Résumé du chapitre précédent :
Recommandé par un mystérieux ” top manager “, Arzel Serisy est nommé à la direction clientèle de Prestibank, banque en ligne du groupe Euryx-Bartabas. Une promotion semée d’embûches. Car de cet univers, si différent de celui qu’Arzel a connu comme chef du contentieux, il lui faut maîtriser le langage.La spontanéité, c’était sa faiblesse. Arzel n’était pas près de la maîtriser. Chez Euryx, il avait laissé le souvenir d’un homme plutôt lunatique et chaleureux pour un chef de contentieux. Il n’était pas calculateur. Il faisait ses premières armes à la direction clientèle de Prestibank avec le même naturel. Flairait-il une contradiction périlleuse qu’il la relevait. D’autres que lui, chevillés à leur strict intérêt personnel, auraient feint d’y être insensibles, préférant se réjouir en secret du conflit à venir, escomptant le plaisir qu’ils prendraient à compter les morts. Mais Arzel était trop vif, trop ingénu, pour goûter ce type de conspiration par défaut.”Je ne comprends pas où vous voulez en venir, fit-il en s’adressant tour à tour à Martigny et à Niak. Euryx ou Prestibank, chaque enseigne joue sa carte sur le marché. Librement. L’une et l’autre n’ont pas à s’entraider. Que je sache, les agences Euryx ont pour mission de satisfaire leurs clients, pas de les pousser chez Prestibank. Depuis la fusion, dans les courriers ou dans la lettre d’information d’Euryx, avons-nous relevé une allusion à Prestibank ?“
“- Jamais, en effet !“
D’un coup de poing sur la table, Martigny venait d’approuver. Niak renchérit :
“Assurance vie et crédit immobilier, c’est tout ce qu’Euryx a trouvé à vendre dans ce torchon. Point barre !“
“- C’est le jeu, reprit Arzel. Celui de la saine compétition entre les filiales.“
“- OK, OK, corrigea Martigny. Mais ça, c’est le discours officiel. En pratique, j’entends autre chose. Chaque fois qu’Euryx ferme les comptes d’un quidam passé chez Prestibank, c’est un client de gagné pour nous, un client de perdu pour eux.“
“- Il faut s’en féliciter, commenta Arzel. Celui-là aurait pu fuir vers la concurrence. Par bonheur, il reste client du groupe Euryx-Bartabas.”
“- En moins profitable“, maugréa Niak.
“- Momentanément, tempéra Martigny. En proportion, ça n’a qu’une incidence minime. Dans neuf cas sur dix, le nouveau client est pris à la concurrence. Au pire, on se tire une balle dans le pied une fois sur dix. La précision chirurgicale dans la prospection, ça n’existe pas. Tout comme la prospection dissuasive : on ne peut pas remettre à la mer un client Euryx qui a mordu à l’hameçon Prestibank.“
Arzel interrogea Niak :
“ Désolé, mais je n’ai pas votre expérience du marketing. Comment procédez-vous pour identifier les prospects ?“
“- Nous exploitons des fichiers, lui répondit Niak avec une infinie commisération. Ceux des personnes qui sont à un tournant de leur existence. Dans 95 % des cas, les gens restent fidèles à leur banque toute leur vie. Après tout, y a bien des femmes battues qui adorent leur mari.“
“- Niak a raison de souligner ce critère du bon prospect, ajouta Martigny. Surpris à un tournant de ses habitudes, il sera plus réceptif au changement.”
“- Nous adressons ceux qui emménagent, ceux qui changent d’automobile, ceux qui s’équipent d’un PC, ceux qui souscrivent à un fournisseur d’accès à internet (FAI), ceux qui partent en retraite, ceux qui commencent à cotiser aux mutuelles de cadres, ceux qui reprennent le travail après un congé sabbatique…”
“- Bienheureux, ces gens-là ! ” Le vieux Gaëtan savoura son effet. Arzel avait cru qu’il ne desserrerait pas les dents de toute la réunion. Cétait mal le connaître.
La semaine prochaine :” Portrait du techno-convertible “
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