-débit, et donc des différents modes de diffusion à imaginer. Mais c’est écrit dans le rapport : « La mission n’avait ni l’ambition ni les moyens de trancher ce débat. » Ce qui est un peu dommage…

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Arnaud Devillard