Après la loi du 1er août 2000 et l’amendement Bloche intégré à celle du 30 septembre 1986 sur la liberté de communication, la responsabilité des animateurs de services interactifs ou de forums se trouve aujourd’hui au centre des débats. En fait, un hébergeur est pénalement ou civilement responsable du contenu diffusé s’il n’a pas empêché l’accès au contenu incriminé, une fois qu’une condamnation est prononcée.Mais la jurisprudence et l’amendement Bloche ont conduit à une immunité des prestataires techniques pour les propos tenus sur les pages et forums qu’ils hébergent. Or, s’est rapidement posé le problème du recours d’une victime diffamée s’il est impossible d’en identifier l’auteur. Faut-il rechercher la responsabilité du créateur, du modérateur ou de l’administrateur du forum ? Les juges français se sont récemment prononcés sur ce point.Le 28 mai 2002, le Tribunal de grande instance (TGI) de Lyon a condamné, pour la première fois en droit français, les administrateurs d’un site pour des propos diffamants à l’encontre d’un cybermarchand publiés sur leur forum non modéré. Les webmasters ont été reconnus responsables pour l’ensemble des messages publiés sur tous les types de forums.Surprenante dans le cas de forums non modérés, cette solution a été confirmée par le TGI de Toulouse le 5 juin 2002. Après avoir laissé diffuser sur un forum non modéré des critiques sur une association, le créateur d’un site s’est ainsi vu suspendre l’accès à son serveur, les messages incriminés étant, en parallèle, supprimés.Le juge a considéré qu’il aurait dû surveiller tous les contenus. Cette solution, logique lorsque la diffamation se produit sur un forum modéré, l’est donc aujourd’hui tout autant dans les affaires ayant lieu sur des forums non modérés.La responsabilité retenue serait fondée sur le Code civil (articles 1383 et 1384) posant le principe de la responsabilité du dommage causé par la négligence ou l’imprudence et retenant celle du fait des choses dont on a la garde. Concrètement, le créateur d’un forum serait responsable pour son incapacité à maîtriser ce qui se passe sur son site.Mais le Tribunal a décidé d’imposer aussi à l’hébergeur une “obligation générale de prudence et de diligence“, le contraignant à installer des moyens de surveillance, au risque d’être civilement responsable.Le Tribunal d’instance de Nantes a entériné le 28 juin 2002 un accord conclu entre le webmaster d’un forum non modéré et le président de la CPAM. Des propos illicites formulés à l’encontre du second ont été tenus sur un forum où des médecins réagissaient aux amendes infligées à ceux qui facturaient leurs consultations à un prix supérieur au tarif en vigueur.Le webmaster, qui reconnaît avoir “failli à son obligation de modération”, a fermé son site et payé une amende symbolique, alors que l’hébergeur du site et le prestataire du système de forums avaient déjà rempli leurs obligations légales (fermer le forum et publier l’assignation).Refuser d’appliquer aux créateurs de forums la protection de la loi du 1er août 2000 induira, à terme, la suppression inéluctable de tous les forums non modérés.*Avocate / murielle-cahen.com
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