Le Centre national d’études spatiales (CNES) a fêté ses 60 ans au mois de décembre dernier. Tout un symbole puisque cette structure a été voulue par le président de Gaulle pour faire de la France une puissance spatiale, comme le rappelait lors des voeux du CNES ce 11 janvier son PDG, Philippe Baptiste.
Nul ne peut nier que c’est toujours le cas aujourd’hui, même si notre pays n’investit pas autant d’argent dans ce domaine que les Etats-Unis et qu’il ne peut mener seul de grands programmes. Ils sont développés soit à l’échelle européenne, soit au niveau international ou bilatéral. Mais il ne faut pas oublier que la France reste le plus gros contributeur de l’Agence spatiale européenne (ESA).
Le spatial est l’une des priorités d’Emmanuel Macron
La position de la France est cependant menacée et ses grands acteurs comme ArianeGroup ou Arianespace sont menacés sur leur terrain. Le secteur est en profonde mutation avec l’arrivée sur le marché de nouveaux acteurs privés et innovants, qui bouleversent les pratiques de l’industrie, comme SpaceX. Sans oublier une concurrence accrue entre pays, ainsi que la montée en puissance de la Chine ou des Emirats arabes unis. Pour ne pas se faire éclipser, la France va accorder une manne supplémentaire de 1,5 milliard d’euros dans le cadre de France 2030, en plus des 365 millions d’euros du plan de relance. L’enveloppe sera consacrée aux mini-lanceurs réutilisables, aux mini satellites, et aux constellations.
Car le spatial, c’est l’une des priorités du président Emmanuel Macron. Il y voit un enjeu de souveraineté nationale et une opportunité de développement économique. Plusieurs grands rendez-vous vont justement jalonner 2022.
Ariane 6 : un vol inaugural sous haute tension
C’est un programme de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) dans lequel la France est particulièrement impliquée via ses industriels et qui devrait être l’événement majeur de 2022 pour notre pays. Le vol inaugural d’Ariane 6 est prévu au second semestre 2022.
Ce lanceur léger est destiné à remplacer Ariane 5, qui a eu son succès mais qui paraît aujourd’hui trop lourd et cher à fabriquer. Son successeur doit apporter plus de flexibilité, se tourner vers de nouveaux marchés, et se montrer plus compétitif grâce à des coûts moindres.
Il sera donc modulable selon la mission. Une première version est dotée de quatre boosters pour de gros satellites géostationnaires, par exemple. Mais il pourra aussi se contenter de deux boosters avec des capacités d’emport beaucoup plus faibles. Il sera enfin en mesure d’assurer des lancements complexes comme la mise en orbite de satellites à propulsion électrique ou le lancement multiple de constellations, grâce à un étage supérieur équipé d’un moteur ré-allumable. Malheureusement, il n’est pas réutilisable ce qui le rend d’emblée déjà un peu obsolète.
Mais il est capital pour l’Europe et la France que ce premier lancement et le développement commercial réussissent pour ne pas perdre encore davantage de parts sur le marché des lanceurs.
Exomars : un programme européen sur Mars
Encore un programme de l’ESA structurant pour la France. ExoMars s’articule autour de deux missions. Il y a d’abord eu Trace Gas Orbiter, lancée en 2016, et chargée d’étudier les gaz de la planète rouge. C’est la seconde partie qui va être déployée cette année. Elle doit poser un rover et une plate-forme de surface qui exploreront la question de la vie sur Mars en étudiant notamment son atmosphère. Notre pays fournit de nombreux instruments scientifiques au robot.
C’est une première pour l’Europe. Outre l’intérêt scientifique de la mission, c’est une occasion d’acquérir de nouvelles compétences en développant et en faisant fonctionner cet « atterisseur » et ce rover martien. Un savoir-faire réutilisable pour d’autres missions futures.
Le lancement est prévu le 20 septembre avec une arrivée le 10 juin 2023 sur Mars.
Les pleines capacités de Galileo
Le système de positionnement par satellite européen Galileo va bénéficier de deux nouveaux satellites au premier semestre 2022, puis de deux autres au cours du deuxième semestre. Ils seront lancés par Arianespace depuis Kourou et assureront pour la première fois la pleine capacité opérationnelle des services Galileo.
Les missions prévues en 2023, 2024 et 2025 amélioreront la résilience de la constellation, qui compte actuellement 28 satellites, et qui est active depuis 2016.
Galileo assure être actuellement le système de navigation par satellite le plus précis au monde et desservir déjà plus de deux milliards d’usagers.
Le commandement de l’espace renforce sa surveillance
Le spatial est aussi un enjeu militaire pour le ministère français des Armées. Le commandement de l’espace voulu par Emmanuel Macron va encore renforcer ses outils sous la houlette de la DGA (Direction générale de l’armement).
Le satellite militaire Syracuse 4B, du programme Syracuse IV, doit être lancé cette année. Il rejoindra ainsi Syracuse 4A, lancé en 2021. L’idée est de former une constellation, de manière à fournir des capacités de communications à très longue distance aux forces armées où qu’elles se trouvent et quelle que soit la situation, même en cas de crise ou de catastrophe naturelle. Ces satellites sont aussi conçus pour résister aux tentatives hostiles de brouillage et disposent de capteurs pour détecter l’approche de débris ou de satellites espions.
Côté observation, ce sera au tour du satellite CSO-3 d’être envoyé. Il viendra compléter les deux premiers CSO déjà déployés. L’ensemble de ce système va remplacer progressivement les satellites Hélios 2 actuellement en service. CSO devrait permettre de recueillir un plus grand nombre d’images d’une même zone géographique en un seul survol avec une meilleure qualité.
Les trois nouveaux satellites militaires du système CERES vont également entrer en service. Ils seront dédiés au renseignement électromagnétique et assureront une couverture géographique mondiale, par tout temps, et de jour comme de nuit. Il deviendra possible de caractériser les émissions radar ou les télécommunications provenant de n’importe quelle zone d’intérêt ou de conflit, de manière à détecter une menace.
2022 sera marqué au niveau spatial par de nombreux autres événements dont la France sera partenaire comme deux missions menées par la NASA : le lancement de la sonde Juice, à destination de Jupiter, ou encore le satellite d’observation Swot, qui doit mesurer le niveau des eaux de surface.
Difficile également de ne pas évoquer le projet européen de lanceur réutilisable auquel la France tient particulièrement et qui est censé aboutir dès 2026. Le projet reste encore flou et pourrait être précisé lors du Conseil ministériel de l’ESA, qui se tiendra à Paris en novembre.
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