Résumé du chapitre précédent :
Recommandé par un mystérieux ” top manager “, Arzel Serisy est nommé à la direction clientèle de Prestibank, banque en ligne du groupe Euryx-Bartabas. Une promotion semée d’embûches. Car de cet univers, si différent de celui qu’Arzel a connu comme chef du contentieux, il lui faut maîtriser le langage.Jusqu’à la tirade d’Alexis Niak sur la ” discrimination compétitive “, Arzel avait fini par oublier le parfum du génie du marketing. Il avait perdu de son mordant, il est vrai. Selon toute vraisemblance, c’était une eau de toilette de contrebande, bradée en Andorre ou à Dubaï. Une grossière contrefaçon du Jean-Paul Gaultier, à base d’un jus mariné avec de l’éther, des filets de harengs et des clous de girofle. Idéale pour un commercial, inattendue chez un homme de marketing. Un contraste cependant plus recherché dans l’univers des nouvelles technologies (NT) que dans les études notariales. En témoigne l’adage américain : ” High-tech, high touch “.Sous une marque parasite, du type ” Marcel Gautier “, le mélange explosif de Niak aurait fait un tabac parmi le peuple viril des bykers en cuir et clous. Pour ça, il sentait fort, par bonheur, il était aussi très volatil. Toutefois, parmi ses propriétés, il y en avait une que personne ne pouvait soupçonner : sa susceptibilité.
Le ” Marcel Gautier ” était capable d’une soudaine recondensation au contact d’une autre essence, inamicale. Personne ne l’aurait soupçonné si Niak n’avait jeté une telle consternation chez Marie-Rachel. La chef des opératrices était commotionnée. Il lui était venu comme un angiome au milieu du front. Son système endocrinien battait la breloque.
Indétectable jusque-là, son parfum s’était mis à embaumer. Entré en conflit avec les molécules en suspension du jus de Niak, acidifié sous l’effet d’un torrent d’adrénaline, il avait viré à 180?’. D’une aigreur insoutenable, il pénétrait les trous de nez, les pharynx. Moitié Marcel, moitié Régine, il s’insinuait jusqu’au canal biliaire. Martigny allait reprendre la parole lorsqu’une quinte de toux l’avait terrassé.Enfin, Marie-Rachel trouva la ressource de s’indigner :
“ Comment oses-tu, Alexis ?
” Elle marqua un temps. Voulait-elle attirer l’attention sur l’étrange manège de Niak ? Sans un regard pour la chef des opératrices, il continuait à caresser son pardessus.
“Plaider pour la “discrimination” ? Alors qu’on vient de former une équipe homogène sur ce centre d’appels… C’est indécent ! Tu parles de “discrimination compétitive”, mais où veux-tu en venir ? S’il s’agit de renvoyer les opératrices les moins capables, c’est un peu tôt. On vient de les former ! “
Il était temps que Martigny reprenne le contrôle :
– “C’est un malentendu, Marie-Rachel. Alexis ne parlait pas de ton équipe, il parlait de nos clients.”
“?”En effet, reprit Niak. Des clients, il nous en faut davantage, mais pas à n’importe quel prix. C’est ça que j’appelle discrimination compétitive…“
C’est le moment que choisit Arzel pour rappeler qu’il était du métier. Solder un contentieux, il savait faire :
“?” Au lieu de ” discrimination “, il serait plus judicieux de parler de ” sélection “. Compétitive, ça va de soi !
“?”En effet, approuva Martigny. Nous voulons attirer de nouveaux clients chez Prestibank qui ne soient pas déjà de bons clients d’Euryx, la maison mère. C’est la marge d’exploitation de la banque traditionnelle qui finance le déficit de notre banque en ligne. Il est vital d’éviter l’effet cannibale. Prestibank doit cibler en priorité tous les prospects, sauf ceux qui font la prospérité d’Euryx. Comment opérer le tri en toute légalité ? Cest toute la question ! “
La semaine prochaine :” Prospection dissuasive”
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