Le réseau social TikTok protège-t-il suffisamment les enfants ? La plateforme de partage de vidéos courtes de ByteDance est à nouveau dans le collimateur des autorités, cette fois britanniques. L’organisme chargé de défendre la vie privée outre Manche, « l’Information Commissioner’s Office » (ICO), a annoncé ce lundi 3 mars, ouvrir une enquête à l’encontre de la plateforme chinoise. Dans son viseur : la façon dont le réseau social utilise les données personnelles des 13-17 ans pour leur suggérer ou recommander des contenus.
Les réseaux sociaux utilisent des algorithmes qui déterminent le contenu du fil d’actualité. Ce contenu varie en fonction de l’âge et des intérêts des utilisateurs. Or, TikTok utiliserait les données personnelles des 13-17 ans, ainsi que les données générées par leur activité en ligne, dans son système de recommandation, « ce qui pourrait conduire à proposer aux jeunes des contenus inappropriés ou préjudiciables », écrit la CNIL britannique.
Depuis 2021, les plateformes doivent, au Royaume-Uni, respecter le « code de protection de la vie privée des enfants en ligne », un texte qui vise à s’assurer que les réseaux sociaux prennent des mesures pour protéger les données personnelles des mineurs. Si les plateformes peuvent collecter leurs données, cela doit se faire a minima, et les data recueillies doivent être traitées avec des précautions supplémentaires.
TikTok empêche-t-il suffisamment les enfants d’être exposés à des contenus nocifs ?
Pour John Edwards, à la tête de l’ICO, tout l’objet de l’enquête est de s’assurer que les processus mis en place par TikTok pour assurer la sécurité des enfants « sont suffisamment robustes pour les empêcher d’être exposés à des dangers, qu’il s’agisse de pratiques addictives (…), de contenus qu’ils voient ou d’autres pratiques malsaines », explique-t-il à l’agence de presse PA, cité par le Guardian.
TikTok estime de son côté que « (ses) systèmes de recommandation sont conçus et fonctionnent selon des mesures strictes et complètes qui protègent la vie privée et la sécurité des adolescents, y compris des fonctions de sécurité à la pointe de l’industrie et des restrictions strictes sur le contenu autorisé dans les fils d’actualité des adolescents », rapporte Politico.
L’autorité britannique n’est pas la première en Europe à se pencher sur le sujet. La plateforme préférée des Jeunes est accusée depuis des années de nuire à la santé mentale des adolescents. Non seulement son algorithme rendrait le réseau très addictif, conçu pour que les enfants regardent le site le plus longtemps et le plus souvent possible avec ses notifications push, ses achats in-app et le fait que les vidéos défilent indéfiniment. Mais il mettrait en avant des contenus problématiques comme des vidéos prônant l’anorexie ou des jeux dangereux.
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En France, TikTok a fait l’objet d’une plainte du collectif Algos Victima déposée en novembre dernier. La plateforme est accusée d’avoir diffusé auprès d’adolescents des contenus problématiques prônant l’automutilation, l’anorexie ou le suicide, après que ces derniers ont regardé des vidéos liées à l’alimentation ou à l’image de soi. Or, de tels contenus auraient dégradé leur santé mentale et physique en alimentant, voire amplifiant, leur mal-être, expliquent les sept familles françaises réunies dans le collectif.
À Bruxelles, la Commission européenne a ouvert une enquête dans le cadre du DSA en février 2024 sur le même sujet. L’exécutif européen s’inquiétait aussi des effets négatifs des algorithmes de TikTok, susceptibles d’accélérer les « dépendances comportementales » et de favoriser l’effet de puits sans fond (« rabbit hole ») dans lequel les utilisateurs s’enfoncent de plus en plus profondément.
Aux États-Unis aussi, TikTok a été attaqué en novembre 2024 par 13 États américains, ainsi que le district de Columbia, qui l’accusent de ne pas assez protéger les jeunes utilisateurs.
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Reddit et Imgur aussi concernés
Outre Manche, l’ICO ne va pas que se pencher sur TikTok. L’autorité va étudier de près deux autres plateformes : le site de forums Reddit et la plateforme de partage d’images Imgur. La CNIL britannique compte examiner la façon dont les deux sociétés évaluent l’âge de ses utilisateurs mineurs.
« Si nous estimons qu’il existe des preuves suffisantes que l’une de ces entreprises a enfreint la loi, nous leur en ferons part et nous attendrons leurs observations avant de parvenir à une conclusion définitive », précise le régulateur britannique dans son communiqué.
En 2023, l’ICO avait déjà infligé à TikTok une amende de 15 millions d’euros environ pour avoir enfreint la législation locale sur la protection des données : la plateforme était accusée d’avoir utilisé les données personnelles d’enfants âgés de moins de 13 ans sans le consentement de leurs parents – le réseau social a fait appel de la décision.
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