Mairie du 18e, salle des mariages. Nous sommes le mercredi 10 avril, il est 19 h. Une petite vingtaine de personnes attend de pied ferme le début des hostilités. Car ce soir, la mairie d’arrondissement organise une réunion d’information sur l’installation d’antennes relais 4G dans neuf endroits de la division administrative. Pascal Julien, adjoint au maire chargé des espaces verts et de l’environnement, entre et s’installe derrière les micros, suivi peu de temps après par deux cadres de France Telecom-Orange.
L’élu salue la salle et précise d’emblée : « Une antenne relais, c’est d’abord un contrat de droit privé. C’est un bailleur qui accepte d’offrir en location son toit ou sa façade à un locataire pour une somme comprise généralement entre 10 et 20 000 euros par an. La municipalité n’a aucun droit de l’interdire. » Un bruit de mécontentement parcourt les rangs clairsemés de la salle. « Et qu’en est-il des risques de santé liés aux ondes alors ? Et à quoi servent finalement ces réunions ?», lance une femme, visiblement au taquet.
Les débats sont stériles
Actuellement, ce type de spectacle se répète toutes les semaines à la mairie du 18e. L’organisation d’une réunion d’information sur l’installation d’antennes relais revient à la municipalité, qui pourrait très bien ne rien faire. La mairie du 18e a décidé de jouer le jeu jusqu’au bout, et les opérateurs sont obligés d’y participer, conformément à la nouvelle charte qu’ils ont signée avec la Ville de Paris en octobre 2012. Mais, soyons honnêtes, l’intérêt de ces réunions est limité et les débats sont stériles.
Les deux cadres de France Telecom-Orange sont arrivés, armés de plusieurs dizaines de pages Powerpoint, de quoi endormir tout un régiment. Pour chacun des neuf emplacements, ils ont listé les installations sensibles aux environs: crèches, écoles maternelles, écoles élémentaires, établissement de consultation infantile, etc. Et pour chacun de ces sites est indiquée la distance à l’antenne en question et une estimation de l’exposition aux champs électromagnétiques. Le chiffre ne dépasse jamais les quelques Volts/mètre. En tous les cas, il reste bien en dessous de la limite fixée par la charte, à savoir 7 V/m. Forcément.
« Vous nous enfumez ! »
Mais les deux cadres ont à peine le temps de finir leur présentation qu’un ouragan de protestations leur tombe dessus, de la part des citoyens présents. « Les opérateurs sont des mafieux ! » « C’est un scandale, il y a danger sanitaire. On nous refait le coup de l’amiante ! » « Je connais un technicien qui faisait de la maintenance sur les antennes relais. Il est mort d’un cancer ! » « Vous avez lu Le Monde ? Une étude vient de prouver que les ondes ont bien des effets biologiques sur les êtres vivants ! » « Vous nous enfumez. C’est comme Cahuzac ! » etc., etc.
Les interventions sautent du coq à l’âne, mélangeant rumeurs et informations scientifiques. Certains épinglent ces « lobes secondaires qui crachent beaucoup », d’autres soulignent la nocivité liée aux « ondes pulsées », d’autres encore évoquent d’obscures machinations destinées à faire taire ceux qui gênent. Mais tous ont un point en commun : ils sont viscéralement contre les ondes électromagnétiques. Et c’est pour cela qu’ils sont venus. Ceux qui sont pour les antennes relais sont restés chez eux. D’autant plus que ce soir-là, il y avait un bon match de foot à la télé, PSG contre FC Barcelone.
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